L’équipe de France commence son championnat du monde par deux rencontres frontalières de part et d’autre du Mont-Blanc. En pleines vacances scolaires, le palais des sports de Megève est le théâtre ce soir des débuts internationaux d’un hockeyeur haut-savoyard, Emil Tavernier. Né et formé à Morzine, l’international junior a aussi la nationalité finlandaise et joue depuis trois saisons chez les juniors du KalPa Kuopio. C’est le premier membre de la génération 2004 intégré avec les Bleus. Tavernier fait office de treizième attaquant, joker aligné sur la quatrième ligne et parfois même sur la première.
L’Italie vient pour sa part de faire savoir qu’elle ne pourrait pas disposer de son prestigieux entraîneur Mike Keenan : l’ancien coach de NHL, âgé de 74 ans, doit se remettre d’une opération. C’est son adjoint Mike Pelino qui tentera de faire monter l’Italie dans le prochain Mondial de D1A, avec un staff encore incrémenté de la présence de Perry Pearn (72 ans) qui était depuis deux ans le sélectionneur du Japon. Le staff italien est donc toujours très fourni, à moins de deux ans des Jeux olympiques à domicile. Il comprend pas moins de six entraîneurs dont un pour les gardiens, sans compter le préparateur athlétique et le coach mental.
La France entre bien dans son match. Valentin Claireaux et Tomas Simonsen portent les premières banderilles. Dylan Fabre, lancé par sa vitesse de patinage, s’offre un face-à-face avec le portier Jacob Smith à la quatrième minute de jeu. L’ouverture du score vient d’un travail collectif pour entrer en zone, gratter le palet et le ressortir à la ligne bleue tout en mettant de la présence dans le slot. Le lancer de Vincent Melin est alors dévié à mi-distance par Valentin Claireaux (1-0).
L’Italie commence alors à se procurer plus d’occasions. Sebastian Ylönen doit en particulier s’interposer sur un 2 contre 1 de Finoro et Zanetti. L’alerte n’aura pas suffi. Les Transalpins viennent attaquer la cage à plusieurs et le joueur de Junior Majeur (Peterborough en OHL) Tommy Purdeller vient conclure de près pour son tout premier match international senior… le jour de ses 20 ans (1-1). Joyeux anniversaire ! Les Bleus dominent encore la fin de période, jouée à un bon rythme. Mais ils ne concrétisent pas, malgré un bon lancer de Jordann Bougro, bien décalé dans le cercle droit par Emil Tavernier.
L’équipe de France peine à se relancer en deuxième période et est souvent sous pression dans sa zone. Mais lorsque l’Italie change de joueurs après un lancer non cadré, elle n’a pas compris que le palet n’était pas retombé sur n’importe qui après avoir frappé la balustrade : il est arrivé sur Dylan Fabre, qu’aucun joueur blanc n’est capable de rattraper. Le rapide ailier des Ässät, auteur d’une bonne première saison en Liiga finlandaise, s’offre donc un second duel avec le gardien, qu’il bat cette fois en toute beauté (2-1). Les Bleus ont beaucoup plus subi pendant ce tiers médian mais ils ont pris – et cette conservé – l’avantage contre le cours du jeu.
Le troisième tiers-temps débute par une occasion italienne à la première minute qui déclenche une petite échauffourée devant la cage. Les arbitres distribuent alors les premières pénalités du match contre Finoro et Farnier. Dès l’engagement joué dans leur zone, en restant à 5 contre 5, les Français se propulsent tous en contre-attaque et les Italiens sont dépassés au repli. Nicolas Ritz remonte le palet, Aurélien Dair fixe le dernier défenseur et donne à Kévin Bozon qui déjoue le gardien (3-1). Gios part en prison dans la foulée (accrocher) mais les Bleus n’arrivent même pas à installer leur jeu de puissance, encore très balbutiant en ce début de préparation.
L’entraînement des unités spéciales se poursuit avec un cinglage de Melin. L’Italie est un peu plus dangereuse en avantage numérique mais la France finit par se dégager. La dynamique du match semble basculer en faveur des visiteurs, seule la barre transversale repousse un lancer de Conci. Sur une action installée en zone offensive, l’Italie est trop peu pressée et déploie son jeu de manière trop confortable. Après un premier tir du cercle droit de Pascal Brunner, les Bleus n’arrivent pas à évacuer le rebond… qui revient à Brunner presque au même endroit. Fa-si-la-marquer (3-2).
C’est une constante pour la France de ne jamais arriver à faire l’écart contre l’Italie. Elle ne se laisse toutefois pas remonter avec la sortie du gardien, Aurélien Dair ajoute un but en cage vide (4-2).
Avant une Marseillaise bien époumonée, la séance de tirs au but, organisée pour l’entraînement et pour le public, donne lieu à une jolie démonstration technique de Dylan Fabre. La feinte d’Emil Tavernier – jeunot envoyé pour cet exercice en raison de ses qualités offensives – n’a pas la même vitesse d’exécution et finit dans les bottes du gardien. Larkin égalise finalement sur le cinquième pénalty italien mais Claireaux offre le succès honorifique dans cette séance.
Désignés joueurs du match : Sebastian Ylönen pour la France et Giordano Finoro pour l’Italie.
Commentaires d’après-match :
Kévin Bozon (attaquant de la France, photo ci-contre) : « Il y avait beaucoup de joueurs comme moi qui n’avaient pas joué depuis longtemps, pas facile de retrouver le rythme. Cela fait du bien avec un match pas si parfait de revenir avec une victoire. C’est une équipe qui a joué très physique ce soir, ils ont été très agressifs, ils nous ont mis beaucoup en difficulté. Ils ont un jeu un peu similaire à nous, mais dès qu’on joue à notre niveau, on les domine. Ça fait plaisir de marquer ici devant ma famille. »
Philippe Bozon (entraîneur de la France) : « C’est une mise en jambes pour nous pour trouver le rythme international. Des moments compliqués. L’Italie nous a mis sous pression, a mis un gros impact physique. On a vraiment souffert au deuxième tiers notamment. On a quand même été opportunistes, on a réussi à marquer des buts. On doit faire mieux avec le puck, on a du déchet. Il y a des gars qui ont eu des longues coupures, ça va prendre un petit peu de temps. On fait le point chaque semaine, on épie le programme de tout le monde pour les play-offs et on essaie de planifier les arrivées. Sur un match comme ce soir, il y en a qui ne sont pas au niveau physique et ont besoin de travailler, ce qui est aussi normal. »
Match-revanche à Aoste
Les deux équipes se retrouvent le dimanche soir à Aoste, dans la patinoire où a été formé Tommaso De Luca avant de partir poursuivre son développement en Suisse il y a huit ans : ce prometteur attaquant de 19 ans, qui a inscrit 11 buts cette saison dans l’élite helvétique avec Ambrì-Piotta, fait ses débuts en équipe d’Italie sénior ce week-end. C’est un cas rarissime – unique ? – d’avoir un hockeyeur du Val d’Aoste dans la « Nazionale ».
L’Italie, déjà presque au complet puisqu’elle a notamment tous ses joueurs de Bolzano éliminés en demi-finale d’ICE HL, intègre six joueurs frais pour le second match. La France n’a pas encore cette largeur d’effectif, et compte même deux hommes en moins (Coulaud et Simonsen). Elle se contente de changer de gardiens. Or, Papillon et Junca n’ont pas fini leur saison et Tom Aubrun, initialement convoqué, a déclaré forfait. Raphaël Garnier fait donc ses débuts en équipe de France.
Les Bleus partent bien et obtiennent les premières occasions avec un rebond de Jordann Bougro puis avec Loïc Farnier qui tire au-dessus. Ils tuent la première pénalité de Melin (faire trébucher) et convertissent au contraire leur première opportunité après une obstruction de Brunner. Adel Koudri envoie le palet vers Peter Valier dans le slot et Dylan Fabre vient appuyer pour pousser le palet avec la botte droite du gardien Gianluca Vallini (0-1). Ce dernier prend ensuite sa revanche sur Fabre en collant bien son poteau. Mais la seconde moitié de la première période est dominée par l’Italie. Dustin Gazley, l’Américain naturalisé qui débute sous le maillot italien (à 35 ans !) dans l’optique des JO, égalise d’un tir anodin de la ligne bleue qui échappe pourtant à Raphaël Garnier (1-1). Une minute et demie plus tard, l’Aostois Tommaso De Luca fait un de ses mouvements soudains caractéristiques pour se décaler dans un nuage de glace et envoie un missile… qui frappe le bas de la barre transversale. La France est impuissante sur son deuxième powerplay.
Au retour sur la glace, c’est au tour de Lucien Onno de faire résonner la transversale. Ce départ prometteur est vite gâché par des fautes de Vincent Llorca (crosse haute) et Kevin Bozon (faire trébucher) qui laissent les Bleus en double infériorité pendant 1’37. Ils s’en sortent et n’accordent que des tirs de la bleue, guère précis, à la paire défensive de Schwenningen Trivellato-Larkin. Au retour à 5 contre 5, Vincent Melin se projette à l’offensive sur une belle contre-attaque et convertit la passe de Valentin Claireaux (1-2). Mais trente secondes plus tard, le local Tommaso De Luca fait une belle décisive pour Diego Kostner et l’attaquant d’Ambrì-Piotta égalise du revers (2-2). La France tue deux pénalités de Kevin Bozon (faire trébucher, encore) et Valier (retenir). Dylan Fabre essaie de profiter du changement de gardien mais Davide Fadani, à peine rentré, signe une intervention décisive à froid. Une rugueuse obstruction est sifflée contre Rein en fin de tiers, mais c’est l’Italie qui a les meilleures occasions en infériorité numérique : Kostner tire sur l’extérieur du poteau, mais Daniel Glira finit par marquer à une seconde de la sirène sur une contre-attaque collective.
Un temps en infériorité après un cinglage de Ritz, l’équipe de France se retrouve à son tour à 5 contre 3 au troisième tiers-temps avec Tommaso De Luca (dureté) et Diego Kostner (faire trébucher) en prison. Mais l’Italie résiste bien aux tentatives de Tavernier et Claireaux car son gardien Fadani fait une belle rentrée. Il n’est pas le seul : Martin Neckar a aussi pris la place de Garnier pour ce dernier tiers-temps et réussit ce court début en préservant sa cage inviolée. Il signe une belle prestation et a aussi un peu de réussite : Brunner tire sur le poteau et un but de Mantinger est annulé par les arbitres à quatre minutes de la fin alors que le palet a franchi la ligne.
L’Italie prend finalement sa revanche sur un score symétrique à la veille, le but en cage vide en moins. La France remporte la séance honorifique de tirs au but : Colomban est le seul à marquer et Neckar emmagasine ainsi de la confiance. Le bilan reste mitigé pour l’équipe de France. La performance positive inattendue est à mettre au crédit de Vincent Melin qui s’est illustré ce week-end. L’attaquant le plus dangereux aura été Dylan Fabre, ce n’est pas surprenant en soi mais c’est bien qu’il transpose ses qualités évidentes sous le maillot bleu car on rappelle qu’il n’a encore mis aucun point en deux championnats du monde. Les Bleus sont plus loin de leur échéance que les Azzurri mais il faudra qu’ils élèvent très vite leur niveau pour ne pas subir les railleries habituelles de la presse suisse : dès vendredi, c’est un tout autre niveau de jeu qui les attendra à Bâle.
Désignés joueurs du match : Diego Kostner pour l’Italie et Vincent Melin pour la France.
photos d’Emmanuel Giraudeaux
Match 1
France – Italie 4-2 (1-1, 1-0, 2-1)
Samedi 13 avril 2024 à 19h30 au Palais des sports de Megève. 2273 spectateurs.
Arbitres : Philippe Frossard et Clément Goncalves assistés de Vincent Zede et Yohann Creux-Beaugiraud (FRA).
Pénalités : France 4′ (0′, 0′, 4′) ; Italie 6′ (0′, 0′, 6′).
Tirs : France 29 (16, 4, 9) ; Italie 29 (8, 12, 9).
Évolution du score :
1-0 à 08’03 : Claireaux assisté de Melin et Llorca (sup. num.)
1-1 à 12’17 : Purdeller
2-1 à 29’28 : Fabre
3-1 à 41’07 : K. Bozon assisté de A. Dair
3-2 à 51’48 : Brunner
4-2 à 58’46 : A. Dair assisté de Claireaux et Thiry (cage vide)
Match 2
Italie – France 3-2 (1-1, 2-1, 0-0)
Dimanche 14 avril 2024 à 19h30 au Palaghiaccio d’Aoste. 450 spectateurs.
Arbitres : Andrea Benvegnù et Omar Piniè assistés de Paolo Brondi et Matthias Cristeli (ITA).
Pénalités : Italie 10′ (4′, 2′, 4′) ; France 12′ (2′, 8′, 2′).
Tirs : Italie 29 (11, 12, 8) ; France 27 (10, 8, 9).
Évolution du score :
0-1 à 07’54 : Fabre (sup. num.)
1-1 à 12’34 : Gazley assisté de Finoro
1-2 à 25’08 : Melin assisté de Claireaux et Bougro
2-2 à 25’40 : D. Kostner assisté de M. Marchetti
3-2 à 39’59 : Glira assisté de Mantenuto et Gazley (inf. num.)
Composition des équipes
France
Attaquants :
Loïc Farnier (-1, 2′) – Valentin Claireaux (C) – Tomas Simonsen (+2) [puis Tavernier au match 2]
Dylan Fabre – Adel Koudri – Peter Valier (-1, 2′)
Kévin Bozon (+2, 4′) – Nicolas Ritz (A, +1, 2′) – Aurélien Dair (+1)
Robin Colomban (-1) – Jordann Bougro – Téo Sarliève
Emil Tavernier (-4)
Défenseurs :
Yohan Coulaud (+1) [puis Bourgeois au match 2] – Thomas Thiry (A)
Pierre Crinon (-1) – Lucien Onno (-1)
Vincent Melin (+2, 4′) – Vincent Llorca (+2, 2′)
Fabien Bourgeois (-2)
Gardien au match 1 :
Sebastian Ylönen (27/29)
Gardien au match 2 :
Raphaël Garnier (20/23) puis à 40’00 Martin Neckar (8/8) [sorti à 58’34]
Italie
Attaquants au match 1 :
Luca Frigo (-1) – Daniel Mantenuto (-1) – Dustin Gazley (-1)
Mathias Mantiger (-1) – Leonardo Felicetti (-1) – Tommaso De Luca (-2)
Davide Conci (-1) – Giordano Finoro (-1, 2′) – Marco Zanetti (-1)
Ivan Deluca (+1) – Tommy Purdeller (+1) – Pascal Brunner (+1)
Attaquants au match 2 :
Michele Marchetti (+1) – Diego Kostner (A, +1, 2′) – Tommaso De Luca (+1, 2′)
Giordano Finoro (+1) – Daniel Mantenuto (+2) – Dustin Gazley (+2)
Ivan Deluca (2′) – Dante Hannoun – Mathias Mantiger
Leonardo Felicetti – Tommy Purdeller (-1) – Pascal Brunner (2′)
Davide Conci (-1)
Défenseurs au match 1 :
Alex Trivellato (-2) – Thomas Larkin (C, -1)
Peter Spornberger (2′) – Phil Pietroniro
Lorenzo Casetti – Kris Pietroniro
Daniel Glira (-1) – Gregorio Gios (2′)
Défenseurs au match 2 :
Alex Trivellato (A) – Thomas Larkin (C)
Peter Spornberger (+1) – Gregorio Gios
Nicholas Cole Rein (2′) – Lorenzo Casetti
Daniel Glira (+2) – Kris Pietroniro (+1)
Gardien au match 1 :
Jacob Smith (25/28) [sorti de 58’19 à 58’46]
Gardien au match 2 :
Gianluca Vallini (12/14) puis à 28’36 Davide Fadani (13/13)