Le Mondial féminin bat son plein à Utica, la phase préliminaire est désormais terminée. L’occasion de faire le point avant les quarts de finale prévus ce jeudi.
Les dix meilleures nations du hockey féminin sont actuellement en lice à Utica, dans l’État de New York. L’édition 2024 du Mondial élite est un peu particulière puisqu’il s’agit de la première sous l’ère PWHL. La grande ligue pro féminine qui a débuté en janvier a marqué une avancée majeure pour la discipline en proposant un niveau de jeu inédit, elle a également recueilli l’adhésion des fans et des médias dans une proportion jamais vue. Plusieurs records d’affluence ont été battus cette saison, et Montréal aura le privilège du record absolu à la fin du mois en remplissant probablement le Centre Bell. La PWHL a observé un break de trois semaines afin de permettre à ses joueuses de rejoindre leur équipe nationale et de jouer ce Mondial à Utica.
Comme d’habitude, la formule ne change pas avec deux groupes de niveau, les cinq meilleures dans le groupe A, les autres dans le groupe B. Les trois premières du groupe B joueront les quarts de finale, les deux dernières seront reléguées en Division 1A. La formule bancale est donc toujours de mise car rappelons que les cinq équipes du groupe A ne sont pas inquiétées par la relégation, et leurs confrontations ont plus des allures de tour de chauffe à défaut de véritable enjeu. L’IIHF devra se pencher sur un nouveau format pour renforcer l’intérêt et permettre la progression de manière équitable.
Les jeunes Américaines au sommet
Le Canada et les États-Unis, qui se partagent les titres mondiaux et olympiques, n’ont pas vacillé durant ce tour préliminaire en faisant le plein de points avant leur confrontation tant attendue. La Tchéquie, la Suisse et la Finlande n’ont rien pu faire.
Les deux rivaux nord-américains s’affrontent régulièrement via la Rivalry Series, la série de la rivalité qui a lieu chaque année en cours de saison. Et le scénario 2024 a été identique à celui de l’année dernière : les USA ont mené la série 3 manches à 0, avant que le Canada ne réalise une remontée fantastique pour finalement l’emporter 4 victoires à 3. Et comme en 2023, le match décisif a tourné à l’humiliation pour les Américaines, une victoire 6-1 des Canadiennes à St. Paul un an après le 5-0 à Laval !
Avec 15 buts marqués à Utica, les Américaines entendaient bien rectifier le tir. Les anciennes Kendall Coyne Schofield (6 points), Alex Carpenter et Hilary Knight (5 points) étaient parmi les meilleures marqueuses tandis que la nouvelle génération a vu Haley Winn et Laila Edwards inscrire leurs premiers buts. Avec ses 2 buts contre la Tchéquie, la jeune Edwards (20 ans) est devenue la première joueuse noire de l’histoire à marquer pour les États-Unis. En revanche, le Canada n’avait qu’une seule joueuse dans le top 10 des marqueuses avant ce duel au sommet, Kristin O’Neill.
La victoire du groupe A se jouait donc entre la jeunesse américaine (24 ans de moyenne d’âge) et l’expérience canadienne (27 ans). Et lundi soir, la bataille a encore été très intense avec de nombreuses occasions de chaque côté, Aerin Frankel et Ann-Renée Desbiens n’ont rien lâché et ont excellé devant leur but. La gardienne de Montréal a d’ailleurs réalisé un arrêt sublime à la mi-match devant une Hannah Bilka sidérée. 0-0 après 60 minutes malgré la puissance de feu en action, le match s’est finalement joué en prolongation. Sur un contre à 3 contre 1, Caroline Harvey a servi Kirsten Simms pour donner la victoire aux États-Unis. Après Haley Winn et Laila Edwards, c’est au tour de Simms de marquer son premier but sous les couleurs américaines, et quel but ! Avec ses 75 points en 39 parties, la jeune attaquante de 19 ans a terminé meilleure marqueuse de NCAA. Son but gagnant contre le Canada a permis aux États-Unis de remporter le groupe A.
L’autre rivalité
Médaillée de bronze ces deux dernières années, la Tchéquie a montré qu’elle a désormais grand appétit, à un an de son Mondial à České Budějovice. On parle de profonde rivalité au féminin entre les USA et le Canada, mais une autre est bien en train de naître entre les Tchèques et les Finlandaises. Les Tchèques ont éliminé ces deux dernières années la Finlande en quart de finale.
Cette saison, les deux équipes se sont rendues coup pour coup durant leurs cinq confrontations, avec trois victoires pour les Naisleijonat. Les deux équipes ont obtenu le même nombre de points à l’issue de l’Euro Hockey 2023-2024 mais la Finlande, victorieuse 6-1 des Tchèques en février devant une foule record de 3313 spectateurs à Liberec, a été désignée gagnante de l’EHT.
À Utica, la Tchéquie entraînée par Carla MacLeod a néanmoins obtenu une troisième victoire de rang aux championnats du monde contre la Finlande, et pour la première fois avec un jeu blanc à la clef. Blessée pour l’édition 2023, Klára Peslarová a signé le blanchissage devant la cage tchèque.
La troisième place du groupe A s’est jouée entre les deux équipes. Après une bonne résistance face aux États-Unis (3-5), la Finlande a obtenu un succès contre la Suisse (5-2). Sur ce dernier match, la guerrière et capitaine suomi Jenni Hiirikoski, qui dispute son 16e Mondial à 37 ans, a inscrit 4 points, 1 but et 3 passes.
Un point était toutefois nécessaire aux Tchèques pour s’adjuger la troisième place, mais elles ont gagné mardi soir avec la manière en surclassant la Suisse 6-1. Tereza Vanišová a ouvert le score après seulement 37 secondes de jeu et Natálie Mlýnková a elle aussi connu un match à 4 points, elle a inscrit un triplé en plus d’une assistance. La Frauen Nati termine la phase préliminaire sans point.
L’Allemagne impressionne
La Suède semblait en position de force pour remporter le groupe B après avoir également battu le Danemark (3-1) et la Chine (8-1). La Damkronorna est néanmoins tombée sur un os, l’Allemagne.
Sandra Abstreiter, suppléante d’Emerance Maschmeyer à Ottawa et qui dispute son quatrième championnat du monde, n’avait encaissé qu’un seul but face au Danemark puis face au Japon. La gardienne de 25 ans a été impériale face aux Suédoises, permettant à l’Allemagne de blanchir pour la première fois de son histoire aux Mondiaux cet adversaire, tandis que Franziska Feldmeier a marqué le seul but du match à 12 minutes de la fin.
C’était par ailleurs le deuxième blanchissage en carrière aux championnats du monde d’Abstreiter, un an après celui… contre la France. Sur le tournoi, Abstreiter a pour l’instant un pourcentage d’arrêts de 97,3% en trois matchs, devancée d’un cheveu par le monument canadien Ann-Renée Desbiens.
Et même sans Abstreiter, mise au repos pour la dernière journée, les Allemandes ont gardé leur invincibilité face à une équipe de Chine qui n’a pas fait le poids. Laura Kluge a ouvert le score après seulement 28 secondes de jeu, les Allemandes menaient 2-0 après le premier tiers-temps… et 19 tirs à 0 ! Lisa Hemmerle n’a pas eu trop de difficultés à préserver son premier blanchissage… pour son premier match avec l’équipe nationale ! Une belle récompense pour la gardienne de 28 ans qui a percé sur le tard.
C’est la deuxième fois que l’Allemagne remporte un groupe du Mondial élite féminin après 2017. A l’époque, elles avaient non seulement terminé (déjà) devant la Suède, mais elles avaient atteint le dernier carré en éliminant la Russie en quart de finale. En évitant les poids lourds canadiens et américains, la porte vers les demi-finales est davantage accessible pour la Frauen-Nationalmannschaft. Seront-elles en mesure de réitérer cette performance ? Il faudra néanmoins déjouer la redoutable Tchéquie.
Le Japon en danger
Le Japon fait partie de ces formations bien installées en élite mondiale féminine. « Smile Japan » comme on la surnomme dispute son cinquième tournoi consécutif en top division. Le premier adversaire des joueuses de Yuji Iizuka semblait le plus tendre du groupe B : la Chine, étonnante promue en élite après avoir remporté la Division 1A en 2023… un an après avoir remporté la Division 1B en 2022.
L’objectif maintien des Chinoises semblait d’autant plus périlleux que la fédération chinoise a mis fin à la politique des doubles passeports, les Nord-Américaines naturalisées ne sont donc plus là. Et pourtant, la Chine est parvenue à surprendre les Japonaises en remportant ce match à l’issue des tirs au but. Jiahui Zhan, seulement 18 ans, a été remarquable devant les filets avec 50 arrêts, avant de réaliser un sans faute devant les tirs au but japonais. Ce succès en fusillade était la première victoire de la Chine en élite mondiale depuis 2008.
Les Chinoises n’ont pas pu capitaliser sur ce succès surprise face au Danemark, vainqueur à son tour en fusillade. Minghui Kong avait pourtant réussi à égaliser à 1-1 à moins de deux minutes de la fin. Mais Zhan, avec pourtant 33 arrêts, a eu moins de réussite aux tirs au but. Emma-Sofie Nordstrom lui a volé la vedette. Jiahui Zhan a disputé les quatre matchs de la Chine, et elle a tout de même crevé l’écran. A seulement 18 ans pour son premier tournoi, Zhan est créditée de 93,9% d’arrêts en étant la gardienne la plus exposée, de très loin, aux tirs adverses.
Après son revers contre la Chine, le Japon s’était alors mis dans une position aussi inconfortable que inhabituelle. Akane Shiga et ses coéquipières ne sont pas parvenues à battre l’Allemagne (1-4) et encore moins la Suède (2-6). La Damkronorna avait d’ailleurs touché quatre fois le poteau, l’addition aurait donc pu être bien plus salée pour une équipe nippone mal en point.
La relégation s’est finalement jouée lors de la dernière journée de ce mardi avec un triangle à trois Chine, Japon et Danemark. Avec ses 3 points au classement, les Chinoises ont dû patienter sur leur sort devant Japon – Danemark. Et c’est le Japon qui l’a emporté sur le score de 3-0 avec un but par période, Riko Kawaguchi réalisant le blanchissage en repoussant les 8 tirs des Danoises. Emma-Sofie Nordstrom a une fois de plus été remarquable avec 28 arrêts, Rui Ukita ayant marqué le troisième but en cage vide.
Avec cette première victoire, les Japonaises reviennent de loin en évitant la relégation qui lui tendait les bras, elles se qualifient pour les quarts de finale. La Chine et le Danemark, finalement au niveau bien en dessous des autres équipes du groupe B, sont relégués en Division 1A.
Les Quarts de finale :
États-Unis – Japon
Canada – Suède
Tchéquie – Allemagne
Finlande – Suisse