À guichets fermés, toujours invaincu après 7 rencontres, Rouen reçoit ce coup-ci Grenoble, bodybuildé cette saison par la CHL. L’actuel leader, à la moyenne de points, de la ligue Magnus est aussi invaincu sur 60 minutes !
Les Dragons ont enfin trouvé leur sixième défenseur en la personne de Charlie Dodero. Arrivé il y a trois jours en Normandie, l’Américain n’est pas encore qualifié pour jouer ce soir. Leur gardien, Matija Pintaric, touché à l’épaule depuis un mois, est toujours absent. Tout comme Vincent Nesa et Jordan Hervé.
Les Brûleurs de Loups ont encore (deuxième fois en trois matches en incluant la coupe de France incluse) laissé Chad Nehring au repos. Mais ils sont routiniers, rodés aux permutations de leurs « étrangers » surnuméraires. Cependant, ils enregistrent le retour de leur défenseur n°6, Lucien Onno, qui a manqué les 7 premiers matches de championnat. Mais surtout, les dominants voient la réapparition en ligue Magnus de leur pépite offensive, Dylan Fabre, absent contre Chamonix.
Tout a bien débuté pour les hommes de Jyrki Aho. Grâce à la précision d’Aurélien Dair en échappée sous les jambières de Caubet (0-1 à 07’57), au sang-froid de Brent Aubin à droite, contrôlant un palet laissé libre, dans un filet ouvert (0-2 à 08’57) et à la vista de Sacha Treille, et de sa complicité avec Hardy, lors d’un revirement à quatre-contre deux (1-3 à 09’39).
Les coéquipiers de Joël Champagne ont mené deux fois de deux buts pendant au total un tout petit peu plus de 8 minutes… jusqu’à ce que les « Avengers » du président Jacques Reboh, ordinaires, encaissent, en moins de 24 minutes, sans rendre le moindre coup, un sévère 5-0, un show à la rouennaise éculé mais toujours aussi trippant !
Cet effondrement d’une équipe bâtie pour passer des tours et des tours européens, nous le devons, vu de Cularo, à des gagne-petit issus du modeste championnat national. Gagne-petit au sens vieilli vu de la ville aux cent clochers. Comme les rémouleurs d’autrefois savaient transformer les lames, les joueurs de Fabrice Lhenry sont revenus avec des intentions aiguisées au début du deuxième tiers. Les coéquipiers de Loïc Lampérier, qui tiraient pourtant de l’arrière de deux unités, ont alors refait leur retard parce que leurs attaques ont été plus incisives et que les visiteurs n’ont pas totalement beurré la tartine.
Las, trop détachés de leur tâche, voire infatués d’eux-mêmes, fatigués (?), les Isérois ont gâché leur plan de match. Ils ont troqué leurs bleus de travail pour des smokings trop grands. Stepanek a été fantaisiste dans un duel avec François Beauchemin lors d’un revirement obtenu après un efficace échec avant de Boivin sur Rouhiainen (2-3 à 26’22). Damien Fleury, indiscipliné sur Tessier, a offert sur un plateau un jeu de puissance aux Seino-Marins, transformé par Kelsey Tessier, justement, d’un tir frappé sur réception dans le cercle gauche (3-3 à 26’39).
Voulant démontrer qu’ils sont les patrons, les BDL ont gonflé leurs pectoraux et sont revenus forts au démarrage de l’ultime période. C’est peut-être là que le match a basculé. Les locaux, aguerris, ont été robustes pour résister, n’offrant aucune solution simple, en coupant les passes de leurs adversaires.
Le réalisme du RHE a ensuite payé. Inspiré après un travail de Boivin dans la bande, Florian Chakiachvili a donné les devants pour la première fois de la soirée aux noirs et jaunes dans le haut des filets (4-3 à 46’22). Sacha Guimond a déshabillé Damien Fleury parti en échappé. Le meilleur joueur de la ligue n’a pas même pu provoquer Tonin Caubet. Du grand art pour un Guimond qui n’a pas si souvent affiché une tel habileté défensive. Après cette présence, le capitaine de la France rentrera directement au vestiaire quelques secondes évacué sa terrible frustration (48’42).
Les bézots, Kaylian Leborgne et Tommy Perret, ont fait la nique au trio tirant tout un bus, Onno, Raymond et Champagne. Le premier a débordé l’international, puis adressé un tir-passe millimétré que le second a repris victorieusement dans un timing parfait et avec un belle coordination du geste, aux nez des vétérans canadiens et du champion du monde Stepanek (5-3 à 50’04). Vingt secondes plus tard, François Beauchemin a vidé le cendrier en trouvant une lucarne d’un violent tir des poignets après être rentré en zone à la faveur d’une belle ouverture de Chakiachvili (6-3 à 50’24).
Le fait de match suivant aurait pu permettre à une équipe authentique ou simplement sûre d’elle-même avec autant de talent empilé de surpasser les difficultés qu’elle subissait. En effet, Joris Bedin, l’homme qui, tenace contre le sort, avait sonné la première conjuration normande de la soirée en défouraillant trois fois sur le rebond d’un tir de Chakiachvili (1-2 à 09’39), a été exclu de la rencontre pour avoir heurté Stepanek (51’32). Pendant ses cinq minutes de supériorité, Grenoble n’a trouvé les filets qu’à une seule reprise. En mettant le palet à la cage, en déséquilibre dans le trafic, un Rouennais a dévié malencontreusement le palet dans ses propres cages (6-4 à 52’37).
Au désarroi de Joël Champagne, Jyrki Aho, manquant de confiance dans ses gros canons, ou bien présomptueux, ou bien encore simplement démuni de lucidité sur le coup, a remplacé très tôt son gardien par un attaquant supplémentaire alors même que son équipe jouait toujours en supériorité ! C’est là que Sacha Guimond est ressorti de sa boîte. L’atypique défenseur avait préparé son coup en se mettant derrière Christophe Boivin disputant dans son cercle gauche la mise en jeu perdue par Fleury. De la ligne des buts, l’arrière de 1,90 m envoie directement la rondelle dans le filet désert des champions (7-4 à 56’15).
Durant cette défaite de la capitale des Alpes, Jakub Stepanek a réalisé 28 arrêts et même s’il n’a obtenu qu’un faible 82,4% et a voulu jouer au plus malin sur le premier filet de Beauchemin, il a minimisé l’addition. En effet, sauvé par un montant (3’23), après avoir été abandonné par sa défensive sur le premier but rouennais, le Tchèque de 36 ans a dérouté Vigners (16’12). Dans le long néant défensif grenoblois, il s’est opposé encore au Letton (32’40 & 49’08) et à Boivin (35’45), ainsi que devant l’ailier québécois quand tout était décidé (56’26).
Son confrère de bouclier et de mitaine, Tonin Caubet, a eu du « Pinta » dans sa panoplie ce soir. Lors des abordages dauphinois, le Bayonnais de 20 ans a réalisé plusieurs sauvetages dignes du Slovène. Il a limité la casse dans le premier tiers lorsque ses coéquipiers n’étaient pas bien dans le rythme. Sacha Treille en power-play (2’01), Dair et Fabre dans le même mouvement (13’34) et Poukkula plus excentré à droite (15’34) ont été priés de circuler par le substitut.
Si l’offensive de Grenoble a connu un abime, c’est aussi parce que Tonin Caubet a aidé ses camarades d’unités spéciales. Il a sorti la botte pour dire non au duo Deschamps-Poukkula se présentant à deux contre zéro en infériorité (30’05). Il a tenu muet l’artillerie des invités à des moments clé. Notamment en fin de période du milieu, en s’opposant des épaules lors du powerplay adverse joué au poteau dans un petit périmètre. Ainsi ont été déjoués Treille (37’48) et Dair (39’02). Le jeune gardien, à un de moins, n’a rien cédé non plus à Champagne (38’26), Fleury (39’26) et, à deux de moins, encore à Treille (39’38). Autre moment-clé. Le back-up n’a pas flanché devant Dair qui se présentait pour égaliser à quatre partout (47’29). De même, lors de la pénalité majeure de Joris Bedin, Tonin Caubet a frustré une chance à deux coups de Champagne (51’49).
Les Dragons l’ont emporté aussi parce qu’ils se sont plus sacrifiés sur les tirs adverses que l’inverse, question de courage et de placements. Nous avons pu remarquer Elorinne (6’36 & 44’24) et Tessier (42’16) dans cette bravoure. Le RHE a joué à cinq défenseurs pendant les quarante dernières minutes car Enzo Cantagallo n’est pas réapparu sur la glace après la première pause.
Avant d’aller sous la douche, Julien Munoz a essayé d’évacuer sa frustration dans une bagarre qu’il a instiguée sur Beauchemin. La recrue canadienne lui a finalement fait la misère après avoir tenté de s’en maintenir aux provocations. Voilà ce qui a mis fin à une partie sans sobriété exagérée, ni vindicative excessive, qui ne tire pas de plan sur la comète mais annonce de bons futurs autres débats. Une rencontre à suspense, spectaculaire, disputée dans une bonne ambiance pour le plus grand ravissement d’une foule acquise aux Dragons.
Commentaires d’après match (Dans Paris-Normandie)
Christophe Boivin (attaquant du RHE) : « C’est le match le plus excitant que j’ai eu à jouer depuis que je suis ici. La patinoire était remplie. L’ambiance incroyable. Et, en plus, c’est le match le plus complet qu’on ait livré cette saison. On a montré qu’on peut rivaliser avec cette équipe de Grenoble et même la battre. Ça va être une belle bataille pendant toute la saison avec cette équipe. Ce qui a fait la différence, ce soir, c’est le travail et le désir de gagner. On était les plus acharnés sur la rondelle. On a remporté les batailles. Et, offensivement, on a été opportuniste. On a aussi fait preuve de caractère pour revenir de 1-3 et, ensuite, en fin de match lors de cette infériorité de 5 minutes. On n’aime pas vivre de genre de situation à ce moment-là du match mais on a, je trouve, bien répondu. »
Rouen – Grenoble 7-4 (1-3, 2-0, 4-1)
Mardi 18 octobre 2022 à 20h00 à la patinoire Nathalie Pechalat.
Arbitres : Pierre Dehaen et Geoffrey Barcelo assistés de Cyril Debuche et Jason Thorrignac.
Pénalités : Rouen 42’ (4′, 6’, 6+2×5+20’) ; Grenoble 35′ (0′, 4’, 6+5+20’)
Tirs : Rouen 34 (11, 14, 11) ; Grenoble 43 (15, 16, 12)
Supériorités : Rouen 1/5, Grenoble 1/7
Évolution du score :
0-1 à 07’57 : A. Dair assisté de Jalasvaara et Rouhiainen
0-2 à 08’57 : Aubin assisté de Onno et Treille
1-2 à 09’39 : Bedin assisté de Chakiachvili et Maïa
1-3 à 18’55 : Hardy assisté de Treille et Lamarche
2-3 à 26’22 : Beauchemin assisté de Boivin
3-3 à 26’39 : Tessier assisté de Roman et Guimond (sup.num.)
4-3 à 46’22 : Chakiachvili assité de Boivin et Mallet
5-3 à 50’04 : Perret assisté de Leborgne et Tomasino
6-3 à 50’24 : Beauchemin assisté de Chakiachvili et Yeo
6-4 à 52’37 : Champagne assisté de Hardy et Treille (sup. num.)
7-4 à 56’15 : Guimond assisté de Boivin (inf. num. & cage vide)
Rouen
Attaquants :
Christophe Boivin – François Beauchemin – Alexandre Mallet
Loïc Lampérier (C) – Kelsey Tessier (A) – Rolands Vigners
Joris Bedin – Ondrej Roman – Bastien Maïa
Quentin Tomasino – Kaylian Leborgne – Tommy Perret
Arrières :
Florian Chakiachvili (A) – Dylan Yeo
Sacha Guimond – Enzo Cantagallo (sorti à 20’00)
Ulysse Tournier – Aleksi Elorinne
Gardien :
Tonin Caubet (39 arrêts, 90,7%)
Remplaçant: Mathis Thirion (G). Absents : Matija Pintaric (épaule gauche), Vincent Nesa (genou), Charlie Dodero (non qualifié), Jordan Hervé et Yohann Alzon (choix).
Grenoble
Attaquants :
Sacha Treille – Joël Champagne (C) – Brent Aubin
Markus Poukkula – Nicolas Deschamps (A) – Damien Fleury (A)
Dylan Fabre – Adel Koudri – Aurélien Dair
Flavien Dair – Matias Bachelet – Julien Munoz
Arrières :
Kyle Hardy – Maxim Lamarche
Janne Jalasvaara – Jere Rouhiainen
Bobby Raymond – Lucien Onno
Gardien :
Jakub Stepanek (28 arrêts, 82,4%) sorti de 54’00 à 55’10 et de 55’20 à 56’15
Remplaçant: Raphaël Garnier (G). Absents : Chad Nehring (surnuméraire ?) et Pierre Crinon (blessé)