Le match 5 de la série de quart de finale entre Rouen et Amiens a finalement lieu 24 heures après l’horaire prévu. Une reprogrammation causée par de trop faibles épaisseurs de glace aux niveaux des territoires des gardiens qui mettent en cause la sécurité des joueurs d’après le corps arbitral. Ces défauts de glace ne sont pas dus à la vétusté du bâtiment, ni à un cas de force majeure, mais bien à une suite d’insuffisances des équipes métropolitaines et de leur encadrement qui assure, tant bien que mal, depuis mai 2018 la continuité de service de la patinoire olympique de Rouen pour les quatre clubs résidents, le CHAR (hockey amateur), l’Espar (patinage artistique), le Rouen Olympic Club (patinage synchronisé) et le RHE76 (hockey sur glace professionnel).
Les Dragons, menant trois victoires à une, ont l’occasion, sans Vincent Nesa qui s’ajoute ce soir aux quatre autres titulaires rouennais blessés de plus longues dates, d’en terminer avec leurs meilleurs ennemis Gothiques privés, eux, de leur défenseur Joshua Brittain suspendu au lendemain du match 3.
Dès le démarrage, les deux équipes veulent s’impressionner et sont spectaculaires. Elles appliquent beaucoup de vitesse et s’acharnent dans les duels. Les deux gardiens ont déjà du travail. À ce petit jeu, les Normands ne sont pas assez solides dans leur territoire. Amiens ouvre le score par Gauthier Gibert qui saisit un rebond (0-1 à 3’47”). Moins de trois minutes plus tard, les Picards font le break via Magovac qui reprend de près une passe en retrait (0-2 à 4’22”).
Les coéquipiers de Loïc Lampérier ne se démobilisent pas pour autant. Ils sont rapidement récompensés de leurs efforts offensifs. Enzo Cantagallo, monté sur la droite, profite d’une passe transversale de son capitaine et réduit la marque dans une cage ouverte (1-2 à 5’06”).
Le jeu est ensuite haché par cinq prisons plutôt favorables aux partenaires de Zachary Lavigne. En infériorité pendant 2’30”, le RHE est efficace même s’il doit parfois s’en remettre à son gardien Jakub Lackovic (11’33” & 11’44”).
À la recherche de leur second souffle, les combattants offrent certaines largesses. À trois-contre-un, la passe de Zachary Lavigne n’est pas précise (13’27”). Taran Kozun a bloqué le palet lors d’un contre surnuméraire mené par Kytnar et Rech (14’12). Les glandes sudoripares du portier samarien sont surexcitées à cause du titillement produit par le choc du caoutchouc contre le métal de sa cage, après un lancer de Francis Perron, qui constituera la dernière occasion du premier tiers, avant que les défensives neutralisent jusqu’à la pause toutes velléités d’aller aux filets (15’34”).
Le deuxième acte est moins équilibré. Rouen a des chances en plus grand nombre. Tomas Simonsen égalise, en dehors (une fois n’est pas coutume) de son Oraxeat. En douce, le «faux frère» dérive une passe à l’initiative d’Alexander Lindelöf derrière la cage (2-2 à 24’37”). Après avoir passé une pénalité sans encombre, les locaux disposent du momentum. Sebastian Bengtsson obtient un duel qui tourne à l’avantage de Kozun (31’02”). Après l’appel vidéo des patrouilleurs, un but automatique n’est pas accordé à Rolands Vigners (32’35”). Finalement les Seino-Marins prennent logiquement les devants. Au deuxième poteau, trouvé par une transmission d’Alexander Lindelöf à travers une forêt de patins, Bengtsson est productif (3-2 à 35’32”).
Cela ne dure pas. Les visiteurs, dominés dans l’ensemble, collent comme une gomme à mâcher usagée sous les patins et font preuve de réalisme. Le RHE maladroit (retard de jeu) se met à la merci d’une appréciation plutôt rêche compte tenu des coutumes sur les duels de la série. Ils subissent une double infériorité de 1’31” à laquelle succéderont encore 47 secondes d’infériorité. Le duo d’arrières (Glad-Cantagallo) est présent sur la glace depuis 1’51 lorsqu’il s’incline. Dans le cercle droit, Tessier dresse la table pour Lavigne qui, rusé devant le territoire du gardien, déroute le service haut de gamme dans la cage (3-3 à 38’12”). Il restait neuf petites secondes à tenir. Rageant pour les hommes de Fabrice Lhenry et leur public nourrissant pas mal d’encouragements sur le coup.
Néanmoins, les pensionnaires de l’île Lacroix utilisent l’énergie de cette rogne pour reprendre les devants lors d’un power-play pourtant mal placé à cheval sur le deuxième repos. Tomas Simonsen de retour dans son fauteuil gamer frappe un tir du cercle gauche (4-3 à 40’53”). Moins d’une minute plus tard Dylan Yeo au même endroit en haut du cercle gauche poigne fortement le puck et donne une avance de deux buts au RHE (5-3 à 41’51”). Rouen est sur la rampe du succès. Tommy Perret obtient une opportunité qui fini dans les bottes de Kozun (43’07”). L’AHE est en mode survie. Toujours en vie. Les locataires du Coliseum tentent et dénichent un moment fort grâce à Kristjan Cepon (45’22”) au bout duquel Gibert réduit la marque d’un tir frappé à la ligne bleue (5-4 à 45’41”).
Là un acouphène d’alerte siffle dans les oreilles de certains. Dans les mémoires d’autres le souvenir du Marseille le 18 octobre dernier fait sa réapparition. Le staff rouennais n’est pas concerné par ces signaux et ne pose pas de temps mort. Ce millésime de Dragons est joueur. Il continue d’emballer un match enflammé en se projetant rapidement. Après un croisement avec Rech, Tommy Perret ajoute un but dans un filet ouvert (6-4 à 48’57”). Cela a souri, alors les joueurs des bords de Seine poursuivent à jouer comme s’ils étaient menés, comme pour punir la rudesse que les Gothiques leur ont administré tout au long de la série. Humilier au lieu d’éliminer. Après les chances de Vigners (52’07”) et de Lindelöf (52’46”), profitant que les projections rapides normandes ne favorisent pas la cohésion du bloc défensif rouennais, Julien Tessier réduit le score à cause d’un arrêt incomplet de Lackovic (6-5 à 53’24”).
Malgré cette seconde mise en garde et les voyants qui repassent au rouge, il n’y aura pas plus de demande de temps mort. Sans tôliers lucides capables d’imposer de jouer minable, de casser ce rythme élevé, de garder de l’énergie. Le RHE manque d’intelligence et l’occasion d’en finir face à la bande de Terminators de Mario Richer. Les Dragons s’essoufflent à l’attaque. Sur des bonnes positions, Loïc Lampérier (53’58”) et surtout Francis Perron (54’29”) n’ajoutent pas de filet au compte rouennais. Bastien Maïa (55’08”) fait trembler la foule au terme d’un contre surnuméraire accordé à cinq minutes d’une sirène qui doit officialiser la qualification rouennaise… Invraisemblable ! Bien entendu, Amiens égalise. Julien Tessier, pour un doublé personnel, envoie des poignets de la pointe alors que Lackovic est masqué (6-6 à 57’05”). La prolongation est équilibrée. Les deux équipes manquent leurs chances. Les tirs aux buts désignent le vainqueur et sourissent aux Gothiques grâce aux deux réussites de Larinmaa et Tessier.
Rouen n’a pas été assez intelligent pour l’emporter malgré avoir mené deux fois de deux buts dans le dernier tiers. Il faudra désormais aux Dragons gagner au Coliseum au risque de disputer un match sept aléatoire. Le RHE a laissé une porte entre ouverte, Amiens a mis le patin et s’y est engouffré. L’AHE, au pied du mur, est toujours, en vie, mené trois victoires à deux dans la série, les Gothiques n’ont pas d’autre choix que de gagner de nouveau, dès demain, sur leur glace.
(Toutes les photos sont des photos d’archives)
Commentaires d’après-match (dans Paris-Normandie) :
Fabrice Lhenry (entraîneur de Rouen) : « C’est décevant, c’est sûr, mais ça fait partie des play-offs. On ne peut pas gagner toutes séries 4 victoires à 0. On mène toujours 3 matches à 2, avec une victoire à aller chercher. On aurait aimé l’avoir dès ce soir mais ça ne l’a pas fait. Il faut se remobiliser rapidement, rester positif, et aller la chercher demain à Amiens. Il va falloir remettre tous les ingrédients qui ont fait notre succès là-bas. Amiens est une équipe qui ne lâche jamais mais, nous, c’est pareil, on ne lâchera pas. »
Mario Richer (entraîneur d’Amiens) : « Donner 6 buts contre Rouen et espérer gagner, c’est un miracle. C’est notre éthique de travail. L’éthique Gothiques. On travaille tant qu’on peut, jusqu’à la fin. C’est notre façon d’être. Ça a payé. »
La veille (dans Paris-Normandie) sur le défaut de glace :
Fabrice Lhenry (entraîneur de Rouen) : « Il n’y avait plus qu’un centimètre d’épaisseur devant la cage et il y a des endroits où il n’y en avait carrément plus. Il y a beaucoup d’équipes et pas assez d’heures pour que les employés aient le temps d’arroser, de préparer la glace. Est-ce qu’il y a, aussi, la compétence suffisante ? Chaque métier a des spécialistes. Un jardinier est un jardinier, un glacier est un glacier. Or, ici, il n’y a plus de glacier. C’est peut-être un système à revoir car, l’épaisseur de glace, en la travaillant bien, c’est quelque chose que, je pense, on peut gérer…On voit ce qu’on vit tous les jours. Ce n’est pas nouveau, c’est récurrent et c’est, au final, un peu désabusant. C’est triste pour un club comme Rouen de vivre ça. Ce n’est pas pro. Dans l’idéal, il faudrait 4 à 5 centimètres de glace partout, ce qui, en une nuit, est impossible à avoir. Ça ne sera, quoi qu’il arrive, pas extraordinaire mais, ce qu’il faut, c’est qu’il y ait au moins une surface suffisante pour que les joueurs puissent patiner sans risques. »
Marc-André Thinel (manager adjoint de Rouen) : « On a été prévenu avant le match qu’il n’y avait pas assez d’épaisseur au niveau des cages. On a quand même tenté le coup mais, clairement, pour être allé voir après l’échauffement, juste avant le match, c’était injouable. Avec le club d’Amiens, on a donc décidé de reporter la rencontre. Pour la sécurité des joueurs, c’était une chose évidente à faire. Est-ce que le nécessaire a été fait pour le match de ce soir ? Je ne sais pas. Moi, je ne suis pas prêt à leur mettre la faute [Ndlr: aux services techniques de la patinoire] mais il y a clairement quelque chose qui ne va pas, qu’il faudra changer. C’est malheureux mais j’espère que le match de ce soir va montrer qu’il faut faire quelque chose. J’ai l’impression de revivre ce qui s’était passé il y a deux ans face à Grenoble en finale. On est un des plus grands clubs en France et cela fait deux fois que ça arrive… Cela ne donne pas une bonne image… Il n’y aura rien sur la glace de la journée demain. Le but est que les techniciens puissent travailler dessus pour que ce soit jouable. »
Rouen – Amiens 6-6 (1-2, 2-1, 3-3, 0-0) / 0-2 aux tirs au but
Dimanche 9 mars 2025 à 20h00 à la patinoire Nathalie Pechalat. 3029 spectateurs.
Arbitres : Geoffrey Barcelo et Clément Goncalves assistés de Quentin Ugolini et Joffrey Yssembourg
Pénalités : Rouen 14′ (6′, 6′, 2′, 0′) ; Amiens 12′ (4′, 2′, 2′, 0′)
Tirs : Rouen 39 (14, 10, 13, 2) ; Amiens 37 (13, 13, 6, 5)
Supériorités : Rouen 1/2, Amiens 1/5
Évolution du score :
0-1 à 03’47” : Gibert assisté de Bergeron et Mony
0-2 à 04’22” : Magovac assisté de Djemel et Phelan
1-2 à 05’06” : Cantagallo assisté de Lampérier et Simonsen
2-2 à 24’37” : Simonsen assisté de Lindelöf et Glad
3-2 à 35’32” : Bengtsson assisté de Lindelöf et Vigners
3-3 à 38’12” : Lavigne assisté de Tessier et Maïa (sup. num)
4-3 à 40’53” : Simonsen assisté de Yeo et Perron (sup. num.)
5-3 à 41’51” : Yeo assisté de Naud
5-4 à 45’41” : Matima assisté de Gibert et Roussel
6-4 à 48’57” : Perret assisté de Rech et Glad
6-5 à 53’24” : Tessier assisté de Larinmaa
6-6 à 57’05” : Tessier assisté de Plagnat et Mony
Tirs au but :
Rouen : Kytnar (manqué), Bengtsson (manqué), Simonsen (manqué), Perron (manqué).
Amiens : Larinmaa (réussi), Djemel (manqué), Svanenbergs (manqué), Tessier (réussi).
Rouen
Attaquants :
Loïc Lampérier (C) – Jared Dmytriw – Tomas Simonsen
Sebastian Bengtsson – Francis Perron – Rolands Vigners
Quentin Tomasino – Johanès Avonde – [Simonsen]
Anthony Rech (A) – Milan Kytnar (A) – Tommy Perret
Arrières :
Dylan Yeo – Guillaume Naud
Daniel Glad – Alexander Lindelöf
Mattéo Perdrix – Alexander Lindelöf
Gardien :
Jakub Lackovic (31 arrêts)
Remplaçant : Gaëtan Richard (G). Absents : Florian Chakiachvili, Juho Tommila, Robin Colomban et Jordan Hervé (commotions), Vincent Nesa (doigt), Noa Goncalves Nivelais (U20) et Oskari Setänen (G, choix).
Amiens
Attaquants :
Rudy Matima – Janis Svanenbergs – Gauthier Gibert
Zachary Lavigne (C) – James Phelan (A) – Ilies Djemel
Jesper Larinmaa – Julien Tessier – Bastien Maïa
Noa Besson – Ugo Toquin
Arrières :
Mathieu Mony – Justin Bergeron (A)
Kristjan Cepon – Aleksandar Magovac
Guillaume Roussel – Antonin Plagnat
Gardien :
Taran Kozun (33 arrêts)
Remplaçants : Raphaêl Chateauvieux (G) et Raphaël Opoma Ngombo. Absents : Joshua Brittain (suspendu), Clément Fouquerel et Jordan Lepage (blessés ?).