La Suisse a connu un beau parcours au tour préliminaire du Mondial, terminant pour la deuxième fois de suite première de son groupe. Elle n’a finalement connu qu’un faux-pas, lorsqu’elle a levé le pied la dernière journée contre la Lettonie, au grand malheur des Slovaques éjectés de la course des quarts de finale après la victoire balte sur la Nati.
Les hommes de Patrick Fischer peuvent être satisfaits mais le plus dur reste à venir : s’emparer pour la première fois d’un titre majeur. Le chemin est encore long, et cela commence par ce quart face à l’Allemagne, un adversaire que la Nati n’a plus battu en match à élimination directe, aux Jeux Olympiques comme aux Mondiaux, depuis 1992. S’il est un joueur particulièrement revanchard, c’est bien la légende Andres Ambühl (photo ci-contre), auteur de 4 buts durant le tournoi, toujours exemplaire à 39 ans mais aussi témoin des trois dernières éliminations par la Mannschaft.
La Suisse entend donc corriger cette erreur face à une équipe d’Allemagne qui a connu une dernière promenade de santé face à la France (5-0). La confiance semble au beau fixe pour les Allemands, même pour la star de Buffalo John Peterka, discret pendant une bonne partie du tournoi, mis sur la touche contre l’Autriche et recadré par le coach Harold Kreis. Peterka a finalement inscrit 6 points lors des deux derniers matchs, contre la Hongrie et la France.
La Suisse, même privée de l’attaquant Denis Malgin malade, entend bien prendre les devants rapidement, elle connaît dans les premières minutes de longues séquences dans le camp allemand. Un bon tir de Christian Marti est la première occasion du match. Mais c’est pourtant Maximilian Kastner qui va ouvrir le score pour l’Allemagne à la 7e minute, l’attaquant de Munich s’étant d’ailleurs créé une grosse occasion quelques instants plus tôt, la première pour son équipe. En entrée de zone, Kastner envoie un tir du poignet en se servant de l’écran de Glauser, le gardien Robert Mayer se fait surprendre alors qu’il avait pourtant un arrêt facile, le palet filant tout doucement dans le but (image ci-dessous). Coup dur pour la Suisse.
L’Allemagne parvient à conserver cette avance de 1-0 après vingt minutes, nettoyant bien devant le but de Mathias Niederberger. Tanner Richard et Nico Hischier, en bonne position, sont incapables d’en profiter.
La Suisse va revenir dans le coup en seconde période, et ce très rapidement… 47 secondes pour être exact ! La Nati réalise une forte présence dans la zone allemande en début de tiers, Jonas Siegenthaler allume une première mèche, repoussée par Niederberger, le palet lui revient de nouveau quelques secondes plus tard, le défenseur de New Jersey ne manque pas la cible cette fois-ci, marquant côté gant. La star allemande Moritz Seider ressort de cette séquence furieux alors que Fiala lui avait asséné un coup de crosse sur la main non sifflé par les arbitres.
La Suisse tente alors de creuser de l’écart, notamment par une déviation dangereuse de Niederreiter sur un tir de Marti. Mais la nervosité va gagner les deux équipes. Ambühl, pour un coup de crosse au visage, est sanctionné d’un 2’+2′. La Nati se montre néanmoins très active en infériorité et ne laisse que peu de chances aux Allemands, les quatre minutes sont tuées… mais Enzo Corvi rejoint à son tour la prison pour une crosse haute ! Une infériorité vite oubliée lorsque Moritz Seider percute violemment Gaëtan Haas, dans le dos et la tête contre le plexiglas : la star des Red Wings est expulsée !
La tension est au maximum, et la Suisse a désormais un avantage numérique de cinq minutes… dont elle ne va pas profiter ! Pire, John Peterka va donner l’avantage à l’Allemagne, servi plein champ, il trompe Mayer à 2’09 de la deuxième pause. Et alors que les Allemands jouent ensuite en infériorité après une obstruction de Szuber sur Miranda, ils parviennent à se créer un 2 contre 1, Wojciech Stachowiak sert alors Nico Sturm qui reprend de volée : 3-1 après deux tiers.
Au début du troisième tiers-temps, l’Allemagne ne se relâche pas malgré la forte pression suisse. Les Helvètes peinent à se créer des occasions franches, le lancer de Marco Miranda est dans un angle trop difficile, et Tanner Richard ne peut contrôler un palet brûlant dans le slot. À dix minutes de la fin, la Suisse fait le jeu mais manque de réussite, à l’image de Janis Moser, monté au poteau gauche, qui rate une occasion en or et le palet malgré une passe parfaite de l’opposé d’Enzo Corvi. Tout un symbole.
Alors qu’elle est acculée, la Mannschaft passe près du quatrième but pour l’une de ses rares incursions dans le camp suisse. Moritz Müller touche le poteau, Wojciech Stachowiak voit le palet dans ses patins mais est incapable de le glisser dans le but totalement ouvert (ci-dessous) !
À 3’33 de la fin, Patrick Fischer décide alors de sortir Robert Mayer pour un joueur de champ supplémentaire. Dean Kukan touche rapidement la transversale, mais Samuel Soramies et Maximilian Kastner ne sont pas loin de marquer en cage vide.
Ultime espoir pour la Suisse lorsque Jonas Müller rejoint la prison à 48 secondes de la fin après avoir balancé le puck en tribune. Mais les Helvètes sont incapables de s’installer, dégagement interdit pour Ambühl, un dernier arrêt de Niederberger et les Allemands exultent !
Sensation : l’Allemagne s’impose 3-1 face à une Suisse dominante en termes de possession mais brouillonne dans le dernier geste. Ce premier but encaissé par Robert Mayer, préféré à Leonardo Genoni aux performances plus flatteuses, qui a mis dans des conditions optimales l’Allemagne, fera jaser en Helvétie. Reste que le jeu défensif des Allemands a été absolument impressionnant. Quelle désillusion, encore, pour la Suisse alors que beaucoup confiaient qu’elle avait le meilleur alignement de ces dernières années, mais dont l’éternelle nervosité l’a condamnée. Sa malédiction se poursuit.
Pour la troisième fois ces treize dernières années, l’Allemagne rejoint le dernier carré des championnats du monde. Elle est montée crescendo dans ce tournoi, avec pour point de bascule la victoire contre le Danemark après trois courtes défaites contre les favoris du groupe. La voilà récompensée alors qu’elle retrouvera en demi-finale les États-Unis, vainqueurs en tour préliminaire 3-2.
Élus joueurs du match : Jonas Siegenthaler pour la Suisse, Maximilian Kastner pour l’Allemagne.
Trois meilleurs Suisses du tournoi selon leur entraîneur : Nino Niederreiter, Andres Ambühl et Christian Marti.
Commentaires d’après-match
Patrick Fischer (entraîneur de la Suisse) : « C’est une déception sans bornes. Je suis déçu de moi-même de ne pas avoir envoyé sur la glace une équipe qui joue mieux. Nous avons fait trois cadeaux, nous n’avons pas rester relâchés et jouer notre jeu, je me sens juste vide à ce moment. Nous avions l’avantage à égalité numérique, le but malheureux encaissé ne nous a pas rendu la partie facile et leur a donné en revanche plus de confiance. Ensuite, nous n’avons pas montré notre meilleur hockey et c’est ma responsabilité. Nous avions totale confiance en Mayer, surtout après sa saison avec Genève-Servette, il a bien joué ici aussi, nous avons pris cette décision ensemble. Je suis désolé pour lui qu’il ait pris ce premier but malheureux, mais il ne porte pas la responsabilité de la défaite. Ces derniers jours nous avons parlé de l’aspect mental, avant le match je n’avais pas l’impression que l’équipe était prête. Je ne suis pas du genre à tout envoyer balader, mais ce n’est pas qui décide si je reste. l’important, c’est la confiance des joueurs dans notre staff. Mes chefs prendront cette décision. »
Nico Sturm (attaquant de l’Allemagne) : « Je suis incroyablement fier de l’équipe. Nous avons traversé des situations difficiles mais marqué les buts dans les moments décisifs. C’est exactement ce dont nous avions besoin contre des équipes comme celle-ci. »
Suisse – Allemagne 1-3 (0-1, 1-2, 0-0)
Jeudi 25 mai 2023 à 16h20 à l’Arena Riga. 2896 spectateurs.
Arbitres : Andris Ansons (LET) et Tobias Björk (SUE) assistés de Onni Hautamäki (FIN) et Davis Zunde (LET).
Pénalités : Suisse 8′ (2′, 6′, 0′), Allemagne 29′ (0′, 27′, 2′)
Tirs : Suisse 30 (12, 9, 9), Allemagne 23 (10, 9, 4).
Évolution du score :
0-1 à 06’25 : Kastner assisté de Wissmann et J. Müller
1-1 à 20’47 : Siegenthaler assisté de Fiala et Kukan
1-2 à 37’51 : Peterka assisté de Kahun et Gawanke
1-3 à 38’27 : Sturm assisté de Stachowiak et J. Müller (inf. num.)
Suisse
Attaquants :
Kevin Fiala (-1) – Nico Hischier (A, -1) – Damien Riat (+1)
Nino Niederreiter (C, -2) – Enzo Corvi (-1, 2′) – Andres Ambühl (-1, 4′)
Marco Miranda – Gaëtan Haas (A, -1) – Dario Simion
Fabrice Herzog – Tanner Richard – Christoph Bertschy (-1)
Défenseurs :
Jonas Siegenthaler (+1) – Dean Kukan (+1)
Janis Moser (-1) – Andrea Glauser (-1)
Christian Marti (-1, 2′) – Romain Loeffel (-2)
Michael Fora
Gardien :
Robert Mayer [sorti à 56’27]
Remplaçants : Leonardo Genoni (G), Sven Senteler. En réserve : Joren van Pottelberghe (G), Tobias Geisser (D), Denis Malgin (A, malade). Substitué sur blessure : Calvin Thürkauf (épaule).
Allemagne
Attaquants :
Frederik Tiffels (+1) – Dominik Kahun (A, +1) – John Peterka (+1)
Samuel Soramies (-1) – Nico Sturm – Alexander Ehl (-1)
Marcel Noebels (A) – Maximilian Kastner (+1) – Daniel Fischbuch
Parker Tuomie (+1) – Wojciech Stachowiak (+1) – Justin Schütz (+1)
Filip Varejcka [entré sur la glace seulement comme substitut pour la prison de Seider]
Défenseurs :
Moritz Müller (C, -1) – Moritz Seider (-1, 5’+20′)
Jonas Müller (+2, 2′) – Kai Wissmann (+2)
Maksymilian Szuber (+1, 2′) – Leon Gawanke (+1)
Fabio Wagner
Gardien :
Mathias Niederberger
Remplaçant : Dustin Strahlmeier (G). En réserve : Maximilian Franzreb (G), Manuel Wiederer (A), Leon Hüttl (D).