Janne Puhakka, décédé dimanche dernier, était plus qu’un ancien joueur de hockey, il était un véritable symbole et un modèle de courage, lui qui n’a pas hésité à lever le tabou de l’homosexualité en réalisant son coming out au grand jour. Une voix, disparue dans des circonstances tragiques, qui en appelle d’autres.
Dès lundi, des bougies ont été placées devant la maison où résidait Janne Puhakka. Henttaa est un quartier tranquille d’Espoo, a priori sans histoire, très familial. Mais depuis dimanche règne le choc et la stupeur, pas seulement dans ce quartier mais dans toute la Finlande, après une terrible tragédie dont a été victime l’ancien hockeyeur.
Dimanche aux environs de 20 heures, des voisins ont appelé les secours. La police a alors découvert le corps sans vie de l’homme de 29 ans, victime d’un coup de feu. Rolf Nordmo, 66 ans et son compagnon depuis une dizaine d’années, était alors présent sur place. La police l’a aussitôt interpellé dans le calme, sans résistance. Détenteur d’un fusil de chasse et d’un permis de port d’arme délivré par la Norvège, Nordmo n’avait aucun casier judiciaire mais il a rapidement été soupçonné, il a finalement reconnu les faits. Selon les informations d’Iltalehti, le couple avait rompu depuis peu et Puhakka était venu au domicile pour entériner la séparation.
La perte d’un joueur symbole
Janne Puhakka avait arrêté le hockey depuis plusieurs années. Formé à Espoo dans sa ville natale, il a passé deux saisons de 2013 à 2015 à Chicoutimi, en LHJMQ. Il a ensuite disputé 40 matchs de Liiga avec les Espoo Blues avant que le club ne fasse faillite, et ne renaisse en Mestis sous le nom d’Espoo United. En 2017, il arrive finalement dans les Hautes-Alpes, à Gap, sous la direction de Luciano Basile. Ce sera finalement la dernière saison de sa carrière de hockeyeur.
Malgré plusieurs apparitions dans les rangs juniors de l’équipe nationale, disputant notamment le Mondial U18 en 2013, Puhakka n’avait que 23 ans quand il a décidé de raccrocher les patins.
Mais c’est en divulguant son homosexualité au grand jour qu’il fera la Une des médias finlandais : il deviendra le premier joueur de Liiga à faire son coming out . Cette annonce, il l’a faite en 2019 sur son compte Instagram mais il a également fait l’objet d’un article du quotidien Helsingin Sanomat. Son parcours a également été évoqué dans le livre Ulos Kopista écrit par le journaliste Risto Pakarinen, dans lequel il parlé de sa rencontre avec son compagnon de 37 ans son aîné, une relation qu’il a longuement caché, y compris à ses proches.
En parlant de son homosexualité, Puhakka a partagé sur un sujet encore tabou, il est devenu un véritable pionnier, et un modèle pour la communauté sportive. Sa disparition a ému tout le pays, dont l’ancienne Première ministre de la Finlande Sanna Marin.
Une voix s’éteint, d’autres prendront le relais
Le hockey ne déroge pas à la règle d’un univers sportif encore peu enclin à communiquer et partager sur l’homosexualité. Dans un post sur les réseaux sociaux le 19 juillet 2021, Luke Prokop est devenu le premier joueur NHL à faire son coming out. A l’époque, le géant défenseur (1m97), repêché par Nashville en 2020, avait reçu de nombreux signes d’admiration, de la part du public et de la communauté hockey. La star de Toronto Auston Matthews lui avait même rédigé un texte pour le féliciter.
Deux ans plus tard sur nhl.com, à la suite de cette annonce, Prokop affirmait « ne recevoir aucun commentaire négatif sur les réseaux, et sur la glace non plus. » Il a d’ailleurs l’appui de l’organisation des Nashville Predators dans un état, le Tennessee, conservateur. Les propriétaires des Predators ont toujours été soucieux de l’accessibilité du hockey et de son inclusion, et Prokop est souvent au centre d’initiatives pour mettre en lumière la communauté LGBTQ.
Le mois dernier, on apprenait le mariage de la joueuse et icône de Montréal Marie-Philip Poulin avec sa coéquipière Laura Stacey, une union qui a largement été évoquée dans les médias québécois. Si hélas la voix de Janne Puhakka s’est éteinte, de plus en plus sont prêtes à prendre le relais pour briser le silence, et montrer que chacun peut vivre sa vie comme il l’entend, le bonheur est pour tout le monde.