Après l’annulation du match pour la troisième place en raison d’un nouveau joueur testé positif à la Covid-19 hier soir dans les rangs de Brasov (l’équipe ayant déjà effectué le déplacement avec un groupe amputé de 8 joueurs titulaires, principalement pour cette même raison), la compétition s’achève sur cette très attendue finale et un enjeu simplissime : l’équipe qui remportera ce match se qualifie pour le troisième tour.
Le bilan comptable est le même entre les deux formations, mais les dynamiques ne le sont pas forcément. Les Italiens d’Asiago entrent sur la glace avec les objectifs atteints dans la douleur : ils ont dû s’employer vendredi pour battre les habituels adversaires de Jesenice (4-3), puis ont tremblé sur la fin de partie contre les Roumains de Brasov enfin résolus à jouer leur chance, Asiago inscrivant le dernier but en cage vide (4-2). Mais cette mobilisation de chaque minute peut s’avérer une force au moment de terminer le travail.
Côté amiénois, tout s’est jusqu’alors passé à merveille. L’équipe dirigée par Anthony Mortas a d’abord évité le piège du jeu rugueux tendu par Brasov (6-0), puis a provoqué sa propre réussite, aussi totale fût-elle, contre l’Acroni Jesenice au supplice défensif durant soixante minutes (9-1). Que les choses se passent très bien est une bonne chose, quand elles se passent « trop bien » cela n’est pas sans risque. Le groupe a évoqué dès la sortie du deuxième match le besoin impérieux de concentration pour éviter un relâchement qui serait forcément coupable dans un match couperet comme celui-ci.
L’engagement est remporté par les Amiénois qui se projettent de suite vers l’avant, avec Romand par deux fois. Mais les Italiens répliquent et sur une mise au jeu remportée, Salinitri s’avance et trouve la bonne position pour ouvrir le score, sur la première véritable opportunité (1-0, 03’28).
Les Gothiques sont menés pour la première fois du tournoi, et peuvent espérer réagir rapidement quand le défenseur canadien Ginnetti est envoyé au banc. Les locaux prennent du temps à se mettre en position et Pretnar est le seul à trouver une belle chance, repoussée par Vallini. Et tandis que Coulaud loupe un palet dans l’enclave au retour à cinq, Asiago est de nouveau sanctionné avec Forte. Matima s’essaie mais il bute sur le gardien dans un premier temps puis lance au-dessus de la barre, pour une supériorité non convertie. Cela met en confiance les Italiens qui ont une occasion incroyable au rebond à la suite d’un lancer de Gios, mais ils manquent l’immanquable et Forte retourne en prison : Vallini se montre alors impérial sur une tentative de Baazzi, puis Boivin signe la première pénalité amiénoise, en crochetant Giliati sur le repli. À 4 contre 4, Matima est à nouveau dangereux mais les pénalités respectives s’achèvent sans incidence à la marque.
À cinq minutes du retour aux vestiaires, une charge lourde de Giliati est sanctionnée et permet à Amiens de réinstaller le jeu de puissance. Mais le pressing haut des étoilés complique l’organisation française qui ne trouve pas la possibilité de porter le danger. Asiago est devant à l’issue de cette première période, face à des Gothiques qui connaissent des difficultés à installer leur powerplay, grande force depuis le début du tournoi.
Les Gothiques engagent le tiers médian avec des essais de la bleue, par Pretnar puis Gibb. L’élan est pourtant coupé du fait d’une pénalité appelée contre Romand. Et c’est à la minute de supériorité que Mantenuto réalise un petit numéro de dribbles pour se mettre en position. Il profite de la montée sur lui de Bault qui masque Buysse pour inscrire le deuxième but (2-0, 22’49). Le momentum est alors clairement italien et sur sa première offensive suivante, Daniel Mantenuto s’offre un doublé en glissant le puck sous le corps de Buysse (3-0, 23’41).
Il est urgent de trouver des solutions pour les Gothiques, et de stopper l’élan vénétien. Mais Boivin se met à la faute et complique les affaires françaises. Heureusement, le capitaine Magnabosco se fait également appeler pour 54 secondes de quatre contre quatre. À la prise de supériorité, le public pousse et les Gothiques débloquent enfin le compteur avec un superbe numéro en soliste de Baptiste Bruche, pour son premier but dans la compétition (3-1, 28’02). Ce but donne des ailes aux Amiénois et Simonsen s’envole, une faute de Gios est nécessaire pour le stopper. Ils font alors véritablement le siège de la cage de Vallini et sont récompensés d’un superbe mouvement collectif conclu par Baptiste Bruche, efficace ce soir dans tous les registres (3-2, 31’48).
Le match n’est alors plus le même dans une chaude ambiance, mais il faut alors se méfier de la révolte et s’attendre à une minute de souffrance quand Bault prend une pénalité et se voit rejoindre par Gibb, pour le premier 3 contre 5 à gérer pour Amiens. Buysse réalise un gros arrêt et Leclerc se sacrifie sur un lancer qui partait de la bleue. Et quelques secondes avant le retour à cinq, la situation tourne sur une pénalité contre Michele Marchetti, transformant rapidement cela en supériorité amiénoise, mais la défense rouge résiste. On passe même proche du quatrième but avec un palet perdu dangereusement, non conclu. À huit secondes du terme, nouvelle sanction italienne avec Michele Marchetti qui réalise une charge incorrecte et récolte une majeure.
L’avance en faveur des joueurs de Mattila est alors la même qu’après vingt minutes, mais le scénario a tourné et les Amiénois peuvent prétendre renverser la rencontre dans le dernier vingt.
L’occasion est belle pour les Français, avec cinq minutes de supériorité à faire, d’égaliser au retour des vestiaires, mais le gros patinage des joueurs d’Asiago empêche pendant de longues minutes l’installation dans la zone offensive. Quand ils y parviennent, Vallini se montre solide et son équipe blanchit la phase de jeu. Nouvelle chance avec une sanction contre Salinitri, mais le gardien italien est en feu et en jouant un palet qui avait été gelé, Lopachuk s’en va occuper le banc. Le moment est crucial pour les Amiénois, qu’un retard de deux buts à cet instant du match viendrait pratiquement condamner : Buysse réalise l’arrêt qu’il faut pour empêcher cela.
Nous sommes entrés dans les dix dernières minutes et les blancs peinent à retrouver l’allant du tiers médian, gênés par la trappe italienne. Le salut viendra peut-être d’une nouvelle supériorité, la charge de Parini étant illicite. Le danger se fait plus pressant, mais Asiago résiste courageusement et les minutes défilent. On pense l’égalisation à trois minutes du terme par Simonsen, mais la cage bouge dans cette phase de jeu confuse, et les arbitres n’hésitent pas une seconde. À une minute du terme, Buysse quitte le jeu pour créer le surnombre. Trente secondes plus tard, Mortas appelle le temps mort. Les dernières secondes sont étouffantes, Lopachuk prend un dernier lancer qu’il ne cadre pas, mettant fin aux espoirs amiénois d’accéder au troisième tour.
Fin de tournoi cruel pour les Gothiques, qui butent sur la dernière marche et échoue à aller chercher une qualification à leur portée. L’immense déception se lit sur les visages tandis que les joueurs transalpins exultent et célèbrent ce succès avec leurs supporters ayant fait le déplacement. Ils auront réalisé un match complet, efficaces dans les temps forts et courageux dans les instants compliqués, autour d’une défense solide et d’un gardien grand artisan de ce succès. Ils prendront la route du Danemark en novembre pour poursuivre l’aventure de la Coupe Continentale.
Désignés hommes du match : Daniel Mantenuto pour Asiago, Baptiste Bruche pour Amiens
(Illustrations : Pascal Énault)
Réactions d’après match :
Romain Bault (défenseur d’Amiens, capitaine) : « Ce soir nous n’avons pas su conclure. C’est le jeu. C’est sûr qu’il y a une grosse déception mais il faut vite tourner la page et nous focaliser sur la Ligue Magnus. Je pense que les Italiens ont travaillé sur la vidéo, des jeux ont fonctionné, d’autres non, c’était à nous de nous adapter et de faire les bons choix. Nous avons tout de même eu beaucoup de shoots et beaucoup de powerplays, mais nous n’avons pas eu la chance que nous avions eu sur les deux premiers matchs, on n’a pas été en mesure de concrétiser. On retire un bilan du tournoi avec des satisfactions, même si c’est difficile de se le dire ce soir car nous ne sommes jamais satisfaits de perdre, surtout à la maison. Mais nous avons vu de très belles choses, du caractère, des gars qui ont de l’orgueil et qui aiment le maillot, c’est ce qu’il faut retenir. »
Baptiste Bruche (attaquant d’Amiens, auteur d’un doublé) : « C’est une grosse déception. Nous avions bien débuté avec deux gros matchs, mais aujourd’hui nous n’avons pas fait le boulot, c’est de notre faute en partie et il va falloir se ressaisir dès mardi en championnat. On a une grosse semaine devant nous, la Coupe de France qui arrive aussi, et on doit se remobiliser pour affronter les gros matchs.
Nous sommes bien revenus dans le deuxième tiers, en fin de cette période il manquait peu de choses pour égaliser. Nous avons poussé ensuite mais ce n’est pas venu. Asiago avait bien analysé la chose, ils ont dû faire une bonne vidéo, relevant nos points forts pour s’adapter, bravo à eux. Nous avons essayé de nous adapter à notre tour en cours de match, mais nous n’avons pas su le faire à 100%. Nous ne revenions pas de trop loin, on pouvait le faire dans le troisième tiers mais nous n’y sommes pas parvenus, c’est la loi du sport.
Ils nous ont un peu gênés en powerplay, mais c’est nous qui n’avons pas su gérer. Sur les matchs précédents on marque six buts et quatre buts sur cinq supériorités, ce soir nous n’en mettons qu’un alors que nous en avons eu beaucoup, il va falloir retravailler cela car il y a sûrement des équipes de Magnus qui vont également regarder ces matchs et s’adapter.
C’est forcément vécu comme un échec, on souhaitait aller plus loin, à vrai dire aller le plus loin possible était notre objectif, voire la gagner. Donc s’arrêter au premier tour joué est une déception.
Pour le retour au championnat, on joue deux matchs sur trois à domicile, nous allons avoir besoin du public pour avoir un septième homme sur la glace. Mardi nous voudrons forcément gagner, ne pas rester sur ce sentiment d’échec et montrer que nous sommes capables de remonter la pente. Tout n’est pas à jeter, il y a eu beaucoup de bonnes choses sur les deux premiers matchs et même aujourd’hui, ce n’est pas parce que l’on perd que l’on a fait que des mauvaises choses. Il y a eu des erreurs, mais aussi beaucoup de positif. »
Anthony Mortas (entraîneur d’Amiens) : « Sur les deux premiers matchs, on a eu une réussite totale, presque grotesque, ce soir moins mais nous avons aussi déjoué, il faut féliciter les Italiens qui ont joué intelligemment. De notre côté nous avons joué dans le mauvais sens, paniquant rapidement alors qu’il n’y avait pas à le faire. Nous sommes revenus mais en étant un peu désorganisés, fou-fous et impatients.
C’était une finale, les Italiens avaient remporté deux matchs et n’étaient pas là par hasard, nous savions que ce serait très dur et nous avons vraiment mal commencé le match et tout s’est mal enchaîné pour nous. Quand nous sommes revenus, c’était un peu poussif et cela l’est resté jusqu’à la fin. Asiago a tout simplement été meilleur, il faut l’admettre, et cela prouve qu’on a du boulot. Nous avons fait deux très bons matchs et il faut capitaliser là-dessus, tout en nous disant qu’au moindre écart nous devenons une équipe ordinaire, alors que quand nous jouons très bien et nous sommes une belle machine. Il faut retenir le positif de cette coupe d’Europe, nous sommes éliminés et très déçus mais nous devons retenir les bons matchs et travailler à partir de cela.
Je ne pense pas que l’enchaînement des matchs a été préjudiciable, les Italiens ont eu la même série que nous donc ce n’est pas du tout une excuse. Ils ont mieux abordé le match, mieux joué que nous, marqué plus de buts. Tout simplement bravo à eux.
Les joueurs doivent vraiment comprendre que nous devons jouer en équipe et être solidaires. Il y a parfois des joueurs qui jouent un peu moins, d’autres un peu plus, à chaque match ça peut changer. Ce soir, j’ai essayé de changer la ligne de powerplay qui tournait moins bien que les autres jours pour provoquer quelque chose, cela n’a pas marché. Mais ce sont des changements qui peuvent avoir lieu à tout moment, la saison est longue et il faut que les joueurs soient prêts à toute éventualité.
Ce tournoi peut nous apporter de la confiance pour la suite, nous avons vu que face à de belles équipes étrangères nous pouvions hausser notre niveau de jeu. Il faut donc garder ce niveau-là et continuer sur cette dynamique en championnat. »
Asiago (ITA) – Amiens (FRA) 3-2 (1-0,2-2,0-0)
Dimanche 25 octobre 2021 à 18h au Coliseum d’Amiens. 1 600 spectateurs
Arbitres : Nicolas Crégut (FRA) et Tim Tzirtziganis (BEL) assistés de Jason Thorrignac (FRA) et Chris Van Grinsven (HOL).
Pénalités : Asiago 23’ (8’, 11’, 4’) ; Amiens 12’ (2’, 8’, 2’)
Tirs : Asiago 16 (3, 10, 3) ; Amiens 50 (16, 9, 25)
Évolution du score :
1-0 à 03’28 : Salinitri assisté de Magnabosco et Gios
2-0 à 22’49 : Mantenuto assisté de Giliati et Magnabosco (sup. num.)
3-0 à 23’41 : Mantenuto assisté de Ginetti
3-1 à 28’02 : Bruche assisté de Lopachuk et Pretnar (sup. num.)
3-2 à 31’48 : Bruche assisté de Simonsen et Pretnar (sup. num.)
Asiago
Attaquants :
Stefano Giliati (2’) – Daniel Mantenuto – Michele Marchetti (7’)
Anthony Salinitri (2’) – Steven Iacobellis – Marco Magnabosco (C, 2’)
Michele Stevan – Matteo Tessari (A) – Marek Vankus
Filippo Rigoni [#19] – Alessandro Tessari – Samuele Zampieri
Edoardo Lievore
Défenseurs :
Lorenzo Casetti – Cameron Ginnetti (2’)
Franscesco Forte (4’) – Gregorio Gios (2’)
Stefano Marchetti – Gabriele Parini (2’)
Filippo Rigoni [#89]
Gardien :
Gianluca Vallini
Remplaçant : Luca Stevan (G). Absent : Andrea Longhini (G, réserviste), Enrico Miglioranzi
Amiens
Attaquants :
Stanislav Lopachuk (2’) – Alexandre Boivin (4’) – Baptiste Bruche
Jérémie Romand (A, 2’) – Antonin Plagnat – Rudy Matima
Tomas Simonsen – Joey West (A) – Florian Sabatier
Spencer Naas – Elgin Pierce – Taavi Tiala
Défenseurs :
Romain Bault (C, 2’) – Klemen Pretnar
Skylar Pacheco – Aziz Baazzi
Dan Gibb (2’) – Yohan Coulaud
Nicolas Leclerc
Gardien :
Henri-Corentin Buysse
Remplaçant : Lucas Savoye (G).