Les champions de France n’ont pas réussi leur pari de vaincre les Rouennais sur leur glace. En guise de consolation, les Grenoblois se réjouiront d’avoir été portés ce soir par un Brent Aubin de gala et comme hier par un Dylan Fabre au diapason, deux individualités hors normes en ce week-end pascal et qui leur permettent de toujours croire en leur supériorité. Seulement, tout le talent des Isérois n’a pas suffi pour venir à bout de Dragons au goût de revanche dans la bouche après leurs sorties de route aux matches n°1 et n°2, avec un supplément d’âme recouvré dès hier et décuplé par les foules bruyantes venues les soutenir pour les deux matches sur l’île Lacroix.
Dans ce match n°3 d’abord interrompu, puis annulé à rejouer entièrement le lendemain du match n°4 à cause de trous dans la glace rouennaise, les visiteurs seront récompensés de leur début de match par une supériorité et l’ouverture du score de Brent Aubin d’un tir frappé en haut du cercle droit (1-0 à 2’28). Pas de quoi froisser les troupes de Fabrice Lhenry qui répondaient du tac au tac d’un tir balayé dans le cercle droit par Christophe Boivin dans un jeu installé en avantage d’un homme avec Mallet en écran devant le gardien (1-1 à 4’58).
Les Brûleurs de Loups ont produit un rythme et volume de jeu intense dans le but de créer des intervalles, des revirements ou des imprécisions adverses, exploitées par Dylan Fabre, intenable dans le cercle de gauche, butant sur Pintaric (6’04). Avec la pénalité de Florian Chakiachvili (7’27), tout allait, dès lors, se compliquer pour les locaux fragiles en infériorité dans la série. Sacha Treille de près à droite était dangereux à cinq contre quatre (7’38). Aleksi Elorinne jouait au pompier lors d’un arrêt incomplet de Pintaric sur un tir d’Aurélien Dair (8’02). Damien Fleury en bonne position ne trouvait pas la solution à Pintaric (9’24).
Les coéquipiers de Loïc Lampérier jouaient désormais à cinq mais ce n’était pas plus facile pour eux. Jere Rouhiainen dans le slot tâtait le cuir du gardien slovène (10’32). Parfois, les locataires de Péchalat parvenaient à suivre le rythme imposé par leurs adversaires. Servi en retrait par Rolands Vigners, Guimond frappait fort, trop croisé sur la droite (11’02). Un mauvais contrôle de rondelle, normand, provoquait un revirement en faveur des visiteurs. Brent Aubin, devant la cage, déviait adroitement un centre de Deschamps (1-2 à 11’44). Les Grenoblois prenaient ainsi logiquement les devants. Sur l’action d’après, Adel Koudri envoyait Fabre déborder sur la gauche. L’ailier remportait un duel face à Pintaric en logeant le palet au-dessus du bouclier grâce à des poignets, un cran, une maîtrise et une vitesse assez incroyables (1-3 à 13’01). Rouen s’est perdu en voulant rivaliser de vitesse avec les avions grenoblois trop rapides pour eux. Fabrice Lhenry a pris son temps mort pour recadrer son équipe. Ce coaching se révèlera judicieux.
En effet, les joueurs des bords de Seine vont retrouver leur identité de jeu et ne plus tenter de rivaliser avec Grenoble sur leur terrain. Pendant que Lucien Onno file au banc sans casque, Yeo est frustré par la mitaine de Stepanek (13’56). Rageux, les Rouennais s’imposent désormais lors les duels dans la bande. Ce qui leur permet d’attaquer la cage ou de sortir le palet vers les arrières placés à la ligne bleue. Maxim Lamarche est obligé de jouer les pompiers sur un demi-arrêt de Stepanek. Sacha Guimond peut trouver Lampérier pour une déviation acrobatique (2-3 à 15’30). Le but acquis avec énorme caractère de la ligne du capitaine rouennais a embrasé un public déjà chauffé à blanc.
Un peu submergés par l’acharnement des Dragons, les partenaires de Joël Champagne rechutent dans les travers déjà aperçus hier. Une crosse haute de Fabre, mal maîtrisée à la fin d’un tir, et un cinglage de Lamarche donnent 1’05 aux Dragons pour égaliser. Florian Chakiachvili frappe un lancer de la pointe entre les flancs de Champagne, Raymond et Stepanek, que Lampérier a su masquer (3-3 à 17’49). Déjà survoltée, Péchalat explose !
En moins de cinq minutes, le RHE, juste avant la première pause, parle de nouveau d’égal à égal avec le champion.
Mais au retour des vestiaires, Brent Aubin pousse une rondelle libre derrière le dos de Pintaric pour que Grenoble reprenne l’avantage (3-4 à 21’48). Peu importe pour ces Dragons-là car ils savent faire. Un Dylan peut en cacher un autre. Dans un tout autre style que le prodige d’en face, Dylan Yeo, surpris sur l’action du troisième but d’Aubin, va tout faire, tout seul. Après une charge en échec-avant dans la bande, l’arrière interceptait le puck et s’en allait du revers égaliser (4-4 à 22’20). C’est la sixième fois en 83 minutes que les Seinomarins recollent au score face au leader de la ligue Magnus qui, dans le même temps, ne parvient pas à préserver ses devants !
Soutenus comme rarement, les hommes de Fabrice Lhenry allaient prendre l’avantage après un palet contré par un Charlie Dodero dévoué sur une tentative de Deschamps (24’18). Alexandre Mallet, privé d’un but hier presque au même moment de la partie, tient debout malgré son opposant, et peut compléter un lancer d’Elorinne, en poussant le palet traînant derrière Stepanek, à plat ventre, abandonné par sa défensive (5-4 à 24’42).
À la mi-match, la situation n’est pourtant pas désespérée pour les BDL mais Jyrki Aho décide de retirer son gardien numéro un de la glace. Raphael Garnier se place devant la cage. Charlie Dodero n’était pas clairvoyant lorsqu’il perdait son casque. L’arrière était envoyé en prison au grand dam de Fabrice Lhenry. Aurélien Dair (30’21) et Treille sont dangereux (30’47). Damien Fleury perd le contrôle de la rondelle en zone neutre. L’erreur du vétéran permet à Joris Bedin de transmettre le caoutchouc à Tessier parti en échappée feinter le portier suppléant (6-4 à 31’01). Boissière est en liesse !
Lors de la fin du tiers médian, Grenoble aura le plus grand nombre de chances. Mais les gros canons isérois se heurtent à Matija Pintaric. Damien Fleury n’efface pas sa bourde à cause des brodequins du gardien (32’44). Sacha Treille a du punch mais bute aussi sur les jambières de Pintaric (33’55). Thimothé Quattrone s’ouvre un chemin mais il est dérouté par le goalie (34’38). Nicolas Deschamps, lui, est moins précis dans sa tentative de déviation (38’09). Toutefois, Rouen reste dangereux par Rolands Vigners (36’07) et Boivin (39’57).
La dernière période, c’est un peu une attaque défense d’autant plus que le RHE est maladroit et offre un nouveau powerplay aux Grenoblois. Seulement le PK des Dragons n’est plus aussi désarmé que les soirs précédents malgré un essai de Nicolas Deschamps (42’29). Avec Matija Pintaric, le carré normand s’en sort. C’est à cinq contre cinq qu’une passe mal dosée pour préparer une sortie de zone concède un superbe jeu à trois et permet à Brent Aubin de réaliser un quadruplé détonnant (6-5 à 45’38).
Quelques sueurs froides se feront encore sentir dans les gradins dont les encouragements ne faibliront pas, au contraire, lors de deux nouvelles pénalités rouennaises, encore bien négociées par les unités spéciales lancées sur la glace par Fabrice Lhenry. Elles ont définitivement pris la mesure, presque le dessus sur des attaques à cinq d’abord précipitées et ensuite éreintées des hommes en blanc. Matija Pintaric a définitivement fermé la porte à Kyle Hardy (52’59 & 57’11) et compagnie (Raymond à 56’48).
Jyrki Aho va jouer ces deux dernières cartes. Remplacer son gardien par un attaquant (57’12), puis prendre son temps mort (58’49). En vain !
Rouen a d’abord su renverser un champion qui semble avoir sur-joué un peu au-delà de ses capacités. Les Dragons ont ensuite réussi ce que les BDL n’ont pas su faire ces deux derniers jours, incapables de conserver (à six reprises) un avantage brillamment acquis (au moins pour cinq d’entre eux) dès qu’ils n’imposent plus un rythme endiablé face à la rage adverse. La fin de match des Dragons fut loin d’être parfaite, toutefois sans dommage grâce à un peu plus de fraîcheur. Le RHE peut afficher un sourire de satisfaction après s’être remis sur la ligne de départ de cette finale où tout reste à faire. Le plus dur sans doute.
Commentaires d’après-match (dans le Dauphiné Libéré et Paris Normandie) :
Fabrice Lhenry (entraîneur de Rouen) : « La qualité du match est particulière quand même… Les joueurs sont sous pression depuis trois jours, la lucidité n’a pas été là. On va retenir qu’on a gagné. On est encore là, on a bien envie d’aller gagner à Grenoble. On aimerait bien être la première équipe à les battre à Polesud. On a très mal commencé, je trouve que les 10 dernières minutes, c’était du hourra hockey, j’étais très mécontent de la fin du deuxième tiers. Les joueurs se sont vraiment sacrifiés pour égaliser dans la série. […] J’ai demandé beaucoup à certains joueurs sur ces deux matches mais il fallait vraiment qu’on les gagne. Physiquement, c’est certain que, pour les gars, c’est dur, qu’il faut récupérer de tous les efforts faits, mais, mentalement, gagner nous a fait du bien. On sait en plus que, quoi qu’il arrive, la semaine prochaine, on pourra se reposer. En attendant, il faut serrer les dents et se dire que jouer avec des blessures, ça fait aussi partie de la vie d’un hockeyeur en play-offs. »
Damien Fleury (attaquant de Grenoble) : « C’est toujours frustrant. On savait que ça allait être très dur ici, tout est à recommencer maintenant. À 3-1, je pense honnêtement qu’on a arrêté de jouer. On pensait peut-être que la victoire était déjà acquise et malheureusement, Rouen est revenu fort… On a fait un peu trop d’erreurs ce soir. Quand on est moins pénalisés, on est dans le match. À 5 contre 5, on est bon. À nous d’apprendre de nos erreurs. »
Sacha Treille (attaquant de Grenoble) : « On savait que ça allait être différent et difficile dans cette patinoire bien remplie. Je pense qu’on a fait de très bonnes choses mais on doit aussi en corriger certaines. C’est une série qui pouvait durer… Ça s’annonce comme ça. On doit apprendre peut-être à gérer ces moments de match où on mène au score, il y a plein de détails à travailler d’ici mercredi. C’est reparti, la série est totalement relancée. Je peux vous dire qu’il y avait de l’intensité, des coups… C’est ce qu’on appelle des matches de play-offs. On va bosser, limiter nos erreurs sur 60 minutes… On veut prendre le prochain match, c’est important. On doit recharger les batteries. C’est un match-clé mercredi, on a hâte d’être sur la glace. »
Rouen – Grenoble 6-5 (3-3, 3-1, 0-1)
Lundi 10 avril 2023 à 16h15 à la patinoire Nathalie Pechalat du centre sportif Guy Boissière. 3279 spectateurs.
Arbitres : Damien Bliek et Pierre Dehaen assistés de Cyril Debuche et Clément Goncalves.
Pénalités : Rouen 14’ (4′, 4’, 6’) ; Grenoble 8′ (6′, 2’, 0’)
Tirs : Rouen 25 (13, 9, 3) ; Grenoble 36 (11, 15, 10)
Supériorités : Rouen 2/4, Grenoble 1/7
Évolution du score :
0-1 à 02’28 : Aubin assisté de Rouhiainen (sup. num.)
1-1 à 04’58 : Boivin assisté de Guimond et Bedin (sup. num.)
1-2 à 11’44 : Aubin assisté de Deschamps et Fleury
1-3 à 13’01 : Fabre assisté de Koudri et Munoz
2-3 à 15’30 : Lampérier assisté de Guimond et Vigners
3-3 à 17’49 : Chakiachvili assisté de Tessier et Lucenius (double sup. num.)
3-4 à 21’48 : Aubin assisté de Fleury
4-4 à 22’20 : Yeo
5-4 à 24’42 : Mallet assisté de Chakiachvili et Elorinne
6-4 à 31’01 : Tessier assisté de Bedin (inf. num.)
6-5 à 45’38 : Aubin assisté de Fleury et Deschamps
Rouen
Attaquants :
Loïc Lampérier (C) – Kelsey Tessier (A) – Rolands Vigners
Christophe Boivin – Niclas Lucenius – Alexandre Mallet
Joris Bedin – Vincent Nesa – Quentin Tomasino
Bastien Maïa – Kaylian Leborgne – Tommy Perret
Arrières :
Florian Chakiachvili (A) – Aleksi Elorinne
Sacha Guimond – Charlie Dodero
Dylan Yeo – Enzo Cantagallo
Gardien :
Matija Pintaric (31 arrêts)
Remplaçant : Tonin Caubet (G). Absents : François Beauchemin et Valentin Claireaux (blessés).
Grenoble
Attaquants :
Sacha Treille – Joël Champagne (C) – Aurélien Dair
Brent Aubin – Nicolas Deschamps – Damien Fleury (A)
Dylan Fabre – Adel Koudri – Julien Munoz
Flavian Dair – Quinton Howden – Timothé Quattrone
Arrières :
Kyle Hardy – Maxim Lamarche
Janne Jalasvaara (A) – Jere Rouhiainen
Bobby Raymond – Lucien Onno
Gardien :
Jakub Stepanek (7 arrêts) puis Raphaël Garnier à 24’42 (12 arrêts) sorti de 57’12 à 60’00.
Remplaçant : Alexandre Pascal. Absents : Markus Poukkula (blessé) et Pierre Crinon (jeune papa).