Les Américains étaient les favoris de ce championnat du monde des moins de 18 ans, comme presque toujours dans cette catégorie où ils bénéficient d’une préparation à longueur d’année dans leur programme de développement. Ils ont écrasé la compétition avec leur profondeur de banc sans égal : 8-3 face au Canada, 6-2 face à la Tchéquie, 10-2 face à l’Allemagne, 13-3 en quart de finale contre la Lettonie, 6-1 en demi-finale contre les Tchèques.
En l’absence des Russes suspendus, la seule question était de connaître leur adversaire en finale. La Suède, qui avait battu les États-Unis aux tirs au but en match de préparation, était a priori le candidat le plus sérieux. Elle avait débuté par un échec étonnant contre la Lettonie (2-3) mais elle a tout gagné depuis, battant deux fois au passage sa concurrente majeure, la Finlande. Il lui manque toutefois un de ses principaux talents offensifs. Leo Carlsson, dont la saison était annoncée terminée à cause d’une fracture du coude fin mars, était revenu au jeu début avril. Il avait mis 2 buts et 1 assist dans les deux premières rencontres de ce Mondial mais s’est blessé à la jambe et on ne l’a plus revu depuis.
Dès la troisième minute, un défenseur suédois se fait contrer dans sa zone et cette erreur est aussitôt exploitée : Devin Kaplan centre pour la reprise de Ryan Leonard au second poteau (1-0). Les Américains semblent avoir plus de vitesse et sont impressionnants pendant leur première… infériorité numérique. Le défenseur Lane Hutson surgit pour intercepter un palet et partir en contre-attaque. Puis c’est Devin Kaplan qui s’échappe en solitaire et voit son tir repoussé à son tour par Hugo Hävelid.
Alors que les États-Unis paraissent dominer, Isaac Howard perd le palet au passage de la ligne bleue face à Calle Odelius qui lance pour une transition immédiate Oskar Pettersson. Celui-ci entre en zone dans l’axe et prend un lancer balayé derrière le défenseur pour égaliser (1-1). Sur une attaque rapide de la première ligne suédoise, Noah Östlund s’infiltre entre les deux défenseurs américains, exécute une feinte rapide à droite face au gardien et marque du revers (1-2). Ce premier tiers-temps fou n’est pas terminé. Après cet exploit individuel, Frank Nazar III répond par le sien : il remonte toute la glace et marque dans le haut du filet dans un angle très fermé (2-2). Un mauvais but pour le gardien Hugo Hävelid, un des deux neveux de l’entraîneur national Magnus Hävelid.
Hugo Hävelid a largement de quoi se rattraper car il résiste aux périodes de domination américaine, notamment par sa capacité à lire les lancers dans le trafic. Il sauve parfois son équipe à lui seul, comme quand une fantastique passe de Cruz Lucius envoie le capitaine Rutger McGroarty en face-à-face, sans qu’il trouve la faille entre les bottes du gardien suédois. Chesley fait trébucher Lekkerimäki, mais l’infériorité américaine débute par une nouvelle contre-attaque solitaire de Charlie Stramel. Et pourtant, le powerplay suédois – qui a concédé beaucoup plus d’occasions qu’il n’en a créé depuis le début du match – concrétise par Öhgren qui envoie un tir-laser entre les jambières de Jake Augustine III (2-3).
L’indiscipline semble alors condamner les Américains. Une minute après la prison de Frank Nazar III, Cutter Gauthier accroche Lekkerimäki et laisse son équipe à 3 contre 5. Dans cette situation, Noah Östlund hérite d’une position de tir imparable dans le cercle droit (2-4). La Suède continue à 5 contre 4 et pourrait en finir, mais Salomonsson prend une pénalité. Pendant les quelques secondes à 4 contre 4, Ryan Chesley conserve le palet et sert du revers McGroarty pour un one-timer dans le cercle droit (3-4).
On est déjà à 30 tirs à 11 pour les États-Unis, qui n’ont pas l’intention de relâcher la pression dans la dernière période. Gavin Brindley s’infiltre à travers la défense suédoise mais est fait trébucher par Östlund. Pendant l’avantage numérique, le siège est sans répit mais Hugo Hävelid multiplie les parades de haut niveau. Le jeu se déroule uniquement dans la zone scandinave pendant près de dix minutes… mais il suffit d’une banderille, une seule. Après deux contres défavorables aux Américains installés, le capitaine Liam Öhgren – qui joue blessé depuis le début du tournoi ! – fonce dans l’axe, s’appuie en une-deux sur Jonathan Lekkerimäki pour piéger la défense adverse et feinte le gardien en un contre un (3-5).
Oscar Pettersson prend une pénalité indiscutable dans la foulée pour une charge contre la bande. Cette supériorité numérique peut encore tout changer, mais le tir en angle de Logan Cooley frappe la transversale. Un match peut tourner rapidement dans cette catégorie d’âge mais Hugo Hävelid reste impressionnant de concentration. La vivacité de Cooley provoque une dernière pénalité d’Östlund, mais le gardien en pleine confiance signe un arrêt-réflexe incroyable de la mitaine sur un rebond de McGroarty. Après cette action, le coach américain Adam Nightingale sort son gardien pour jouer à 6 contre 4… et McGroarty prend a revanche en marquant cette fois à bout pourtant, un tir touché mais pas arrêté par Hävelid (4-5). Mais la Suède gère bien le palet sur la fin de match alors que les Américains se précipitent (dégagement interdit, hors-jeu…). De derrière la ligne de fond, Mattias Hävelid dégage dans la bande vers Lekkerimäki qui part marquer seul en cage vide (4-6).
Explosion de joie pour la Suède, dont c’est seulement le second titre de championne du monde chez les moins de 18 ans. Immense frustration pour les Américains, dont les 51 tirs à 15 n’auront pas suffi face à un gardien en état de grâce en un contre un : nombre d’entre eux (nés en 2004) avaient été éliminés en quart de finale l’an passé avec une génération plus faible et quittent la catégorie sur un nouvel échec alors que leur année 2004 était attendue comme collectivement exceptionnelle.
Désignés joueurs du match : Rutger McGroarty pour les États-Unis et Hugo Hävelid pour la Suède.
Commentaires d’après-match :
Hugo Hävelid (meilleur joueur de la Suède) : « Les Américains ont mis beaucoup de pression sur moi. Ils ont essayé de distraire mon attention par divers moyens. Au contraire, cela m’a motivé encore plus et c’était amusant. Je vis pour jouer ces matches-là. C’était un match difficile, surtout physiquement, mais c’est le dernier match de la saison avec la médaille d’or au bout. Je devais tenir comme s’il en allait de ma vie. »
Rutger McGroarty (meilleur joueur des États-Unis) : « À ce moment, c’est dur. On pense à ce qu’on aurait pu faire différemment, au but qu’on aurait pu marquer. Vous savez, nous avons une super équipe et c’est une rude défaite. Au début, nous avons essayé de forcer leur défense à perdre des palets et à en mettre le plus possible sur leur gardien. Mais il a été fantastique. Nous avions les jambes, nous avions l’énergie, mais le résultat craint. »
Adam Nightingale (entraîneur des États-Unis) : « Je suis très fier de nos gars. Nous ne devons avoir aucun regret. Chapeau à eux. Ils ont un super powerplay et leur gardien a vraiment bien joué. C’est ce qu’il y a de dur avec ces tournois à élimination directe. Mais c’est une expérience précieuse pour ces gars parce que c’est un groupe qui va beaucoup gagner pour USA Hockey à l’avenir. »
Magnus Hävelid (entraîneur de la Suède) : « Nous y sommes allés graduellement, pas à pas. Nous pensions tous pouvoir y arriver. Nous savions qu’en plus de la performance de toute l’équipe, nous aurions besoin d’une grande performance de notre gardien et nous l’avons eue. Notre jeu en infériorité numérique a aussi été important. Nous étions menés au début, mais nous ne nous sommes pas autorisés à être trop négatifs. Nous savions que les Américains viendraient fort sur nous. Nous avons pris les présences les unes après les autres, et ça a fonctionné à la fin. Je reçois un message de félicitation après l’autre de la part des entraîneurs en Suède, mais la ligne entre le succès et l’échec est vraiment fine. Quand ça se passe bien, c’est facile de dire qu’on travaille bien. Oui, ce succès veut dire beaucoup pour le hockey suédois. Je suis fier de l’équipe, mais nous devons continuer à travailler dur. »
États-Unis – Suède 4-6 (2-2, 1-2, 1-2)
Dimanche 1er mai 2022 à 18h30 à Landshut. 2560 spectateurs.
Arbitrage de Marc Iwert (ALL) et Mike Langin (CAN) assistés d’Onni Hautamäki (FIN) et Torrington Wyonzek (CAN)
Pénalités : États-Unis 16’ (2’, 8’, 6’). Suède 14’ (0’, 2’, 2’+10’).
Tirs : États-Unis 51 (12, 18, 21). Suède 15 (3, 8, 4).
Évolution du score :
1-0 à 02’24 : Leonard assisté de Kaplan
1-1 à 12’09 : O. Pettersson assisté d’Odelius
1-2 à 13’12 : Östlund assisté de Lekkerimäki et Öhgren
2-2 à 15’56 : Nazar III assisté de Duke
2-3 à 31’59 : Öhgren assisté de M. Hävelid et Lekkerimäki (sup. num.)
2-4 à 35’14 : Östlund assisté de O. Pettersson et M. Hävelid (double sup. num.)
3-4 à 36’03 : McGroarty assisté de Cooley et Stramel
3-5 à 49’41 : Öhgren assisté de Lekkerimäki
4-5 à 56’49 : McGroarty assisté de Howard et Gauthier (sup. num.)
4-6 à 59’29 : Lekkerimäki assisté de M. Hävelid (cage vide)
États-Unis
Attaquants :
Cutter Gauthier (A, -3, 6′) – Logan Cooley (-2, 2′) – Jimmy Snuggerud (-3, 2′)
Isaac Howard (-1) – Frank Nazar III (4′) – Gavin Brindley
Rutger McGroarty (C) – Charlie Stramel (+1) – Cruz Lucius
Ryan Leonard (+1) – Cole Spicer (+1) – Devin Kaplan (+1)
Défenseurs :
Lane Hutson (-3) – Ryan Chesley (A, +1, 2′)
Tyler Duke (+1) – Seamus Casey (+1)
Charles Leddy (-1) – Seamus Powell
Hunter Brzustewicz (-1)
Gardien :
Kenneth Augustine III [sorti de 56’41 à 56’49, de 58’20 à 58’53 et de 59’13 à 59’57]
Remplaçants : Tyler Muszelik (G), William Smith. En réserve : Michael Chambre (G), Brady Cleveland (D), Marek Hejduk (A).
Suède
Attaquants :
Liam Öhgren (C, +2) – Noah Östlund (A, +1, 6′) – Jonathan Lekkerimäki (+2)
Otto Stenberg (+1) – Filip Bystedt – Oskar Pettersson (+1, 2′)
Alexander Tell – Fabian Wagner – Tim Almgren
Isac Born (-1) – Alexander Suzdalev – Rasmus Rudslätt (-2)
Défenseurs :
Jakob Norén (+1) – Mattias Hävelid (A, -1)
Dennis Good Bogg (-2, 2′) – Elias Salomonsson (-1, 2′)
Elias Pettersson (+3) – Calle Odelius (+2, 2′)
Gardien :
Hugo Hävelid
Remplaçants : Lukas Swedin (G), Theo Lindstein (D), Linus Hemström (A). En réserve : Alexander Hellnemo (G), Hugo Fransson (D), Leo Carlsson (A).