Les tournois de qualification olympique sont un cauchemar récurrent pour le Bélarus. Le pays n’a plus fini premier de son groupe depuis 1997. Il s’est qualifié en tant que deuxième de poule quatre ans plus tard dans une formule différente, et depuis, il a toujours été deuxième et éliminé. Sa seule participation aux JO en 2010 avait été obtenu grâce à un très bon classement IIHF qui le dispensait des qualifications !
Autant dire que les Biélorusses sont dans de petits souliers. Ils ont un nouveau sélectionneur, Craig Woodcroft, puisque son prédécesseur Zakharov n’a pas survécu au Mondial raté et à la défaite vécue comme humiliante contre la Grande-Bretagne. Le premier adversaire de ce TQO, la Pologne, est théoriquement d’un niveau inférieur aux Britanniques. Elle est ici grâce à une performance majuscule de son gardien naturalisé John Murray en préqualification contre le Kazakhstan. C’est un pays contre lequel il serait impensable de perdre, d’autant plus que c’est un voisin politiquement hostile (notamment en donnant asile à l’athlète Krystsina Tsimanouskaya qui se sentait menacée lors des derniers Jeux olympiques de Tokyo).
La différence individuelle de niveau est évidente entre les hockeyeurs des deux pays. Nommé capitaine, le jeune joueur de NHL Egor Sharangovich se signale une fois par un tir sur l’épaule droite du gardien. L’action la plus nette se produit quand la feinte d’Evgeni Lisovets laisse sur place son lent vis-à-vis Patryk Wronka en entrée de zone, mais son revers croisé à ras glace est détourné par la botte du gardien. Se sachant inférieurs, les Polonais se montrent toutefois assez disciplinés pour conserver le 0-0. Sur leur seule infériorité numérique, Grzegorz Pasiut obtient même une échappée, mais il la gâche quelque peu : il freine pour anticiper le retour du défenseur et décoche un tir sans grand danger.
En deuxième période, Shane Prince fait bêtement trébucher le défenseur Jakub Wanacki derrière la cage polonaise et prend la première pénalité du Bélarus. Alors qu’Usov et Sapego ont fait un bon travail de récupération du palet, Dmitri Bunitski le perd dans son enclave, à un endroit vraiment interdit : Pasiut se retrouve face à la cage mais se refuse encore à tirer, trop altruiste en servant du revers Pawel Zygmunt sur qui la défense se referme. Sharangovich part en prison dans la foulée mais la Pologne n’aura pas obtenu le moindre tir pendant ces quatre minutes à 5 contre 4 ! Est-ce parce que les blancs semblent incapable de saisir leurs occasions qu’il faut leur laisser des palets ? Passée la mi-match, le Bélarus se met pendant quelues minutes à subir le jeu et à concéder des positions de tir anormales. Un revers dans le slot du capitaine Krystian Dziubinski est difficilement repoussé par le gardien Danny Taylor. Les lignes rouges – modifiées par Woodcroft – commencent enfin à redevenir dangereuses mais Nikita Komarov reprend hors cadre le centre au second poteau d’Andrei Stas.
Il ne reste que vingt minutes au Bélarus, et Craig Woodcroft a visiblement demandé à ses hommes de pratiquer un forechecking très intense pour forcer leur destin. La domination est alors forte et une belle passe transversale de Francis Paré trouve le défenseur Ilya Solovyov qui tire à l’extérieur du poteau. Une déviation de Sharangovich reste ensuite dans les bottes du gardien. Pour que la Pologne marque, il faudrait un malentendu, mais on n’en est pas loin quand un tir de Bartosz Ciura dans un angle impossible fait résonner le poteau à dix minutes de la fin. Dans les cages polonaises, Matt Murray continue de multiplier les arrêts.
Et à cinq minutes de la fin, patatras ! La Pologne signe, contre le cours le jeu, un très beau but ! Le festival technique en entrée de zone d’Alan Lyszczarczyk – né en Pologne mais qui a grandi en Amérique du Nord – attire à lui trois joueurs biélorusses, et il décale alors sa gauche Filip Komorski dont le tir trouve un trou de souris entre les bottes de Taylor. Pas toujours convaincant face au but, Grzegorz Pasiut se montre ensuite malchanceux avec un tir qui frappe le poteau et passe ensuite devant la cage sans rentrer. Cela aurait pu faire 0-2, ce qui est aussi vrai sur un 2 contre 1 en infériorité de Zygmunt et Pasiut. Malgré un dernier one-timer de Paré, les derniers efforts biélorusses ne peuvent renverser la situation compromise.
Les supporters polonais peuvent chanter l’hymne national : c’est sans doute la victoire la plus significative de la Pologne dans ce siècle ! John Murray a fait encore plus fort qu’au tour précédent : 46 arrêts mais aucun but encaissé !
Désignés joueurs du match : Danny Taylor pour le Bélarus et John Murray pour la Pologne.
Commentaires d’après-match :
Craig Woodcroft (entraîneur du Bélarus) : « Félicitations à l’équipe de Pologne pour sa victoire. Mon équipe a fait beaucoup de bonnes choses aujourd’hui. Mais elle n’a juste pas pu marquer de buts. Avant tout, leur gardien a fait un grand match. Je pense que que nous avons parfois joué nerveusement. Nous n’avons pas toujours des tirs dans le bon timing, nous avons mis trop de temps à prendre des décisions. Nous savions que le match suivrait ce scénario, que l’adversaire jouerait en défense. Mais nous n’avons pas su battre le gardien de l’équipe de Pologne. »
Filip Komorski (attaquant de la Pologne) : « Nous avions été effacés non seulement par la majorité du monde du hockey, mais aussi par certains de nos supporters. Mais nous savions qu’avec une défense solide et le dévouement de chaque joueur pour se sacrifier devant les tirs, un but pourrait décider du match. Je suis très heureux de l’avoir marqué, mais j’aurais aussi été heureux si quelqu’un d’autre l’avait fait. La victoire dans un tel tournoi contre un adversaire de si grande classe nous apporte beaucoup de joie. Le match contre le Kazakhstan nous avons donné de l’espoir. Il était composé de joueurs de KHL comme le Bélarus. Nous nous sommes dit avant le tournoi que nous allions jouer dans une salle magnifique contre des bons joueurs de KHL ou de NHL. Nous voulions prouver que les Polonais peuvent aussi jouer au hockey. C’est vrai que 90% de nos joueurs viennent du championnat polonais, mais nous voulions montrer que le match contre le Kazakhstan n’était pas une coïncidence, quelque chose qui arrive une fois sur un million. »
Bélarus – Pologne 0-1 (0-0, 0-0, 0-1)
Jeudi 26 août 2021 à 15h15 à la patinoire Ondrej Nepela de Bratislava. 150 spectateurs.
Arbitres : Riku Brander (FIN) et Michael Tscherrig (SUI) assistés de Jonas Merten (ALL) et Jiří Ondráček (TCH).
Pénalités : Bélarus 4′ (0′, 4′, 0′), Pologne 4′ (2′, 0′, 2′).
Tirs : Bélarus 46 (14, 12, 20), Pologne 19 (7, 7, 5).
Évolution du score :
0-1 à 54’59 : Komorski assisté de Łyszczarczyk
Bélarus
Attaquants :
12-17-92 Aleksei Protas (-1) – Egor Sharangovich (C, 2′) – Shane Prince (2′)
15-91-16 Artyom Demkov (-1) – Francis Paré – Geoff Platt (-1)
97-23-21 Dmitri Buinitski – Andrei Stas (A) – Vladislav Kodola
19-80-71 Nikita Komarov – Ilya Usov – Aleksandr Pavlovich
Défenseurs :
51-10 Vladislav Kolyachonok – Nick Bailen (A)
14-94 Evgeni Lisovets (-1) – Vladislav Yeryomenko (-1)
89-41 Dmitri Korobov – Kirill Gotovets
39-2 Sergei Sapego – Ilya Solovyov
Gardien :
31 Danny Taylor [sorti à 59’00]
Remplaçant : Ivan Kulbakov (G). En réserve : 40 Aleksei Kolosov (G), 18 Kristian Henkel (D), 72 Vladimir Alistrov (A).
Pologne
Attaquants :
8-19-14 Aron Chmeliewski (A) – Krystian Dziubiński (C) – Dominik Paś
10-18-15 Pawel Zygmunt – Grzegorz Pasiut (A, +1) – Patryk Wronka
21-5-11 Alan Łyszczarczyk (+1) – Filip Komorski (+1) – Maciej Urbanowicz (+1)
7-23-28 Martin Przygodzki – Filip Starzyński – Mateusz Michalski
Défenseurs :
3-20 Bartosz Ciura – Marcin Kolusz (+1)
4-6 Patryk Wajda (2′) – Arkadiusz Kostek
2-17 Kamil Górny – Mateusz Bryk (2′)
12-24 Jakub Wanacki – Oskar Jaśkiewicz
Gardien :
29 John Murray
Remplaçant : 30 Ondrej Raszka (G). En réserve : 1 Michal Kieler (G), 26 Yauheni Kameneu (D), 22 Kamil Walega (A).