La cuvée 2023 de la finale de la National League tient toutes ses promesses. Mal embarqué après sa défaite à domicile lors de l’acte III, Genève-Servette a fait le nécessaire au match IV (remporté 2-3 à la Tissot Aréna) pour égaliser dans la série. Soumise aux incessantes vagues genevoises depuis le début de cette finale, la digue biennoise a fini par céder au cours du match V que les Grenats ont gagné sur le score fleuve de 7-1 ! Dans une série où les quatre premiers matchs se sont tous soldés par un but de différence, ce résultat apparaît comme une incongruité. Menant dorénavant par trois victoires à deux, Genève-Servette dispose ainsi d’une occasion d’être titré dès ce soir à Bienne.
Pourtant dans la Cité de Calvin, on garde la tête froide, à l’image de l’entraîneur Jan Cadieux, bien peu loquace malgré le résultat favorable : « C’est une victoire, c’est tout. Rien d’autre. Pour l’instant, c’est la journée de repos (…) qui compte. Le reste, je m’en fous » (Le Matin). Côté Bienne, on tente de minimiser l’ampleur de la défaite (« Juste un match de m**de » selon Yannick Rathgeb au micro de MySports) et de se projeter dans le match VI.
Pour cet acte VI, le staff de Bienne maintient sa confiance en Harri Säteri – pourtant chassé samedi soir après avoir encaissé quatre buts au deuxième tiers – devant le filet. Riley Sheahan est de nouveau en tribunes et Jesper Olofsson réintègre l’alignement. Concernant Genève, Giancarlo Chanton laisse sa place de 7e défenseur à Marco Maurer, de retour avoir purgé un match de suspension.
Comme on pouvait s’y attendre, Bienne ne tergiverse pas et se rue à l’attaque. Quinze secondes après l’engagement initial, Rajala se défait de Jacquemet à la ligne bleue et file vers Mayer mais le portier genevois couvre bien son angle. Quelques instants à peine après l’action de Rajala, Karrer hérite d’un puck dans sa zone. Le défenseur a de l’espace et en profite. Il prend de la vitesse, s’infiltre entre Olofsson et Yakovenko pour affronter Säteri qui pare sa tentative du revers. Contrairement aux matchs précédents, c’est Genève-Servette qui est à la manœuvre en ce début de rencontre. À la 5e minute, Jooris profite des espaces côté gauche pour s’enfoncer en zone offensive. Comme Karrer plus tôt, il parvient à passer entre les deux joueurs en défense (Forster et Künzle), pour repiquer vers le centre. Säteri doit étirer la jambière sur le tir du Canadien à licence suisse. Malgré l’enjeu de la rencontre, les deux équipes ne se laissent pas aller à un jeu attentiste. En zone offensive, Künzle met sous pression Hartikainen et lui dérobe le palet pour le remettre à Brunner. L’ancien des Red Wings et des Devils est en bonne position mais son tir est dévié par la canne de Jacquemet. L’ouverture du score est proche, lorsqu’en jeu de puissance, le palet descend jusqu’à Omark en bas de la zone mais Hartikainen – idéalement placé dans son « bureau » – manque le tir à bout pourtant.
Qu’à cela ne tienne, Genève-Servette semble prendre l’ascendant à la mi-tiers et va trouver l’ouverture. Grâce à un bon travail défensive de Jooris qui soulève la crosse de Schneeberger pour lui voler le palet, Hartikainen peut partir en contre. Le Finlandais temporise, attire Lööv à lui et dose une passe millimétrée à Omark qui s’amène dans l’axe. Pourtant pas le plus rapide sur les patins, le Suédois devance Schneeberger, contrôle et adresse un tir des poignets qui part dans le haut du filet de Säteri (0-1, 12’57’’)
Bienne réagit rapidement, Künzle amorce une descente à deux contre un avec Yakovenko qui butte sur Mayer. En fin de période, les deux équipes se procureront chacune une bonne occasion de but. Tout d’abord Miranda trouve la latte sur une remise de l’arrière du but de Winnik. Puis Hofer provoque un revirement de Praplan dans la zone offensive de Bienne. Il relaie avec Haas qui renverse vers Olofsson qui ne trouve que le plastron de Mayer.
Mené au score, Bienne rentre fort dans le deuxième tiers. Rajala dégaine en force de loin (sa spécialité). Le palet est contré par Jacquemet, part dans les airs et manque d’être rabattu par Hischier. Les Seelandais sont sur un temps fort et vont en profiter. Réinstallé dans son trio habituel avec Rajala et Sallinen, Kessler déborde Le Coultre d’un dribble intérieur-extérieur et remet au centre à Rajala qui contrôle et bat Mayer d’un magnifique tir du revers sous la barre transversale (1-1, 23’16’’).
Apathiques en ce début de tiers, les Grenats vont pourtant se procurer une (rare) bonne occasion. Pouliot délivre une longue passe qui traverse la zone neutre à destination de Smirnovs, mal couvert par Kessler et Grossmann. Le futur joueur de Kloten peut partir seul affronter Säteri mais sa tentative échoue dans les bottes du portier Biennois. Les pensionnaires de la Tissot Arena dominent les débats dans ce tiers et poussent Genève-Servette à la faute (3 pénalités concédées durant le tiers). Mais le box-play des Aigles se montre une fois de plus intraitable. Mayer doit tout de même donner de sa personne en contrant du casque un missile de Rajala. Stériles en jeu de puissance, les Seelandais vont réussir à passer l’épaule à forces égales. Après un changement de ligne, Delémont adresse une passe lumineuse depuis sa zone défensive à Hischier qui prend de vitesse Völlmin et Tömmernes et bat Mayer juste au-dessus du gant (2-1, 32’14’’). Bienne retrouve son efficacité au meilleur moment et regagne les vestiaires en position de force. Les hommes d’Antti Törmänen peuvent toutefois regretter leur incapacité à scorer en jeu de puissance, sans quoi l’écart aurait pu être plus important.
Genève-Servette a dépensé beaucoup d’énergie à défendre en infériorité numérique au cours du tiers médian et a du mal à se mettre en route pour la dernière période. De ce fait, les meilleures occasions sont biennoises. Bien trouvé par Künzle lors d’un contre, Olofsson se présente à la droite Mayer mais tire au-dessus. Dans la continuité, en contre, Hischier décale Künzle au second poteau. Le numéro 73 a la cage ouverte mais Mayer réalise un exploit en levant la jambière au dernier moment sur son déplacement latéral pour préserver le score. Genève-Servette tente de réagir en jeu de puissance en assiègeant le but de Säteri qui tient bon, notamment sur une frappe lourde de Vatanen. Le portier sera également vif de la mitaine sur une tentative rapprochée de Miranda.
Les Grenats reprennent le contrôle du palet dans la deuxième partie du tiers et on se retrouve dans une configuration que Bienne affectionne tout particulièrement : laisser le jeu aux Genevois et procéder par contres. C’est exactement ce qu’il va se passer. Forster parvient à empêcher une sortie de zone. Il relaie avec Olofsson qui renverse immédiatement vers Haas. Le capitaine de Bienne – muet depuis 12 matchs – part seul affronter Mayer qu’il bat après une belle feinte (3-1, 54’06’’). Genève-Servette se rue à l’attaque. Le palet reste bloqué en zone offensive, Filppula repère Tömmernes esseulé près du point d’engagement. À l’arrêt, le Suédois expédie un plomb qui transperce Säteri pour le but de l’espoir (3-2, 55’13’’). Genève pousse mais s’expose aux contres de Bienne. Rajala se créé une chance en solo mais bute sur Mayer. Avec 26 secondes à faire dans le match, Künzle inscrira le but de l’assurance dans la cage vide (4-2, 59’34’’).
Au bord du gouffre, Bienne s’impose avec la manière devant son public et s’offre un match VII dont le scénario s’annonce bien imprévisible. Pour la première fois depuis le début de cette finale, Bienne termine le match avec un plus grand nombre de tirs que Genève-Servette. Les Biennois font coup double : ils ont réussi à mettre derrière eux la gifle reçue au match V et ont peut-ête même repris le momentum. De leur côté, les Genevois ont perdu le rythme du match en deuxième tiers à cause de leur indiscipline et sont retombés dans leur travers en ne parvenant pas à se créer d’espace ni à jouer avec de la vitesse. Le rendez-vous est pris jeudi pour la Finalissima dans une patinoire des Vernets à guichets fermés.
Illustrations de Pierre Maillard
Commentaires d’après-match (dans Watson et Le Matin) :
Gaëtan Haas (attaquant, Bienne) : « C’était une belle performance de toute l’équipe. Nous avons joué au hockey pendant 60 minutes et nous avons été récompensés. J’étais un peu nerveux avant le match, (…). Mais l’énergie des gars a aidé à se débarrasser de ce sentiment. Si nous jouons notre hockey, nous avons aussi une chance dans le septième match. »
Yannick Rathgeb (défenseur, Bienne) : « On a déjà gagné là-bas dans cette finale. Et à chaque série dans ces play-offs, on est allé chercher deux victoires. »
Luca Cunti (attaquant, Bienne) : « C’est merveilleux avec les fans, toutes les séries éliminatoires. Nous avons bien joué dans le premier tiers, mais les occasions ne sont venues qu’après la pause. C’était un bon match de notre part. »
Arnaud Jacquemet (défenseur, Genève-Servette) : « Nous savions que Bienne serait forte. On a bien commencé, mais on a trop permis à partir du deuxième tiers. Aujourd’hui, nous n’avons pas fait assez pour gagner. »
Vincent Praplan (attaquant, Genève-Servette : « Après un premier tiers pas mal, je pense qu’on s’est un peu laissé prendre à leur jeu en deuxième période. C’est trop allé d’un côté à l’autre, leur gardien a été bon sur nos occasions et nous, on leur a offert trop d’espaces. Je ne sais pas s’il faut parler d’un passage à vide. C’était un match 6 face à une grosse équipe de Bienne, qui évoluait à la maison et jouait pour sa vie. Il ne fallait pas s’attendre à ce qu’ils se laissent faire et abandonnent. C’était clair qu’ils feraient un gros match. Il va falloir analyser et voir ce que nous devons améliorer. Jeudi, il faudra reprendre le contrôle, maîtriser davantage le puck, s’établir dans leur zone et dicter le rythme. On perdait 2-1 dans la série et on a réussi à revenir. Il y a beaucoup d’expérience dans ce vestiaire et je ne pense pas que ce septième match constitue un problème pour nous sur le plan mental. Nous devrons juste être honnêtes avec nous-mêmes et corriger ce qu’il y a à corriger. »
Jan Cadieux (entraîneur, Genève-Servette) : « Au début du deuxième tiers, on a un peu arrêté de patiner par rapport au premier et après, on a trop ouvert le jeu, on n’a pas été assez discipliné, regrette Jan Cadieux. Je ne sais pas si c’est la pression ou l’envie de trop bien faire, je pense surtout qu’on a trop voulu faire les choses de façon individuelle, à ce moment. Or, c’est en équipe qu’on gagne un match et c’est ça qui a manqué ce soir. »
Bienne – Genève-Servette 4-2 (0-1, 2-0, 2-1)
Mardi 25 avril 2023 à 20h00 à la Tissot Arena. 6562 spectateurs (guichets fermés).
Arbitrage de Mark Lemelin et Miroslav Stolc assistés d’Éric Cattaneo et David Obwegeser.
Pénalités : Bienne 6’ (2’, 0’, 4’) ; Genève-Servette 18’ (0’, 6’, 2’+10’)
Tirs : Bienne 32 (7, 11, 14) ; Genève-Servette 26 (10, 4, 12)
Évolution du score :
0-1 à 12’57’’ : Omark assisté de Hartikainen et Jooris
1-1 à 23’16’’ : Rajala assisté de Kessler et Yakovenko
2-1 à 32’13’’ : Hischier assisté de Delémont
3-1 à 54’06’’ : Haas assisté d’Olofsson et Forster
3-2 à 55’13’’ : Tömmernes assisté de Fippula et Jacquemet
4-2 à 59’34’’ : Künzle assisté de Rajala (cage vide)
EHC Biel-Bienne
Attaquants :
Toni Rajala – Jere Sallinen – Luca Hischier
Jesper Olofsson – Gaëtan Haas (C) – Fabio Hofer
Mik Künzle – Luca Cunti – Damien Brunner
Elvis Schläpfer – Etienne Froidevaux – Tino Kessler
Yanick Stampfli
Défenseurs :
Viktor Lööv – Yannick Rathgeb
Robin Grossmann – Alexander Yakovenko
Beat Forster – Noah Schneeberger
Noah Delémont
Gardien :
Harri Säteri
Remplaçant : Joren van Pottelberghe (G). Absents : Ramon Tanner, Jérémie Bärtschi, Simon Ritz, Luca Christen et Riley Sheahan (surnuméraires)
Genève-Servette HC
Attaquants :
Daniel Winnik – Valtteri Filppula – Marco Miranda
Noah Rod (C) – Tanner Richard – Vincent Praplan
Linus Omark – Josh Jooris – Teemu Hartikainen
Alessio Bertaggia – Marc-Antoine Pouliot – Deniss Smirnovs
Benjamin Antonietti
Défenseurs :
Henrik Tömmernes – Arnaud Jacquemet
Roger Karrer – Sami Vatanen
Simon Le Coultre – Michael Völlmin
Marco Maurer
Gardien :
Robert Mayer (sorti de 59’19’’ à 59’34’’)
Remplaçant : Gauthier Descloux (G). Absents : Yohann Auvitu, Christophe Cavalleri. Giancarlo Chanton, Daniel Eigenmann, Sandis Smons (surnuméraires), Eliot Berthon (blessé)