La dernière journée de phase de poules de CHL n’aura jamais connu aussi peu d’enjeu que cette année : les qualifiés étaient déjà connus dans sept groupes sur huit ! Heureusement, il reste ce groupe E, où le suspense est presque total. Ce n’est pas une surprise en soi car il semblait de loin le plus homogène, dès le tirage au sort. Fribourg-Gottéron s’est qualifié la semaine dernière, mais les trois autres équipes sont toujours en course pour la dernière place en quart de finale.
Parmi elles, le seul club du « quatrième chapeau » – celui des championnats qui ne font pas partie des ligues fondatrices de la compétition – à s’être mêlé à la course à la qualification : les Stavanger Oilers. C’est sans doute le club des « petits pays » qui a le plus de références européenne (avec Rouen). Les Norvégiens avaient remporté la Coupe Continentale 2014 sur l’île Lacroix en devançant un club de KHL (le Donbass Donetsk juste avant que la première guerre ukrainienne ne détruise sa patinoire) et avaient été performants lors des deux premières éditions de la CHL, éliminés de peu en 2015 (à égalité de points avec Tappara) et premiers de groupe l’année suivante. Mais ils avaient ensuite décliné peu à peu, y compris dans leur championnat national.
Redevenu champion au printemps, cinq ans après son dernier titre, Stavanger défie de nouveau l’Europe. On aurait pu espérer que ce match décisif à domicile – qui peut offrir une qualification en cas de victoire dans le temps réglementaire – susciterait l’engouement, mais l’ambiance est… norvégienne. Autant dire, assez froide. On entend quelques rares « Let’s go Oilers » mais dans l’ensemble, l’atmosphère en début de match semble aussi plate et désolée qu’une marée noire…
L’adversaire Ilves a longtemps couru après sa gloire passée, et semble courir encore. Demi-finalistes de l’EHL en 1999, les lynx participent pour la première fois à la compétition héritière après leur bonne saison de Liiga 2021/22. Ils ont remporté le match aller la semaine dernière grâce à un solide premier tiers… mais l’entraîneur Jouko Myrra et son assistant Marko Ojanen ont été virés au lendemain de cette victoire. On n’est que début octobre, mais Myrra était lui-même rentré en fonction fin septembre il y a quatre ans. Le nouveau coach est Antti Pennanen (photo de gauche) : rentré en août du championnat du monde junior « estival », il a remporté des médailles de toutes les couleurs en trois éditions des Mondiaux 20 ans, en plus de son titre finlandais 2019 avec HPK.
Les Finlandais démontrent rapidement des qualités individuelles supérieures, notamment par la première ligne où Joonas Ikonen réussit un dribble étincelant en un contre un (à la Dylan Fabre mais sans conclure par un but). Joonas Oden fait aussi la différence par un débordement extérieur sur l’aile gauche. Mais le gardien international norvégien Henrik Holm reste solide. Il est un domaine où Stavanger a assez souvent l’avantage, ce sont les duels physiques, grâce aux robustes Ján Brejčák et Tommy Kristiansen (le premier avait mordu le second au printemps mais ils sont coéquipiers depuis le recrutement du Slovaque avant-hier !)
En un quart d’heure, le seul tir norvégien dangereux est venu de Dan Kissel pendant un avantage numérique. Voilà justement que Kissel s’échappe… mais il est rattrapé par un excellent retour du centre hongrois Balázs Sebök. La réplique arrive sur l’action suivante : Jani Nyman, qu’on sent incisif depuis le coup d’envoi, fonce sur l’aile gauche et envoie un tir fulgurant dans la lucarne opposée. Ilves mène au score pendant… 16 secondes. Thomas Berg Paulsen déborde à gauche et centre pour Tommy Kristiansen qui n’a qu’à pousser le palet au fond, dans le dos du défenseur Lööf. 1-1, donc, malgré la nette domination finlandaise aux tirs (14 à 4).
Mais en deuxième période, ce n’est plus du tout la même histoire. C’est maintenant Stavanger qui met la pression de manière constante en zone offensive. Thomas Berg Paulsen gagne une mise au jeu contre Santeri Virtanen et ressort le palet à la bleue pour le défenseur international Daniel Bøen Rokseth, dont le tir est dévié face au but par Tommy Kristiansen (photo ci-dessus).
On entend déjà plus le public, qui hue quand une charge violente de Salmela laisse au sol Strandborg derrière la cage finlandaise. Le défenseur de 20 ans, sonné, doit quitter le jeu, mais les arbitres n’infligent pas de pénalité. Ils sanctionnent en revanche le « top scorer » d’Ilves Tommi Tikka qui propulse contre la bande un autre jeune joueur, Noah Aarthun. Pendant deux minutes, les Oilers restent installés et continuent de pousser, mais sans creuser l’écart. Et ensuite, c’est au tour d’Ilves d’égaliser contre le cours du jeu. Ce n’est même pas un but construit, mais une partie de billard qui voit le palet revenir sur Joona Ikonen pour un beau tir du poignet à mi-distance.
Le score nul ne fait les affaires de personne, sauf du troisième larron Salzbourg. La dynamique est un peu plus favorable à Stavanger mais Marek Langhamer s’est montré solide… jusqu’au but-gag. Le gardien tchèque est piégé par un tir-surprise envoyé du coin, derrière la ligne de fond, par Dan Kissel (photo ci-dessus).
Il reste treize minutes pour revenir au score pour Ilves. Une crosse haute d’Otto Latvala, n’aide pas… quoique. Ikonen intercepte le palet pendant l’infériorité numérique, mais il est à la fin d’une longue présence usante à patiner après le palet. Complètement cramé, il ne peut pas aller au bout de son breakaway. Antti Pennanen essaie de forcer le destin en sortant son gardien très tôt, à 3’21 de la fin. Mais rien n’y fait. Dans la dernière minute, Colton Beck envoie le palet en cage vide depuis la zone neutre.
Après ce but, les réjouissances sont plus franches dans les tribunes où on s’est pris au jeu au fil du match grâce au score. Mais voyons, c’est logique : dans le club pétrolier, l’ambiance est… diesel !
On dit qu’une bonne nouvelle n’arrive jamais seule. Au moment où les équipes se saluent en Norvège, Fribourg-Gottéron retourne la situation en une minute et demie contre Salzbourg (de 0-1 à 2-1 par des buts de Samuel Walser et Sandro Schmid). On est alors un peu avant la mi-match en Suisse et il reste beaucoup de temps. Mais à neuf minutes de la fin, sur un rebond lâché par le gardien numéro 3 de Fribourg Loïc Galley, revenu de prêt le matin même (Berra est blessé de longue durée et Hughes a besoin de repos), l’international italien Peter Hochkofler se jette sur la rondelle et la propulse au fond : il qualifie Salzbourg pour la phase à élimination directe pour la septième fois en sept participations. C’est donc le champion d’Autriche qui accompagnera les clubs des grands pays de hockey en huitièmes de finale.
Commentaires d’après-match :
Todd Bjorkstrand (entraîneur de Stavanger, en photo) : « Ilves est une très bonne équipe, très rapide. On a dû être physique, bloquer de tirs, mais aussi mettre des buts au bon moment, comme après leur ouverture du score. On a fait une super-campagne de CHL jusqu’ici, on a gagné à Fribourg, on a pris deux fois un point contre Salzbourg. Espérons qu’on ait de l’aide et que Fribourg gagne ce soir… »
Antti Pennanen (entraîneur d’Ilves) : « Stavanger a fait un bon match. On a fait une bonne première période, mais dans le deuxième tiers-temps, beaucoup de choses n’ont pas fonctionné. »
Résultats et classements de la phase de poules de CHL
Stavanger Oilers – Ilves Tampere 4-2 (1-1, 1-1, 2-0)
Mardi 12 octobre 2022 à la DNB Arena de Stavanger. 2042 spectateurs.
Arbitres : Andrew Dalton (GBR) et Christian Bo Persson (NOR) assistés de Njaal Søstumoen et Alexander Waldejer (NOR).
Pénalités : Stavanger 6′ (2′, 2′, 2′) ; Ilves 8′ (2′, 2′, 4′).
Tirs : Stavanger 21 (4, 10, 7) ; Ilves 37 (14, 10, 13).
Évolution du score :
0-1 à 15’57 : Nyman assisté de Mäntykivi et Sebök
1-1 à 16’13 : Kristiansen assisté de Berg Paulsen et Ulriksen
2-1 à 29’57 : Kristiansen assisté de Bøen Rokseth et Gervais
2-2 à 35’22 : Ikonen
3-2 à 47’09 : Kissel assisté de Karlsen et Bittner
4-2 à 59’20 : Beck (cage vide)
Stavanger Oilers
Attaquants :
Dan Kissel (+1) – André Strandborg – Christoffer Karlsen (+1)
Ludvig Hoff (-1) – Colton Beck (+1) – Greg Mauldin
Bryce Gervais (+2) – Thomas Berg Paulsen (+1) – Tommy Kristiansen (+3, 2′)
Sander Hurrød (-1) – Paul Bittner – Anders Henriksen (-1)
Vegard Faret
Défenseurs :
Patrick Ulriksen (+1, 2′) – Martin Lefebvre (+1)
Ján Brejčák (-1) – Andreas Klavestad (-1)
Thomas Higson – Daniel Bøen Rokseth (+2)
Noah Aarthun (+2)
Gardien :
Henrik Holm
Remplaçant : Joona Partanen (G). Absent : Dennis Sveum.
Ilves Tampere
Attaquants :
Eemeli Suomi – Petri Kontiola – Joona Ikonen
Matias Mäntykivi (+1) – Balázs Sebök (+1) – Jani Nyman
Panu Mieho (-1) – Santeri Virtanen (-1) – Joonas Oden (-1)
Aku Räty (-2) – Tommi Tikka (-3, 2′) – Eetu Tuulola (-2)
Défenseurs :
Kevin Czuczman (-1) – Dominik Mašín (-1, 2′)
Jarkko Parikka – Les Lancaster (-1)
Tuomas Salmela – Karri Aho
Leo Lööf (2′) – Otto Latvala (2′)
Gardien :
Marek Langhamer [sorti de 56’39 à 57’56 et de 58’09 à 59’20]
Remplaçant : Jakub Málek (G). Absents : Jyrki Jokipakka et Henrik Haapala (blessés).