Après leurs trois défaites à Brno (dont un revers 1-4 contre ces mêmes Finlandais malgré une domination), les Tchèques réussiront-ils leur entrée dans leur championnat du monde ? Leur buteur Dominik Kubalík a vécu une journée folle : il est parti à la maternité de Plzen le matin, a assisté à la naissance de sa fille après déjeuner et est revenu à l’heure pour le match.
Les alignements sont donc ceux qui étaient anticipés aux entraînements. Titularisé deux fois le week-end dernier, le plus jeune et le moins expérimenté des trois gardiens, Lukáš Dostál, est bien le numéro 1 dans les esprits tchèques, avec Mrázek en n°2 et Vejmelka en n°3.
Dans le camp finlandais, la surprise vient de la présence de Juha Jääskä – un débutant aux Mondiaux – en première ligne : ce besogneux doit sans doute ajouter un peu de gabarit aux côtés des petits Granlund et Puustinen. Le plus jeune Finlandais de tous les temps dans la compétition Konsta Helenius (dont l’anniversaire est demain) attendra d’avoir 18 ans pour débuter en championnat du monde : il est en tribune.
Les Tchèques tiennent à imposer leur jeu d’entrée. Ils arrivent bien à passer la ligne bleue, mais c’est ensuite que ça se complique face à une défense compacte. Les tentatives majeures sont amenées depuis l’arrière de la cage par Ondřej Beránek et Tomáš Kundrátek, mais l’excellent positionnement du gardien Harri Säteri laisse peu d’ouverture. Au quart d’heure du jeu, Matěj Stránský fait la différence individuellement et s’infiltre jusqu’au but en dribblant Axel Rindell, mais Säteri étire la jambière. Juste avant la pause, le gardien de Bienne pare aussi du gant une puissante reprise de Libor Hájek, servi de derrière la ligne de fond par David Tomášek.
De l’autre côté, presque rien. La Finlande a eu quelques présences installées en début de match, mais les tirs lointains, même bien déviés, n’ont pas atteint leur cible. Un seul tir cadré est comptabilisé en vingt minutes… et il aurait bien pu aller au fond. Le lancer de Mikko Lehtonen est dévié de justesse par l’épaule gauche de Lukáš Dostál, pour son seul arrêt.
Pour percer la cuirasse finlandaise en deuxième période, les Tchèques devront venir jouer des coudes dans le slot encombré. Le géant Jáchym Kondelík, l’invité-surprise de cette équipe, s’y place et hérite d’un palet qu’il essaie de mettre entre le poteau et Säteri, mais celui-ci a un bon réflexe de la botte. Pendant leur premier avantage numérique (Rissanen a fait trébucher Sedlák), les blancs ne restent jamais installés plus de vingt secondes.
Mikko Lehtonen a vu à deux reprises un joueur partir dans son dos sur une longue passe, mais si Voženílek l’a débordé avant que son tir ne se perdre dans les limbes, le défenseur de Zurich prive Sedlák du palet par un bon poke-check (l’attaquant de Pardubice avait aussi une solution de passe vers Červenka). Le jeu se résume simplement ainsi : les Tchèques sont toujours inefficaces pour convertir leurs occasions, les Finlandais n’en ont aucune.
Rien de passionnant à voir, sauf à admirer le travail remarquable de tous les défenseurs finlandais pour pousser le moindre Tchèque positionné dans leur enclave. Si vous avez des meubles à déménager, je vous conseille les adresses de Messieurs Rissanen et Vittasmäki en particulier. Bon, il est possible qu’ils soient un peu chers…
Il n’y a pas de place devant le but, mais il y en a derrière : c’est là qu’Ondřej Palát voit le palet lui arriver (via un David Tomášek dans l’incapacité de tirer tant il est coincé entre deux arrières bleus) et le place vite dans l’angle ouvert, faisant exploser de joie la patinoire et, dans leur loge, Jágr et sa compagne du moment. Fébrilité sur le banc finlandais, où les entraîneurs – dont les oreillettes doivent être en panne – font de grands signes vers le haut des tribunes où doit se trouver leur coach vidéo. Les arbitres s’impatientent, on leur répond que l’on prend un challenge. Le pari semble osé, certes Säteri est avancé et couché en avant parce qu’il a anticipé un tir de Tomášek, mais l’obstruction de celui-ci n’est pas évidente (beaucoup moins que sur le but allemand validé cet après-midi !) même si son patin vient toucher le bâton du gardien. Et pourtant, les arbitres retournent leur décision devant des tribunes éberluées. Le but tant attendu est annulé !
Le public n’a pas perdu son entrain et fait trembler les gradins par « qui ne saute pas n’est pas tchèque » en troisième période. Mais sur la glace, la physionomie du jeu a changé. Les Finlandais se sont mis à presser plus haut, ils gênent les sorties de zone tchèques et prennent pour la première fois la possession. Ont-ils usé leur adversaire, épuisé à force de frapper sur leur carapace, pour mieux le piquer ? Mais eux non plus ne semblent pas avoir de dard. Juha Jääskä fausse compagnie à Jan Rutta dans le coin et rentre dans le slot mais tire droit dans le gant de Lukáš Dostál.
Le 0-0 peut-il encore être évité ? À quatre minutes de la fin, après un effort de Daniel Voženílek pour entrer en zone offensive, la belle passe du revers de Matěj Stránský libère David Kämpf seul face au but – la plus belle position de but de la soirée – mais l’attaquant de Toronto bute sur Säteri qui s’interpose encore. Peu après, on assiste à une pénalité rare : quand Krejčík et Vittasmäki coincent le palet entre eux contre la bande comme s’ils allaient prolonger leur duel sans bouger jusqu’à la sirène, l’arbitre n’arrête pas seulement le jeu, mais les envoient tous deux en prison pour retard de jeu.
À une minute de la fin, Radko Gudas se fait percuter par Sedlak et Pakarinen en plein duel et reste au sol. Pendant ce temps, Björninen a le temps de tirer et Arttu Hyry de prendre un premier rebond face au but… avant que Gudas, qui s’est relevé, ne saute sur son dos pour le plaquer au sol. « Retenir » est un bel euphémisme ! Cela fait évidemment deux minutes de prison… dont 1’03’’ pendant la prolongation.
La Finlande aborde donc ce temps supplémentaire à 4 contre 3, un avantage indéniable. Le dégagement du revers de Michal Kempný vaut de l’or dans ces conditions. Les bleus ont quand même deux lancers dans le cercle droit : la tentative de Mikael Granlund n’est pas cadrée, le tir rasant de Mikko Lehtonen est détourné par le déplacement rapide de Lukáš Dostál.
Les Tchèques dominent la suite de la prolongation à 3 contre 3, mais les buteurs Tomášek (qui a débordé Puljujärvi) et Kubalík échouent sur Säteri, tout comme Kämpf idéalement lancé seul vers le but par e coup d’œil génial de Červenka. Et enfin, à 30 secondes de l’ultime sirène, Lukáš Sedlák, à 2 contre 1, choisit le tir… dans le masque du gardien ! Cette soudaine pluie d’occasions n’évite donc pas les tirs au but.
Oliwer Kaski et Oliver Kapanen chercheront tous deux à tirer entre les jambes de Lukáš Dostál, qui les a bien eus car il ferme très vite cet espace attirant. Ondřej Kaše transforme la première tentative tchèque avec un mouvement très rapide, parfaitement conclu du revers. Mikael Granlund tente la même, mais sans déstabiliser Dostal qui bloque son revers avec le bras. Les feintes de Krejčík et Puljujärvi sont bonns, mais les tirs moins précis. Ondřej Palát préfère lancer mais rate le cadre. C’est finalement le capitaine Roman Červenka qui fait sauter de joie 16 000 spectateurs, dont le Président de la République tchèque, avec un tir magnifique en lucarne. Le héros du soir Lukáš Dostál peut recevoir le prix de meilleur joueur des mains de la légende Jágr.
Désignés joueurs du match : Lukáš Dostál pour la Tchéquie et Harri Säteri pour la Finlande.
photos : Český hokej
Commentaires d’après-match :
Lukáš Dostál (gardien de la Tchéquie) : « Les gars ont livré une performance responsable et n’ont pas accordé grand-chose aux Finlandais en première période. Les gars ont fait du bon travail et il y avait beaucoup de chaleur, donc je n’étais pas froid du tout. J’essayais de suivre le rythme, j’étouffais un peu. J’ai été dans cette situation à plusieurs reprises – parfois on a beaucoup de tirs, parfois peu. Je suis content d’avoir pu y faire face. Le 4 contre 3 était peut-être le moment le plus difficile. Mais il faut se concentrer autant que possible pendant le match, chaque tir peut être un but. Nous avons parlé des tireurs de pénaltys avec [l’entraîneur des gardiens] Ondra Pavelec, il a pointé quelques gars. Deux d’entre eux ont fait exactement ce qu’il avait montré. Cela m’a clairement aidé, je l’en remercie. J’aime les pénaltys, je les fais à l’entraînement et ça me plaît. »
Radim Rulík (entraîneur de la Tchéquie) : « Le départ a été le même pour les deux équipes – une longue cérémonie et une grande pause entre l’échauffement et la glace. Les spectateurs ont été fantastiques, ils nous ont aidés à bien bouger. Mais ce n’est que le début de tournoi, il ne faut pas le surestimer. […] J’ai vu une mêlée devant le but, ce qui est bien, nous devons pousser dans le but, mais je ne pouvais pas juger si notre joueur était dans la surface de but et interférait ou non avec l’arrêt du gardien de but. Nous avons respecté la décision. [Si Kubalik] ne pouvait pas venir de Pilsen, nous aurions joué avec onze attaquants. Nous avions donc le jeu de puissance prêt sans lui, nous avons préparé toutes les combinaisons de la deuxième unité sans Dominik. Il n’était pas dans une situation facile, il n’avait probablement pas beaucoup dormi, ses pensées étaient un peu ailleurs. Dans l’ensemble, il l’a très bien géré. […] Pendant les six premières semaines, les enfants sont généralement pris en charge par les épouses. C’est pareil… »
Jukka Jalonen (entraîneur de la Finlande) : « Nous n’avions pas entendu ce qu’on devait challenger. Il y avait eu une situation similaire lors du match Slovaquie-Allemagne. À notre avis, c’était une faute claire, mais le but a été accepté. Nous avons passé le message. Les Tchèques aussi, ils avaient vu le match et se demandaient comment le but avait pu être accepté. c’est pour ça que nous n’étions pas sûrs, à cause que de ce qu’ils avaient fait dans ce match… néanmoins, nous devions prendre le risque, car c’était une faute claire à notre avis. »
Tchéquie – Finlande 0-0 (0-0, 0-0, 0-0, 0-0) / 2-0 aux tirs au but
Vendredi 10 mai 2024 à 20h20 à la O2 Arena de Prague. 17 413 spectateurs.
Arbitres : Andris Ansons (LET) et Mikael Holm (SUE) assistés de Nick Briganti (USA) et Oto Durmis (SVK).
Pénalités : Tchéquie 8′ (0′, 0′, 8′, 0′) ; Finlande 6′ (0′, 2′, 4′, 0′).
Tirs : Tchéquie 21 (4, 9, 8) ; Finlande 16 (10, 3, 3).
Tirs au but :
Finlande : Kaski (arrêté), Granlund (arrêté), Puljujärvi (arrêté), Kapanen (arrêté).
Tchéquie : Kaše (réussi), Krejčík (palet perdu), Palát (à côté), Červenka (réussi).
Tchéquie
Attaquants :
Roman Červenka (C) – Lukáš Sedlák – Ondřej Kaše (2′)
Ondřej Palát (A) – David Tomášek – Dominik Kubalík
Daniel Voženílek – David Kämpf – Matěj Stránský
Ondřej Beránek – Jáchym Kondelík – Jakub Flek
Défenseurs :
Michal Kempný – Jan Rutta
Jakub Krejčík (2′) – Radko Gudas (A, 4′)
Libor Hájek – Tomáš Kundrátek
David Špaček
Gardien :
Lukáš Dostál
Remplaçant : Petr Mrázek (G). En réserve : Karel Vejmelka (G).
Finlande
Attaquants :
Juha Jääskä – Mikael Granlund (C) – Valtteri Puustinen (+1)
Jere Innala – Oliver Kapanen – Jesse Puljujärvi
Patrik Puistola – Arttu Hyry (2′) – Pekka Jormakka
Saku Mäenalanen – Hannes Björninen – Iiro Pakarinen
Défenseurs :
Olli Määttä (A) – Mikko Lehtonen (A)
Rasmus Rissanen (2′) – Oliwer Kaski
Juuso Riikola – Vili Saarijärvi
Veli-Matti Vittasmäki (2′) – Jesper Mattila
Gardien :
Harri Säteri
Remplaçant : Emil Larmi (G). En réserve : Lassi Lehtinen (G), Ahti Oksanen, Konsta Helenius (A).