Pour la reprise de la saison NHL, Hockey Archives fait le bilan de la saison 2022-2023 et de l’intersaison afin de vous présenter au mieux les 32 franchises.
Première étape : la division Atlantique.
Deuxième étape : la division Métropolitaine.
Note : bilans des équipes : victoires, défaites, victoires après le temps réglementaire, défaites après le temps réglementaire.
Carolina Hurricanes
Saison 2022-2023 : 39-21-13-9 = 113 pts. Buts pour 266, Buts contre 213
Éliminés au 3e tour contre Florida 4 victoires à 0.
Privés de playoffs entre 2010 et 2019, les Hurricanes enchaînent depuis les performances solides. Deuxièmes de la ligue derrière Boston, avec la deuxième meilleure défense, ils ont atteint le carré final pour la première fois depuis 2019. Une saison réussie mais à la fin très frustrante. Plutôt dominants dans le jeu face aux Panthers, ils n’ont pas su convertir leurs chances et se sont fait piégés par la magie combinée de Serge Bobrovsky et Matthew Tkachuk, laissant le coach Rob Brind’Amour sonné. Interrogé sur ce balayage 4-0, il répond “Ce n’est pas ce qui s’est passé. J’ai vu les matchs, les quatre auraient pu basculer de l’autre côté.” Et pourtant, c’est bien ce qui s’est passé : 4-0.
Le principal point faible reste sans doute le poste de gardien. Frederik Andersen (90,3% en 34 matchs) et Antti Raanta (91%, 27 matchs) ont passé bien du temps à l’infirmerie et, s’ils ont fait le boulot aux deux premiers tours face aux Islanders et Devils, ils ont failli au moment clé. Plus ennuyeux, Carolina se retrouve avec un trio puisque le jeune Pyotr Kotchekov a tout autant assuré que ses aînés (90,9%, 24 matchs). Un partage équitable assez rare à ce niveau.
La défense a de toute façon parfaitement compensé ces prestations somme toute moyennes, à la faveur d’un système de jeu particulièrement efficace. Le groupe d’arrières est réputé pour la qualité de sa relance et de son engagement pour tenir le palet à l’avant. Un système qui a puni notamment les Devils au deuxième tour, avec de longues séquences offensives, duels gagnés dans les bandes et appui sur les défenseurs. Parmi les artilleurs en chef, le vétéran Brent Burns n’a pas ralenti avec l’âge, signant 18 buts et 61 pts pour sa première saison après son départ de San José. Une arme précieuse, avec le relais de Brady Skjei, ex-Ranger (18 buts, 38 pts). Les autres ont plutôt joué un rôle défensif, à l’image de l’excellent Jaccob Slavin (27 pts), de la révélation Jalen Chatfield (14 pts) et surtout du solide Brett Pesce (30 pts). Pour autant, Rob Brind’amour recevra de nouvelles contributions avec l’arrivée du défenseur le plus convoité du marché, l’ex-Capital Dmitri Orlov, libre après une fin de saison écourtée à Boston. Le staff enregistre aussi le retour de Tony DeAngelo, qui avait porté les couleurs des ‘Canes en 2021-2022 et reste sur une saison de 42 pts à Philadelphie. Bref, la défense, déjà très riche, l’est encore plus – Caleb Jones arrivant de Chicago pour la profondeur de banc.
Les armes offensives sont multiples et équilibrées. Le fer de lance, c’est Sebastian Aho, 36 buts et 67 pts, très en vue en playoffs (12 pts). Pourtant, il a été devancé par Martin Necas, à l’éclosion tant attendue, auteur de 28 buts et 71 pts. Sur les ailes, Andei Svechnikov n’a joué que 64 matchs et son absence a fortement pesé durant les phases finales. Avec 23 buts et 55 pts, ce sniper aurait été bien utile pour faire basculer un match…
La profondeur de banc est réelle, que ce soit au centre – Jesperi Kotkaniemi, 43 pts – ou à l’aile. Seth Jarvis a franchi un réel cap (39 pts) et a talonné Aho en playoffs (5 buts, 10 pts), son style de jeu y trouvant sa place, tout comme Jordan Martinook (34 pts, 12 en playoffs) et Jesper Fast (29 pts, 6 buts en playoffs). Le vétéran Jordan Staal, Teuvo Teräväinen, Stefan Noesen et Paul Stastny complètent l’alignement. L’acquisition de la deadline Jesse Puljujärvi n’a en revanche pas été conservée, tout comme Max Pacioretty, qui n’a joué que 5 matchs pour cause de blessure. La principale recrue est l’ex-Leafs Michael Bunting, dont le profil physique et provocateur semble une réponse au “problème” Tkachuk…
Un effectif riche et varié, de l’expérience à revendre et une défense encore augmentée : Carolina fait figure de grandissime favori à l’Est. Mais son principal rival réside sans doute dans sa propre division…
New Jersey Devils
Saison 2022-2023 : 39-22-13-8 = 112 pts. Buts pour 291, Buts contre 226
Éliminés au 2e tour contre Carolina 4 victoires à 1.
La saison de tous les records ! Les Devils sont passés de 63 à 112 points, soit le plus spectaculaire revirement de l’histoire de la ligue. 3e de la NHL, les Devils y ont battu leur record de points, de victoires, le record individuel (99 pts pour Jack Hughes), balayé les sept équipes canadiennes et les trois californiennes sur leurs glaces… On en passe et des meilleures pour l’une des équipes les plus spectaculaires de la saison.
New Jersey aura lutté avec Carolina pour le titre de division toute la saison et a gagné sa première série de playoffs depuis 2012 en renversant des Rangers plus expérimentés en sept matchs. Une série qui avait mal débuté avec deux lourdes défaites à domicile, avant que le staff ne lance dans le but Akira Schmid, 22 ans, à peine sorti de junior et AHL. Le Suisse a sorti deux blanchissages sur les cinq matchs suivants…
Schmid ouvre ainsi un débat dans les cages, puisque Vitek Vanecek (91,1%) a craqué dans ces phases finales après une saison de 33 victoires – premier gardien à cette barre depuis Martin Brodeur. L’échange de Mackenzie Blackwood à la draft clarifie la situation : Vanecek-Schmid auront la lourde tâche de transformer la progression spectaculaire du reste de l’effectif en titre.
La défense connaît cependant de profonds changements. Damon Severson, au club depuis plus de dix ans, a été laissé libre et a signé à Columbus après sa saison de 33 pts. L’arrière mobile à la relance de haut niveau était parfois coupable de quelques “oublis”, et pris en grippe par une partie des fans. L’impact de Ryan Graves (26 pts), parti à Pittsburgh, était plus défensif et physique, et il semblait avoir perdu un peu de vitesse cette saison.
Ces deux départs sont calculés, car deux jeunes arrivent. Luke Hughes (4e à la draft 2021) et Simon Nemec (2e à la draft 2022) semblent prêts à bousculer la hiérarchie. Le premier est apparu en fin de saison, marquant son premier but NHL en overtime lors du 82e match, avant de jouer trois matchs face aux Hurricanes en playoffs, avec un temps de jeu considérable. Nemec a pour sa part réussi l’une des meilleures saisons d’un défenseur de 18 ans en AHL.
Pour les encadrer, le top-4 reste dominant : Dougie Hamilton, 22 buts et 74 pts (record de buts de l’équipe), les défensifs John Marino et Jonas Siegenthaler, ainsi que le grand Kevin Bahl, qui a su gagner sa place au fil de la saison et remplacera poste pour poste Ryan Graves. L’arrivée de Colin Miller apporte de la profondeur de banc, après sa saison de 21 pts à Dallas. Le vétéran Brendan Smith devrait jouer le rôle de mentor de la jeune garde, comme il l’a fait la saison dernière, en rôle de septième défenseur.
Le manager général Tom Fitzgerald a réussi son été pour ses lignes d’attaque. Il a réussi à prolonger Jesper Bratt (25 ans) pour 8 ans, fort d’une saison de 32 buts et 73 pts, records de carrière. Il a resigné Timo Meier (26 ans), acquis de San José à la deadline, pour 8 ans également, lui qui avait marqué 40 buts aux Sharks. Les deux ailiers rejoignent ainsi Jack Hughes (43 buts, 99 pts) et Nico Hischier (31 buts, 80 pts) dans la liste des joueurs encore là pour des années… Hughes, explosif toute la saison, a gagné sa place parmi les All-Stars de la ligue par sa vitesse, sa technique et sa vision du jeu hors norme… et n’a que 22 ans. Hischier, 24 ans, a fini 2e derrière Patrice Bergeron pour le trophée Selke.
Le banc est énorme, même avec le départ de Tomas Tatar (48 pts) et Miles Wood (27 pts, Colorado tous les deux). Il reste le solide Erik Haula (41 pts), le vétéran Ondrej Palat (23 pts en 49 matchs) et le jeune Dawson Mercer, spectaculaire toute l’année (27 buts, 56 pts). Fitzgerald est même allé chercher Tyler Toffoli contre Yegor Sharangovich (30 pts, Calgary). Toffoli, capitaine du Canada au Mondial, apportera toute son expérience en supériorité numérique, l’un des points moins convaincants la saison dernière, et reste sur un record de carrière (73 pts). Enfin, on compte sur la progression de Michael McLeod (26 pts), brillant en playoffs, et l’un des meilleurs aux mises au jeu de toute la ligue, et du grand espoir Alexander Holtz, cantonné au banc une bonne partie de la saison avant de dominer en AHL. Parviendra-t-il à gagner sa place ? L’impact physique du bottom-6 viendra de Nathan Bastian et Curtis Lazar, ainsi que des arrivants Tomas Nosek et Chris Tierney.
3e de la ligue, un système de prospects classé 2e par le site spécialisé The Athletic : New Jersey est aussi classé 1er par ESPN dans son classement des équipes de demain. Le média estime que l’équipe va dominer la ligue dans les prochaines années. L’expérience de ces playoffs 2023 servira sans nul doute de bonne leçon.
New York Rangers
Saison 2022-2023 : 37-22-10-13 = 107 pts. Buts pour 277, Buts contre 219
Éliminés au 1er tour contre New Jersey 4 victoires à 3.
Battus 3-0 au match 7 du premier tour contre les inexpérimentés Devils, les Rangers de New York ont passé tout l’été à tenter de comprendre comment la série avait pu leur échapper. Ils avaient tout : gagner deux fois sur la glace de New Jersey d’entrée, un gardien en feu et une expérience longue comme le bras. Le gros casting de la deadline – Patrick Kane et Vladimir Tarasenko – n’a pourtant servi à rien lorsque les Devils, laminés aux deux premiers matchs, ont simplement abandonné le jeu physique, gagné en discipline et joué sur leur vitesse. Les lacunes new-yorkaises sont apparues criantes : une équipe lente, faible à 5 contre 5 (17e de la ligue avec 49,8% au Corsi), qui s’appuie avant tout sur un gardien exceptionnel (91,6% pour Igor Shestyorkin en saison, 93,1% en playoffs) et un jeu de puissance particulièrement efficace (24%, 7e de la ligue).
Ce fiasco, après deux matchs dominateurs, a coûté son poste à l’entraîneur Gerard Gallant, remplacé par Peter Laviolette. Ce dernier aura la lourde tâche d’équilibrer le jeu de l’équipe, de trouver un moyen de dynamiser Artemi Panarin en playoffs, et de développer enfin les jeunes Alexis Lafrénière et Kaapo Kakko, en progression certes, mais loin du standing attendu de top-2 de draft. On peut toutefois se demander s’il est l’homme de la situation. Champion en 2006, il a depuis coaché cinq équipes mais n’a pas passé le premier tour depuis 2018 avec Nashville…
Pour le bilan comptable, la saison régulière a été facilement gérée, en talonnant Carolina et New Jersey toute l’année. Sherstyorkin a fait le travail en saison régulière comme en playoffs, protégé par une défense efficace autour d’Adam Fox (72 pts), K’Andre Miller (43 pts) et le rugueux Jacob Trouba (30 pts). Le rôle plus défensif du jeune Braden Schneider et du vétéran Ryan Lindgren (18 pts tous les deux) a également contribué.
Offensivement, Artemi Panarin, 29 buts et 92 pts, a alimenté une pléïade de buteurs, dont Mika Zibanejad (39 buts, 91 pts) et Chris Kreider (36 buts, 54 pts). Le talent de ce dernier autour de la cage, en déviation ou au rebond, s’est tout autant vu en playoffs (6 buts, 9 pts). L’inconvénient, c’est la disparition du reste du roster dans les matchs 3 à 7, marqués par deux blanchissages… Quel banc, donc ? Vincent Trochek et ses 22 buts et 64 pts mais un seul en playoffs, Filip Chytil (22 buts, 45 pts), Kakko (40 pts), Lafrenière (39), Barclay Goodrow (31 pts), Jimmy Vesey (25 pts)… tous ont failli face aux Devils. Kane (6 pts) et Tarasenko (4) ont été en vue lors des deux premiers matchs, mais ont disparu après.
La vitesse, argument phare des rivaux des Devils et des Hurricanes, a été exposée en playoffs, mais pour autant le staff n’a pris aucune mesure en ce sens. L’arrivée du vétéran Blake Wheeler de Winnipeg pour seulement 800.000$ est une aubaine, le joueur acceptant un tel montant car il bénéficie du rachat de contrat par les Jets. Mais, à 37 ans, a-t-il encore de quoi contribuer ? Erik Gustafsson complète la défense, après une saison réussie à Washington, mais, s’il apporte à la relance, son jeu purement défensif a souvent été critiqué. Enfin, le bottom-6 a reçu les renforts de Tyler Pitlick, Riley Nash et Nick Bonino, soit deux joueurs à cheval avec l’AHL et un vétéran en bout de course.. Côté gardien, c’est Jonathan Quick qui a été choisi en backup, un choix risqué tant l’ancien vainqueur de la coupe Stanley a décliné depuis plusieurs saisons… En bref, un recrutement estival pour une fois sans relief, mais pas vraiment emballant.
L’effectif reste de qualité et une place dans le top-3 semble largement à la portée des Rangers. Pour autant, face aux Hurricanes et aux Devils, il n’est pas certain que cela suffise. Les causes de la défaite du printemps ne semblent pas avoir été identifiées. Mais il reste Shestyorkin, et c’est un atout énorme.
New York Islanders
Saison 2022-2023 : 36-31-9-11 = 93 pts. Buts pour 243, Buts contre 222
Éliminés au 1er tour contre Carolina 4 victoires à 2.
Les Islanders ont atteint les playoffs, et c’est à peu près tout. Ils ont offert une résistance honnête face aux Hurricanes, sans pour autant bousculer le favori de la division. C’est que l’équipe est bancale, juste dans la moyenne et bien loin de ses deux finales de conférence consécutives (2020, 2021). Le vieux manager général, Lou Lamoriello, atteint les 81 ans, et ses idées, déjà périmées lors de ses dernières années aux Devils, résistent mal au changement de physionomie d’une NHL plus rapide et moins physique.
Du coup, la saison peut se résumer à Ilya Sorokin. Troisième de la ligue en sauvant plus de 38 buts anticipés (derrière Linus Ullmark et Juuse Saros), le portier russe a tenu sa défense à bout de bras. Il aura joué 62 matchs, pour 92,4% d’arrêts, pour seulement 4 millions de dollars ! Ce sera la dernière année à ce prix-là, avant que son extension de 8 ans à 8,2 millions, fraîchement signée, ne se mette en route. Lamoriello a même choisi d’offrir quatre ans au remplaçant Semyon Varlamov, sécurisant l’un des meilleurs duos de la ligue à long terme.
Partir du gardien, c’est bien, mais pas suffisant : sans eux, les Islanders n’auraient tout simplement pas existé. Le départ de l’historique Joshua Bailey, 1057 matchs et 580 pts pour la franchise, toujours sans club à 34 ans, n’a pas vraiment été compensé, si ce n’est par l’arrivée à la deadline du printemps de Bo Horvat. Le sniper de Vancouver a mis du temps à trouver la cible et n’a compilé que 16 pts en 30 matchs, puis un maigre but en playoffs. Son adaptation sera cruciale pour soulager Matthew Barzal, limité la saison dernière à 58 matchs (51 pts). Le meilleur pointeur fut Brock Nelson, 36 buts et 75 pts, également en vue en playoffs (5 pts). On trouve aussi le capitaine Anders Lee et ses 50 pts. Et c’est à peu près tout…
Lamoriello a simplement sécurisé le troisième ligne Pierre Engvall, en qui il voit un certain potentiel. L’ancien Leaf a reçu un contrat de sept ans plutôt généreux, lui qui a marqué 9 pts en 18 matchs après son arrivée. Un pari, le GM adorant ses joueurs de devoir. La quatrième ligne Clutterbuck-Cizikas-Martin est par exemple toujours inchangée, en dépit des difficultés croissantes du trio au fil des saisons. Le vétéran Zach Parise (34 pts) n’a pas été retenu, et on espère un retour plus productif de Jean-Gabriel Pageau et Kyle Palmieri (40 et 34 pts).
Les Islanders alignent une défense correcte mais sans plus, bâtie autour des 49 pts de Noah Dobson et de la solidité de Ryan Pulock, Adam Pelech et Scott Mayfield. Sebastian Aho et Alexander Romanov complètent un top-6 sans grand relief, mais suffisamment solide devant de bons gardiens.
Globalement, l’équipe n’a pas de réservoir et a multiplié les ratages à la draft, ou plutôt a échoué à développer des jeunes prometteurs (Michael Dal Colle, Josh Ho-Sang, Oliver Wahsltrom, Anthony Beauvilliers, échangé en janvier; Kieffer Bellows). Le management à l’ancienne et les volte-face de coaching y sont-ils pour quelque chose ? Lane Lambert, à la première saison correcte en succédant à Barry Trotz, devra trouver la clé pour changer cela.
Les Islanders ont tout d’une équipe de milieu de tableau, pas assez mauvaise grâce à – ou à cause de – ses gardiens pour piocher haut à la draft, mais plus assez bonne pour aller loin. La qualification en playoffs peut arriver avec un tel duo de gardiens, mais au vu de la progression des rivaux de la Métropolitaine, et surtout de l’Atlantique, la place de wild-card s’annonce comme une farouche bataille. Il faudra ensuite prier pour que Sorokin vole une série… Mais cela n’ira sans doute pas loin.
Pittsburgh Penguins
Saison 2022-2023 : 31-31-9-11 = 91 pts. Buts pour 262, Buts contre 264
Pittsburgh n’avait plus raté les playoffs depuis 2006 et la saison rookie de Sidney Crosby. L’échec de 2022-2023 a fait l’effet d’un coup de tonnerre, d’autant que les Penguins étaient dans un fauteuil pour la dernière semaine : un match contre Chicago à domicile, un contre Colombus, deux équipes dans les profondeurs du classement. Et deux défaites, qui ont envoyé Florida à leur place pour la wild-card.
Du coup, la dernière série gagnée remonte à 2018 et depuis, les Penguins n’ont pas embrassé l’idée d’une reconstruction, après les titres 2016 et 2017. On s’accroche à l’idée que l’effectif peut encore soulever le trophée. Si le GM Ron Hextall, aux choix douteux, a été évincé, le nouvel arrivant, l’ex-Leaf Kyle Dubas, a choisi le “all-in” du poker en transigeant pour le trophée Norris, Erik Karlsson. Le Suédois de 33 ans, premier arrière à franchir les 100 pts en 30 ans, est un plus incroyable pour cette équipe, et forme un “big-4” avec Sidney Crosby (36 ans), Evgeni Malkin (37 ans) et Kris Letang (36 ans). Il faut espérer que ses vétérans en ont encore sous le capot, car les quatre n’ont pas été épargnés par les pépins physiques dans leur carrière !
Pittsburgh dépasse donc les 30 ans de moyenne d’âge, soit l’équipe la plus vieille de la ligue et de loin (30,2 ans, contre 28,8 à Dallas). On peut se demander si ce dernier essai n’est pas illusoire… Mais ces vétérans ne sont pas n’importe qui. Crosby a joué les 82 matchs, signant 93 pts dont 33 buts. Malkin n’a rien raté non plus, et signe 83 pts. Letang n’a joué que 61 matchs, offrant 41 pts. La question reste de savoir comment les entourer au mieux.
Le top-6 compte encore sur le sniper Jake Guentzel (36 buts, 73 pts), et Bryan Rust (20 buts, 46 pts). Jason Zucker, ex-Wild, apparait comme une bonne pioche (27 buts, 48 pts), tout comme l’ancien Duck Rickard Rakell (28 buts, 60 pts). Bref, de quoi former un top-6 de qualité. Le problème vient des 3e et 4e lignes plutôt indigentes, et Kyle Dubas n’a pas pu y faire grand chose, trop occupé à réparer les choix atroces de son prédécesseur Hextall. Réussir à faire disparaitre de la masse salariale Jeff Petry et Mikael Granlund relève ainsi du tour de force !
La défense, outre Karlsson, enregistre l’arrivée du solide Ryan Graves (New Jersey), un défenseur pur qui améliorera le top-4, compensant le départ de Brian Dumoulin (Seattle). Le jeune Marcus Pettersson complètera les duos avec Karlsson et Letang.
Un top-6 solide, un top-4 de qualité : l’expérience et le talent devraient suffire à se mêler à la lutte aux playoffs. Mais tout se jouera dans les cages. Tristan Jarry a été consolidé en titulaire, malgré ses 90,9% d’arrêts et seulement 47 matchs joués. Son backup Casey DeSmith a été prié d’aller voir ailleurs, et c’est Alex Nedeljkovic qui le remplace, après une expérience ratée à Detroit. Est-ce réellement suffisant ? Pittsburgh reste une équipe vieillissante, malgré tout assez lente, et face aux jeunes jambes de la conférence, cela peut poser problème. Le talent des stars de l’équipe dans la fleur de l’âge n’a déjà pas suffi à passer un tour en six ans : peut-on imaginer qu’une recette qui ne marche plus depuis si longtemps fonctionne enfin dans ces fins de carrière ?
Washington Capitals
Saison 2022-2023 : 27-37-8-10 = 80 pts. Buts pour 255, Buts contre 265
Le champion 2018 n’est plus que l’ombre de lui-même. Éliminés au premier tour tous les ans depuis, les Capitals ont même manqué les playoffs la saison dernière, et de manière assez large. L’équipe compte une des plus hautes moyennes d’âge de la ligue et on sent comme un crépuscule sur la franchise.
On a même le sentiment qu’un seul phénomène tient l’équipe : Alexander Ovechkin et sa quête du record de Wayne Gretzky. Avec 822 buts à l’orée de cette saison, les 894 s’approchent. Ce qui conduit à une tactique caricaturale, où toute l’équipe le cherche sur la glace… Le Russe de 38 ans a tout de même perdu de son impact à 5 contre 5, même si son slap reste redoutable en supériorité. S’accrocher à un joueur d’exception en fin de carrière – quitte à passer sous le tapis ses positions politiques douteuses au point de retirer l’accréditation de journalistes qui poseraient trop de questions gênantes -, voici donc le Washington des années 2020.
La mission du tout jeune coach Spencer Carbury, 34 ans, s’annonce donc complexe. L’ancien assistant coach de Toronto va vivre son premier poste et n’a pas vraiment eu de renouvellement sous les yeux. Certes, Washington a libéré à la deadline l’an dernier les contrats de Dmitri Orlov et Garnet Hathaway, mais l’été a été pauvre en changements. Le rugueux Tom Wilson a reçu un contrat de 7 ans après une saison de 33 matchs (22 pts), et le staff a resigné Martin Fehérváry en défense.
On a donc Joel Edmundson en rare arrivée (Montréal) pour la défense, un Max Pacioretty ravagé par les blessures ces dernières saisons et indisponible pour une durée indéterminée, et des joueurs décevants, comme Anthony Mantha, sont toujours là. Comment imaginer un retour vers le sommet d’un effectif qui a manqué les playoffs de 12 points ?
En attaque, Ovechkin reste productif, avec 42 buts et 75 pts. Son compère de toujours, Nicklas Bäckström, est revenu au jeu après des mois de blessure (39 matchs, 27 pts). Dylan Strome (65 pts) et Yevgeny Kuznetsov (55 pts) suivent, et on attendait bien plus que 12 buts pour ce dernier. Et c’est à peu près tout : TJ Oshie n’a mis que 35 pts, Sonny Milano 33. Pire, Marcus Johansson (28 pts) est parti, tout comme Conor Sheary (37 pts) et le défenseur Erik Gustafsson (38 pts), restreignant encore un peu plus le bottom-6.
Carbery devra donc espérer que la jeune garde parvienne à s’installer, comme l’ancien premier choix Connor McMichael, le petit gabarit de Matthew Phillips ou le Biélorusse Alexei Protas (58 matchs, 15 pts). Cela semble bien pauvre.
La défense peut-elle compenser ? John Carlson reste sur une saison de 40 matchs (29 pts), et il n’y a pas grand monde autour, car Edmundson s’est blessé à l’intersaison. L’ex-Leaf Rasmus Sandin a montré quelques belles promesses, et un mix de vétérans (Nick Jensen, Trevor van Riemsdyk) et de plus jeunes (Lucas Johansen, Hardy Häman Aktell) complète le banc. Peu reluisant.
Dans ces cas-là, il faudra compter sur les gardiens, et ce n’est guère meilleur. Darcy Kuemper a soulevé la coupe avec Colorado, avant de signer 90,9% d’arrêts et 2,87 buts encaissés en 57 matchs. Son relais, Charlie Lindgren, fut encore moins solide (89,9% et 3,05).
Les chances des Capitals d’être performants à long terme semblent réduites. On imagine bien l’équipe réussir quelques coups à l’occasion sur le talent individuel de son premier trio et de sa première paire, mais le banc semble faible dans une division aussi relevée. Et si l’équipe s’acharne à ne viser que le record d’Ovechkin, elle n’ira nulle part.
Philadelphia Flyers
Saison 2022-2023 : 26-38-5-13 = 75 pts. Buts pour 222, Buts contre 277
Les Flyers ont pour leur part assumé leur reconstruction, et ont choisi pour cela John Tortorella. Vainqueur de la coupe avec Tampa Bay il y a déjà 20 ans (2004), il a depuis roulé sa bosse un peu partout, pour des opérations commando aux résultats aussi fantasques que sa gestion de groupe : des “coups” à Columbus, comme sortir un Lightning record en 4 matchs en 2019, comme se mettre à dos des vestiaires entiers (Vancouver). On se demande bien à quelle sauce les joueurs de Philadelphie seront servis.
Le manager général Chuck Fletcher a été débarqué après une deadline catastrophique. Daniel Brière, ancienne gloire de l’équipe, le remplace et affiche déjà un meilleur bilan : il a choisi cet été de sacrifier de nombreux vétérans, tels Kevin Hayes (54 pts), Ivan Provorov (27 pts) et Tony DeAngelo (42 pts) et a misé sur Matvei Michkov à la draft. L’énigme russe grandira en KHL encore quelques temps. De quoi libérer de la masse salariale et obtenir en retour des choix de draft.
Donc, sur qui compter ? Tortorella, coach compétitif s’il en est, trouvera sans doute les clés de la motivation pour décrocher quelques succès, au moment où finir en bas de tableau pour piocher très haut à la draft serait sans doute plus adapté. Ou il se mettra le vestiaire à dos : c’est quitte ou double.
On suivra donc Travis Konecny (31 buts, 61 pts), meilleur attaquant de la saison. Puis, des jeunes joueurs en progression, tels Owen Tippett (27 buts, 49 pts), Morgan Frost (46 pts), Scott Laughton (43 pts), Joel Farabee (39 pts) et Noah Cates (38 pts). S’y ajoute le talentueux défenseur Cam York (20 pts) qui disputera sa deuxième saison.
Le vrai joker, c’est Sean Couturier, de retour après 22 mois d’absence suite à des opérations du dos et des migraines chroniques. À suivre aussi, l’ancien premier choix Bobby Brink, après une belle carrière NCAA. L’attaque ne manque pas d’atouts et semble même plus dense que certains rivaux de division.
La défense a donné les clés à Travis Sanheim, relativement solide en 2022-23 (81 matchs, 23 pts, -5). Il aura autour de lui Sean Walker en provenance de Los Angeles, le Russe Yegor Zamula, les anciens du Wild Louie Belpedio et Nick Seeler, l’ancien capitaine suédois U20 Emil Andrae, un rookie. Les Flyers ont encore dans l’effectif Rasmus Ristolainen, aux résultats atroces depuis quelques saisons : à voir si Tortorella lui fera confiance.
Le poste de gardien est loin d’être ridicule, avec un Carter Hart au potentiel certain (90,7% et 2.94 buts encaissés) et Samuel Ersson, 24 ans, 12 matchs à sa première saison. Philadelphie espère jouer les troubles fêtes et faire progresser sa jeune garde, en attendant de lancer ses très nombreux prospects. Le “sorcier” Tortorella suffira-t-il à atteindre le top-8 ?
Columbus Blue Jackets
Saison 2022-2023 : 25-48-10-9 = 59 pts. Buts pour 214, Buts contre 330
L’espoir était là à Columbus l’an dernier. Après des années à voir partir ses stars prématurément (Nash, Panarin, Dubois…), les Blue Jackets avaient enfin attiré un joueur d’élite : Johnny Gaudreau, auréolé d’une saison à plus de 100 pts à Calgary. Il a signé pour 7 ans, séduit aussi par les perspectives pour son épouse médecin dans un des hôpitaux les plus réputés du pays. À l’arrivée, 25 victoires et une saison ravagée par les blessures. Aucun joueur n’a disputé 82 matchs, et seuls Gaudreau (21 buts, 74 pts) et le défenseur Andrew Peeke (13 pts) ont atteint 80.
Cela a commencé par le défenseur vedette Zach Werenski, out après 13 matchs (8 pts), et s’est poursuivi joueur après joueur, jusqu’à Patrik Laine, sur le flanc au 55e match (52 pts). On passera le détail, mais mentionner que Columbus a utilisé 41 joueurs de champ et 6 gardiens suffira à prendre la mesure du problème !
Le manager général Jarmo Kekäläinen a pris des décisions fortes à l’intersaison afin de renforcer son équipe. Après avoir drafté le prodige NCAA Adam Fantilli en numéro 2, s’offrant un centre de franchise pour sa première ligne, il s’est efforcé de compléter son top-6 offensif, et le top-4 défensif. Arrivent Ivan Provorov, acquis des Flyers contre un premier choix, et Damon Severson. Après 647 matchs pour les Devils (33 pts l’an dernier), il a signé pour 7 ans. Le duo rejoint donc Werenski, de retour de blessure et Adam Boqvist (24 pts) sur le top-4, avec Peeke et l’ex-Hurricane Jake Bean en complément. On devrait aussi voir se mêler au roster David Jiricek, choisi au 6e rang en 2022 et auteur d’une bonne saison AHL.
La défense solidifiée, l’attaque espère mettre Gaudreau et Laine dans les meilleures conditions. Il faudra aussi un rebond de Jack Roslovic (seulement 11 buts et 44 pts) et du capitaine Boone Jenner (45 pts). Pléthore de joueurs apparus l’an dernier batailleront pour une place, du Suédois Emil Bemström (22 pts) aux Russes Yegor Chinakhov (13 pts), Dmitri Voronkov et Kirill Marchenko (25 pts), en passant par le vétéran Justin Danforth ou le talentueux jeune Canadien Kent Johnson (40 pts l’an dernier). Le Français Alexandre Texier est pour sa part de retour, après un an en Suisse pour raisons personnelles.
Dans les cages, Elvis Merzlikins a connu une saison atroce (30 matchs, 87,6% et 4,23 buts encaissés), pas aidé par l’effectif de bric-et-de-broc devant lui. Son rebond est pourtant essentiel, car son backup, Spencer Martin, 28 ans, n’a pas vraiment brillé non plus à Vancouver (28 matchs, 87,1% d’arrêts).
Bref, il y a de la compétition ! Et le staff aurait pu surfer sur cette dynamique positive, s’il ne s’était pas tiré tout seul une balle dans le pied. Pour mener cette troupe, Kekäläinen avait en effet choisi Mike Babcock, viré de Toronto pour son management toxique et banni de la NHL depuis. Réintégré avec l’accord de la ligue, il a été débarqué après quelques semaines pour avoir mis mal à l’aise des joueurs en projetant des photos personnelles depuis leurs téléphones, “pour faire connaissance”. Un fiasco évitable qui entache la gestion de l’équipe, déjà douteuse depuis les débuts de la franchise en 2000. En 23 ans, Columbus n’a passé un tour de playoffs qu’une fois… Pascal Vincent, l’assistant promu coach principal, aura bien du travail.