La pénitence bleue

Toujours privé de Teddy Da Costa, et maintenant d’Erwan Pain qui a fait une mauvaise chute hier à l’entraînement, Dave Henderson est obligé d’aligner de nouveau Quessandier en attaque. Il recompose sa troisième ligne en y intégrant Sacha Treille tandis que Luc Tardif remplace Raux aux côtés de Yorick Treille et Laurent Meunier. Le sélectionneur français réinstalle Lhenry dans la cage, privilège de l’expérience sans doute.

C’est au bout de 06’30 » qu’on assiste au premier tir bleu, tenté par Bellemare. Retour immédiat de flamme avec une perte de palet de Roussel en zone offensive qui offre un 2 contre 0 aux Norvégiens. Heureusement, Anders Fredriksen et Mats Zuccarello Aasen manquent de spontanéité et Lhenry lit bien le jeu. Lussier répond d’un lancer dans les bottes de Grotnes puis par un tour de cage qui échoue sur le poteau. Après cinq-six minutes d’observation, le jeu s’anime enfin et pour l’instant, les Bleus sont là, sur le palet et contre les bandes.
Ils y sont tellement, contre les bandes, que Manavian s’encastre dans une balustrade sur invitation de Laumann Ylven, qui le charge à la tête, coude en avant. La faute est manifeste. Pourtant, le duo arbitral doit recourir à la vidéo pour infliger une pénalité de match au coupable tandis que centre offensif Fredriksen, pas utilisé dans les phases défensives, purge la peine.

Entre deux chaises
»Vive la jeunesse », titrait le site internet de l’IIHF, le matin du match, pour une interview de Dave Henderson. Effectivement, l’équipe de France est jeune, donc enthousiaste, dynamique, sans complexe (Stéphane Da Costa !), vaillante en diable mais aussi gaffeuse, comme Hecquefeuille qui fait trébucher Fredriksen à deux minutes du terme du premier tiers. Cette premier jeu de puissance est cependant très mal négocié par les Norvégiens qui ne parviennent pas à s’installer. Un-zéro au buzzer, les Bleus ont le fondement entre deux chaises : attaquer pour obtenir les trois buts d’écart ou préserver l’acquis ?

Le jeu de puissance norvégien a ceci de différent du français que le palet y tourne beaucoup plus autour de la cage. La présence de Lhenry, le sens du sacrifice des Français et les poteaux (slap de Jakobsen dévié) maintiennent le score en l’état.
Lhenry est encore appelé à travailler quand une superbe passe de Tommy Jakobsen envoie en échappée Mathis Olimb, mais comme lors du premier tiers, les Bleus expriment leur présence (seize mises en échec à onze à mi-match) et semblent équilibrer le jeu à la mi-période, au point que Yorrick Treille, d’une accélération suivie d’un coup de frein et d’une passe du revers, sert Bellemare qui ne cadre pas ce tir en position idéale. Une occasion vite regrettée… Røymark remporte une mise au jeu et permet à Lorentzen, en deux temps trois mouvements, de viser (et trouver) la lucarne opposée de Lhenry (1-1, 32’02 »). Superbe et, avouons-le, justifié. Oublions la victoire par trois buts d’écart, privilégions les trois points.
Méfiez-vous du mini-génie

Le troisième tiers démarre mal, Lhenry se faisant pénaliser d’un sévère retard de jeu pour un palet dégagé qui a touché le filet de protection juste au-dessus du plexi. Il se rattrape d’emblée en opposant une mitaine solide à un lancer de Lars Løkken Østli, qui se révèle deux fois de suite très maladroit en gâchant deux services de Zuccarello Aasen en cage ouverte. Le mini-génie se charge alors de faire la différence lui-même. Posté à la bleue, seul comme un toutou, il récupère une passe de Thoresen et arme un lancer du poignet qui s’incruste dans la lucarne de Lhenry (2-1, 42’34 »).
Cette fois, le coup fait mal. Contre les Tchèques et les Suédois, les Bleus avaient su réagir mais ces rencontres étaient considérées perdues d’avance, dénuées de pression. Cette fois-ci, le match est décisif et les nerfs français s’en ressentent. La réaction est ténue, Lhenry doit encore beaucoup travailler, notamment devant Bastiansen ou sur un slap de Solberg. Cependant, il voit passer entre ses jambières un palet remporté sur une mise au jeu en zone défensive mais malencontreusement dévié par Amar (3-1, 47’19 »).

Frustrant, bien sûr. Tardif déverse sa bile (crosse haute), prend deux minutes et Thoresen exploite le jeu de puissance en moins d’une minute (4-1, 48’42 »). Pas calmé, le Rouennais charge Lorentzen dans le dos et retourne s’asseoir. Pas malin de fatiguer les unités spéciales alors que le sprint du maintien se profile. Pas de but encaissé cette fois-ci et le chronomètre qui tourne, désormais lent comme une pénitence.
Lhenry n’en a pas fini avec son calvaire, Mathis Olimb se prenant pour Forsberg (Peter, pas Kristian) en transformant un tir de pénalité qui ne s’imposait pas vraiment, l’attaquant norvégien ne partant pas seul au but (5-1, 56’57 »).
Le score est fait mais il reste quelques comptes à régler, ça brasse un peu partout et les arbitres distribuent allègrement les minutes (Grotnes exclu pour s’être vengé d’un coup de crosse mal placé de Yorick Treille sur un rebond, charge dans le dos Da Costa) mais là n’est pas le plus important. L’horizon bleu, désormais, s’appelle poule de maintien avec un premier duel contre l’Italie, samedi à 16h15, suivi du choc contre les États-Unis dimanche à 12h15. Il sera primordial de garder ses nerfs et son énergie, ne pas se disperser et rester concentré de la première à la dernière sirène. En somme, répéter sur une heure la performance du premier tiers. « Vive la jeunesse ! », disait l’IIHF ? Elle peut parfois être un vilain défaut.
Désignés joueurs du match : Stéphane Da Costa pour la France et Tommy Jakobsen pour la Norvège.
Commentaires d’après-match

Dave Henderson (entraîneur de la France) : « On est bien parti, on est physiques. Au deuxième et au troisième tiers, on prend trop de pénalités et on baisse d’intensité. On a perdu trois joueurs sur blessure, les joueurs-clés ont été surchargés à certains moments, ce sont eux qui sont importants pour faire le résultat. Dans la seconde partie du tournoi, on récupère deux joueurs [les réservistes Lampérier et Igier] qui vont nous soulager. Antonin [Manavian] est sonné, on a essayé de le faire revenir sur la glace mais les toiles d’araignée n’étaient pas parties. »
Fabrice Lhenry (gardien de la France) : « On a fait un super premier tiers, on a patiné et frappé, on a baissé de pied ensuite. On a un peu craqué au troisième tiers. On a pris pas mal de pénalités, j’en prends une d’entrée en dégageant le palet dehors. Ils ont un bon powerplay, avec quatre-cinq super-joueurs. On est un peu abattus, on espérait vraiment les battre. Un autre tournoi commence, il faudra gagner 2 matchs sur 3. »
Laurent Meunier (capitaine de la France) : « Dommage car on est dans le match et on fait un bon premier tiers. Le score ne reflète pas réellement le match. Physiquement, on fait un gros match pendant les deux premiers tiers. Par rapport à eux, ils nous a manqué de marquer des buts en powerplay. Après, ils ont de grands joueurs : Zuccarello et Thoresen sont deux des meilleurs joueurs en Europe. En poule de relégation, il va falloir en vouloir plus que les autres. Entre des équipes du même niveau, c’est celle qui aura le plus envie qui restera. »
Baptiste Amar (défenseur de la France) : « J’ai essayé d’arrêter le palet, en fait il va trop vite et je ne fais que le prolonger… Le match ne s’arrête pas là-dessus. Physiquement, on est un peu juste, on a un petit temps de retard, et dès le deuxième tiers on a passé de longues périodes dans notre zone. Notre place dans l’échelon mondial est plus en poule de relégation qu’au deuxième tour. On revient un peu sur terre. »
Norvège – France 5-1 (0-1, 1-0, 4-0)
Jeudi 13 mai 2010 à 16h15 à la SAP Arena de Mannheim. 4403 spectateurs.
Arbitrage de Daniel Konc (SVK) et Daniel Piechaczek (ALL) assistés d’Andreas Kowert (ALL) et Thomas Gemeinhardt (SVK).
Pénalités : Norvège 56′ (5’+20, 4′, 2’+5’+20′), France 36′ (2′, 4′, 10’+10’+10′).
Tirs : Norvège 40 (8, 11, 21), France 27 (9, 10, 8).
Évolution du score :
0-1 à 12’49 » : S. Da Costa assisté d’Auvitu (sup. num.)
1-1 à 32’02 » : Lorentzen assisté de Røymark et Forsberg
2-1 à 42’34 » : Zuccarello Aasen assité de Thoresen et Østli (sup. num.)
3-1 à 47’39 » : Bastiansen
4-1 à 48’42 » : Thoresen assisté de Zuccarello Aasen (sup. num.)
5-1 à 56’57 » : M. Olimb (tir de pénalité)
Norvège
Gardien : Pål Grotnes puis Ruben Smith à 59’19 ».
Défenseurs : Jonas Holoøs – Alexander Bonsaksen ; Juha Kaunismäki – Tommy Jakobsen (C) ; Lars Løkken Østli – Henrik Solberg.
Attaquants : Patrick Thoresen (A) – Mats Zuccarello Aasen – Anders Fredriksen ; Lars Erik Spets – Anders Bastiansen (A) – Mathis Olimb ; Peter Lorentzen – Kristian Forsberg – Martin Roymark ; Marius Holtet, Martin Laumann Ylven [expulsé à 10’24 »] ; Ken Andre Olimb [2 présences au 3e tiers], Knut Henrik Spets [2 présences au 3e tiers].
France
Gardien : Fabrice Lhenry.
Défenseurs : Baptiste Amar (A) – Vincent Bachet (A) ; Antonin Manavian [puis Auvitu à 10’24 »] – Nicolas Besch ; Thomas Roussel – Yohann Auvitu [puis Quessandier à 10’24 »].
Attaquants : Yorick Treille – Laurent Meunier (C) – Luc Tardif ; Pierre-Édouard Bellemare – Kévin Hecquefeuille – Stéphane Da Costa ; Anthoine Lussier – Laurent Gras – Sacha Treille ; Brian Henderson – Damien Raux – Benoît Quessandier [repasse en défense à 10’24 »].
Remplaçant : Eddy Ferhi (G). Absents : Teddy Da Costa (ménisque), Erwan Pain (ligaments de l’épaule).
 
			 
                                





























 
			








