L’Avalanche du Colorado détient désormais la palme du plus mauvais bilan au classement depuis l’instauration du système de points actuel en 2005… L’équipe continue de patauger dans une reconstruction manquée, et ce malgré le talent potentiel de l’effectif. Retour sur cette saison de cauchemar.
Par Thibaud Chatel @batonsrompus et Nicolas Leborgne @Belizarius_
La saison débuta par un coup d’éclat en interne, quand Patrick Roy claqua la porte de l’équipe au mois d’août, laissant le DG Joe Sakic sans autre choix que de promouvoir Jared Bednar, alors entraîneur de l’équipe AHL, derrière le banc des Avs, à un mois du camp. La fin du feuilleton Roy aurait pourtant pu être une bonne nouvelle pour l’organisation. Si sa première année avait été couronnée de succès, avec une participation aux playoffs, celle-ci était surtout dû à une saison étincelante du gardien Varlamov. Le système de jeu derrière lui était en réalité bien pauvre, et sitôt le cerbère revenu sur terre la saison suivante, l’Avalanche de Roy devint l’une des pires équipes de la ligue. Le retour de Saint Patrick à Denver était ainsi voué à l’échec, l’homme ne réussissant manifestement pas à élever son niveau d’entraîneur à celui de la NHL. Son départ ne pouvait donc signifier qu’une amélioration de la situation… Après une pré-saison invaincue et seulement six buts encaissés, le retour à la réalité a fait mal. Bednar n’a au final guère fait mieux, même s’il n’a pas du tout été aidé par ses gardiens et le manque de réussite de ses tireurs. L’inverse complet de la première saison de Roy.
Au final, la pire saison de l’histoire du club, l’une des pires de la ligue. Joe Sakic souhaitait consolider ses jeunes talents à long terme et rajeunir le reste de l’effectif : ces 48 pts ont été “réussis” en frôlant le plafond salarial, 73 millions. Pas vraiment gagnant… et digne des Colorado Rockies de 1978-79, l’une des pires franchises de l’histoire.
Les torts de Bednar sont malgré tout bien apparents. L’Avalanche a terminé 26e attaque et 25e défense pour les tentatives de tirs, résultant en l’avant-dernière possession de la ligue, et la dernière place en buts encaissés, buts marqués, jeu de puissance et en infériorité. Le spectacle sur la glace a ainsi alterné de pauvre à désolant selon les soirs. La production des stars de l’équipe s’en est ressentie. Difficile de produire lorsque le plan de match ne vous procure pas de chances de qualité. Cela dit, les vedettes n’ont pas non plus sonné la révolte, très vite résignées et conscientes de la volonté de l’organisation de couler au classement pour mettre la main sur l’un des meilleurs espoirs au repêchage. Sans compter que Duchene ou Landeskog doivent vivre avec des rumeurs d’échange depuis près d’un an. Dernier élément incriminant, les tireurs se sont classés avant-derniers de la ligue pour la réussite aux tirs, et les gardiens bons derniers pour le taux d’arrêts. Stratégie dépassée, joueurs démotivés et malchanceux… Tout un programme.
Il semble bien loin le temps de Semyon Varlamov, sauveur de l’équipe et finaliste du trophée Vezina… Le niveau de jeu du cerbère russe ne finit plus de baisser et cette saison fut tout simplement une catastrophe, même s’il a connu de nombreux pépins physiques, notamment aux adducteurs et à la hanche. Taux d’arrêts parmi les pires de la ligue à 5 contre 5 et une douzaine de buts accordés en plus que prévu, de nouveau le pire total de la ligue, ses dirigeants ont eu tôt fait de laisser le champ libre à Calvin Pickard, qui joua au final deux fois plus de matchs, 49 contre 24 pour Varlamov. Pickard fit un peu mieux, mais dans des proportions encore proches de la catastrophe. Après deux saisons prometteuses dans un rôle de numéro deux, endosser le costume de titulaire d’une telle équipe ressembla vite à un chemin de croix pour le gardien de 25 ans. Aucun autre gardien dans la ligue n’a accordé plus de plus que prévu que Pickard, 19, soit près d’un but supplémentaire tous les deux matchs… Le Canadien est encore jeune et il est difficile de le juger au milieu d’une telle faillite collective, et il fut solide lors des championnats du monde avec l’équipe à la feuille d’érable. Voyons comment il se comportera l’an prochain.
Accordons un point à Bednar, la prévention des chances de marquer fut plutôt une réussite cette saison. Erik Johnson fut l’exception, mais lui seul est parvenu à donner un taux de possession positive à son équipe, ce qui n’est pas un mince exploit ici. Malheureusement, il a manqué douze semaines sur blessure et son absence a coïncidé avec l’explosion de l’équipe. Colorado alignait une fiche équilibrée en novembre avant une série de cinq matchs à la maison, et a coulé à ce moment-là.
Tyson Barrie ne fut pas non plus mauvais dans un rôle plus complet, et accompagné d’une participation offensive non négligeable (38 pts). Avec seulement 21 buts en provenance de la base arrière (seulement deux en supériorité), Colorado n’a pas reçu un grand support : seul Barrie a dépassé les 20 pts. Et l’on est pas prêt d’oublier la déroute 10-1 contre Montréal en novembre.
L’attaque semble davantage le problème majeur du système Bednar. Seul Andrighetto en fin de saison (11 pts en 19 matchs) et Mackinnon (53 pts) ont obtenu une efficacité supérieure à la moyenne de la ligue pour se créer des chances de marquer. Mackinnon a par ailleurs été avec Landeskog (33 pts) l’un des deux seuls moteurs de possession parmi la brigade offensive. Nieto, acquis de San José, fit des choses intéressantes à ce chapitre mais la production n’a pas suivi (11 pts). Rantanen devra travailler son jeu défensif car aucun autre attaquant de l’Avalanche n’a accordé plus de tentatives de tirs que lui à l’adversaire. Mais il reste l’un des deux seuls joueurs à avoir touché la barre des 20 buts cette saison… Enfin, Duchene, au milieu des rumeurs, rendit une bien pâle copie (23 buts, 41 pts) et le joueur doit avoir bien hâte de déménager. Au final, avec seulement six joueurs à 20 points, on compte énormément de déceptions, qu’il s’agisse de vétérans (Comeau, Iginla, Söderberg) que de plus jeunes (Colborne, Grigorenko). Söderberg, payé à prix d’or en provenance de Boston, cristallise les erreurs de casting de l’Avalanche (6 buts, 14 pts en 80 matchs pour 4,75 millions de dollars)… Colborne, lui, signait un triplé en ouverture, puis un seul autre but en 61 matchs.
En résumé : Au fond du trou
Il sera difficile de faire pire l’an prochain. Pourtant, avec Bednar de retour sur le banc, aucun échange majeur de conclu faute de partenaire, la recette sera essentiellement la même. Pas de quoi réjouir les fans, d’autant plus que l’Avalanche a finalement perdu la loterie du repêchage et a pioché au 4e rang. En revanche, le choix de Cale Makar, un défenseur très offensif pourrait se révéler un choix parfait pour une organisation déjà bien garnie à l’avant, sur le papier tout du moins – les débuts encourageants du premier choix 2016, Tyson Jost, peuvent peut-être lancer une dynamique. En espérant que ses dirigeants redressent enfin la barre pour exploiter le talent de l’effectif.