La demi-finale contre le Canada est un événement pour l’Allemagne. Avant l’ère de la NHL aux Jeux olympiques, de 1998 à 2014, la Nationalmannschaft avait frôlé la qualification pour les demi-finales à l’olympiade d’Albertville en 1992, écartée aux tirs au but par… le Canada, un match qui est resté dans les mémoires : l’image du palet mourant sur la ligne de but gardien canadien, freiné par le gardien Sean Burke, au grand désarroi du tireur Peter Draisaitl, avait hanté toute la population d’outre-Rhin. Ce vendredi, les Allemands ont l’occasion de prendre leur revanche.
L’Allemagne fait très proprement et simplement les choses : des passes propres qui sortent et montent parfaitement le palet. Une fois, la pression de René Bourque fait certes perdre le palet à Yannic Seidenberg au profit de Derek Roy, mais la feinte ce dernier n’arrive pas à déjouer Danny aus den Birken en un contre un. L’autre détail qui cloche est un surnombre, mais Noebels, Fauser, Kink et Hördler récupèrent et dégagent tour à tour le palet pour tuer avec aisance cette pénalité.
Une violente charge contre la bande de Schütz sur Noreau laisse encore l’Allemagne en infériorité, mais Vey est pris pour crosse haute. Une pénalité stupide met franchement le Canada dans l’embarras : Roy et Bourque font chacun des mouvements trop précoces à l’engagement, double infraction qui vaut deux minutes de prison pour retard de jeu dans les nouvelles règles. Les Allemands jouent à 4 puis à 5 contre 3, et Brooks Macek en profite d’un tir du poignet côté plaque
En deuxième période, René Bourque est contré dans la bande par Boyle après avoir passé la ligne bleue, Patrick Hager récupère le palet parti l’opposé et le sert sur un plateau à Mathias Plachta arrivé au second poteau. Après deux pertes de palet de Rob Klinkhammer sur des passes hasardeuses en zone neutre sur la même présence, Marcel Goc feinte le lancer et contourne Noreau étendu pour centrer sur Frank Mauer qui marque d’une facilité déconcertante avec la crosse entre les jambes ! Enthousiastes, ces Allemands.
Une équipe a pris confiance en prenant peu à peu le contrôle du match. L’autre s’est décomposée au fil des minutes, à l’image du visage de son coach Willie Desjardins. Mais Yannic Seidenberg prend une pénalité bête en donnant un coup de poing à Kozun (qui en rajoute en tombant à la renverse) dans une friction devant la cage. Ce jeu de puissance providentiel permet au Canada de revenir à 3-1, par un tir sur réception de Gilbert Brûlé dans le cercle gauche. Mais le Canada n’exploite pas un surnombre allemand et O’Dell accroche Noebels dans l’enclave. Les Allemands, en trois secondes d’avantage numérique, récupèrent leurs trois buts d’écart, Patrick Hager déviant un tir de la bleue de Plachta.
Privé de Brûlé ensuite, auteur d’une violente charge à la tête en zone neutre sur Wolf et expulsé, le Canada attendra la troisième période et le retour à cinq pour mettre les bouchées doubles en se ruant sur le but de Danny aus den Birken. Mat Robinson, lancé plein champ et du revers, et Derek Roy, d’un centre dévié contre son camp par le patin de Krupp (après une magnifique entrée en zone de Chris Lee qui signe un petit pont sur Goc), porteront le score à 3-4.
Le Canada obtient un avantage numérique pour une crosse qui traîne de Hördler, et s’apprête à en obtenir une autre pour une dureté d’Ehrhoff… quand Christian Thomas, sous le nez de l’arbitre qui vient de siffler la faute, donne un coup de crosse vengeur. Une pénalité de chaque côté, et une occasion qui s’envole par indiscipline. Durant cette dernière période, le Canada aura affiché 15 tirs à 1, mais l’Allemagne tiendra bon jusqu’au buzzer. Les mines des joueurs et supporters canadiens oscillent entre abattement et incrédulité.
Les Allemands se qualifient pour sa première finale aux Jeux olympiques, un événement ! Ils affronteront dimanche leur grand adversaire historique, la Russie, à l’occasion d’une finale improbable. On savait ce tournoi l’un des plus homogènes de l’histoire, en l’absence des joueurs de la NHL, l’Allemagne a parfaitement joué le coup, sans que cela constitue au final une énorme surprise. Triste sortie pour le Canada, double champion olympique en titre et donc privé de ses stars, qui devra se battre pour la médaille de bronze face à la Tchéquie.
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Commentaires d’après-match
Willie Desjardins (entraîneur du Canada) : « Tout le monde est déçu. Nous avions un objectif. Notre discipline a été très bonne tout au long du tournoi, mais cette fois nous avons pris trop de pénalités. Nous nous sommes ainsi sortis nous-mêmes de notre match au deuxième tiers. L’Allemagne a joué avec du physique et une bonne structure. »
Chris Kelly (attaquant du Canada) : « Parfois il faut reconnaître la performance de l’autre équipe, et les Allemands ont été la meilleure équipe pendant 40 minutes. »
Frank Mauer (attaquant de l’Allemagne) : « Au dernier tiers, nous avons un peu laissé le match s’échapper de nos mains. À la fin j’ai seulement espéré que les Canadiens ne marquent pas encore un but. Tout est si invraisemblable. Je suis juste content que nous ou vivre tout ça ensemble. Nous allons nous réveiller demain et nous demander ce qui s’est passé. »
Christian Ehrhoff (défenseur de l’Allemagne) : « Nous sommes en finale olympique et nous avons une médaille garantie. C’est simplement un jour exceptionnel pour le hockey allemand. Je suis immensément fier ! Tout le monde parle encore de 1976, de l’équipe qui a gagné la médaille. Dans les 50 prochaines années, tout le monde parlera de cette équipe. »
Patrick Hager (attaquant de l’Allemagne) : « Nous sommes en finale : rien qu’entendre cette phrase qu’on nous répète nous donne tous la chair de poule. C’est une histoire incroyable. Nous sommes fiers de ce que nous avons fait, et de notre manière de jouer au hockey. Personne ne tombe, personne n’abandonne. Nous jouons presque comme des machines, les engrenages s’emboîtent. Les autres équipes nous font plier, mais nous ne rompons pas. »
Marco Sturm (entraîneur de l’Allemagne) : « Je suis sans voix. Je suis si fier des gars. Ils ont travaillé si dur. Je ne savais pas à quoi m’attendre au juste aujourd’hui. Il y avait tellement de hype, tellement de pression. Nous n’avions jamais été dans une telle situation, mais les gars l’ont géré de façon grandiose. […] Les Russes sont meilleurs sur le papier. Mais pendant tout le tournoi, les autres étaient meilleurs sur le papier. Nous avons toujours trouvé un moyen de gagner. On y croit. »
Canada – Allemagne 3-4 (0-1, 1-3, 2-0)
Vendredi 23 février 2018 à 21h10 au Gangneung Hockey Centre. 4057 spectateurs.
Arbitrage de Jozef Kubus (SVK) et Timothy Mayer (USA) assistés de Fraser McIntyre (USA) et Aleksandr Otmakhov (RUS).
Pénalités : Canada 35′ (4′, 29′, 2′), Allemagne 16′ (6′, 8′, 1′).
Tirs : Canada 31 (5, 11, 15), Allemagne 15 (6, 8, 1).
Évolution du score :
0-1 à 14’43 : Macek assisté de Kahun (sup. num.)
0-2 à 23’21 : Plachta assisté de Hager
0-3 à 26’49 : Mauer assisté de Goc et Wolf
1-3 à 28’17 : Brûlé assisté de Lee et Noreau (sup. num.)
1-4 à 32’31 : Hager assisté de Plachta et Schutz (sup. num.)
2-4 à 42’42 : Robinson assisté de Thomas et Raymond
3-4 à 49’42 : Roy assisté de Lee et Noreau
Canada
Attaquants :
René Bourque (-1, 2′) – Derek Roy (A, -1) – Gilbert Brûlé (-1, 25′)
Mason Raymond (+1) – Chris Kelly (C, +1) – Christian Thomas (+1, 2′)
Wojtek Wolski – Linden Vey (2′) – Andrew Ebbett
Rob Klinkhammer (-1) – Eric O’Dell (-1, 2′) – Maxim Lapierre (-1)
Brandon Kozun
Défenseurs :
Chris Lee (A) – Mat Robinson
Chay Genoway (-1) – Maxim Noreau (-1)
Marc-André Gragnani – Cody Goloubef
Karl Stollery
Gardien :
Kevin Poulin [sorti de 57’38 à 57’51 puis de 58’24 à 60’00].
Remplaçant : Ben Scrivens. En réserve : Justin Peters (G), Stefan Elliott, Quinton Howden.
Allemagne
Attaquants :
Felix Schutz (2′) – Patrick Hager (A) – Brooks Macek (-1)
David Wolf (+1) – Marcel Goc (C) – Patrick Reimer (2′)
Yasin Ehliz – Dominik Kahun – Frank Mauer (+1)
Marcus Kink – Gerrit Fauser – Mathias Plachta (+1, 2′)
Marcel Noebels
Défenseurs :
Christian Ehrhoff (A, -1, 2′) – Daryl Boyle
Frank Hördler (2′) – Jonas Müller (+1)
Yannic Seidenberg (+2, 2′) – Moritz Müller
Björn Krupp
Gardien :
Danny aus den Birken
Remplaçant : Timo Pielmeier (G). En réserve : Dennis Endras (G), Sinan Akdag (commotion), Leonhard Pföderl.