C’était le moment que beaucoup attendaient avec une certaine appréhension : l’arrivée d’Elvis Merzļikins dans le camp de la Lettonie. Le gardien des Blue Jackets de Columbus reste sur deux saisons difficiles en NHL, depuis qu’il a signé un gros contrat. Son pays a obtenu sa première médaille mondiale sans lui. Et les fans ont durement ressenti ses déclarations au printemps dernier selon lesquelles sa priorité était de jouer pour Columbus, et pas pour l’équipe de Lettonie qui ne lui paie pas de salaire.
Merzļikins s’est expliqué. Il n’a pas répondu aux questions, il a fait un monologue de cinq minutes en annonçant que ce serait sa première et dernière interview car il ne parlerait plus aux médias. « Ce sera la dernière fois que je m’excuse si j’ai offensé quiconque l’an dernier par mon interview. Mais il n’est pas normal qu’en tant que Letton qui voyage en équipe nationale avec la plus grande joie et le plus grand amour, je ne veuille même pas rentrer chez moi. Parce que mon peuple, pour être franc, je ne dis pas qu’ils ne m’attendent pas, mais je ne me sens pas le bienvenu. C’est le sentiment que j’ai dans mon cœur – je ne me sens pas bienvenu dans mon pays. Je me souviens qu’il y a deux ans certains s’étonnaient que je dise que la Suisse était chez moi. J’ai plus de soutien des fans suisses que lettons. »
Le gardien de 30 ans a aussi exprimé son ressentiment quant aux déclarations de Rihards Cimermanis, le gardien de Zemgale (oui, celui qui avait commencé à faire douter Grenoble en Coupe Continentale). Dans un podcast, Cimermanis a raconté sa relation avec Merzļikins, son ancien coéquipier dans les équipes nationales U18 et U20. « Le fait que deux d’entre vous aient parlé à ce Cimer que je ne connais pas du tout… La dernière fois que je l’ai vu, c’était il y a 13-14 ans. Qui est-il pour dire que je ne suis pas un joueur d’équipe ? Et puis, aller avec un micro demander quel joueur d’équipe je suis… Je ne me suis jamais querellé avec aucun coéquipier, en équipe de Lettonie, à Lugano ou à Columbus. Je me suis battu à Lugano durant un entraînement [NDLR : avec Raffale Sannitz en septembre 2018 dans une vidéo diffusée sur Instagram] parce que c’est le hockey, il y a de la tension, des émotions. Après l’entraînement, nous étions ensemble au bar. »
« Vous avez fabriqué un Elvis qui n’existe pas. Cela me dépasse… Est venu le moment où ma grand-mère m’a appelé en larmes et a demandé ce que j’avais fait, pourquoi les gens parlaient tellement de son petit-fils. Je ne le mérite pas. […] Je ne suis pas venu ici pour causer des problèmes à l’équipe ou à la fédération. Mais j’ai dit à Kalvitis [le président de la fédération] que je devais le faire. Ils essaient tous de m’arrêter. Mais cette guerre entre les médias et moi, vous l’avez gagnée. Cette fois, j’abandonne. […] Je suis heureux d’être ici. Mais à l’aéroport j’ai marché tête baissée pour que les gens ne me reconnaissent pas. Parce que je ne sais pas, peut-être que quelqu’un va me frapper ou me dire quelque chose. Je ne veux pas me disputer dans la rue. Je veux rentrer à la maison, embrasser ma famille et m’amuser. Et c’est ce que j’ai fait ce matin. Maintenant je vais y aller et manger du šašlik [terme turc utilisé en Iran et en ex-URSS pour désigner des brochettes] car c’est tout ce que je veux. » Sur ces mots, Merzlikins a – définitivement – tourné le dos aux journalistes lettons.
Autant dire que cette interview abondamment commentée a éclipsé tous les autres thèmes pour l’équipe de Lettonie. Celle-ci a retranché dans l’indifférence les jeunes Artūrs Andžāns et Kristaps Skrastiņš, et s’est envolée pour la Suisse avec un renfort supplémentaire, Eduards Tralmaks, qui a inscrit 21 buts pour la lanterne rouge tchèque Kladno. Mais ce n’est apparemment pas suffisante pour rendre leur attaque dangereuse. Elle joue en supériorité numérique après une première pénalité de Fora, et plus encore quand Marc Marchon est expulsé pour avoir chargé par derrière Bindulis (blessé au bras après avoir violemment heurté a balustrade). Mais le seul joueur en bonne position – Tralmaks justement – manque son occasion et c’est la Nati qui marque pendant ses cinq minutes d’infériorité, par Tanner Richard qui remonte la glace et marque d’un tir du poignet.
La deuxième période est cataclysmique pour des Lettons qui perdent tous les duels. La Suisse déroule : tir de Christoph Bertschy dans la lucarne droite sur une longue relance d’Egli (2-0), lancer de Tyler Moy sur la barre puis but de Marco Lehmann dans une mêlée confuse, confirmé par la vidéo après un challenge letton (3-0), récupération de palet de Sven Senteler en zone neutre et tir sec dans la lucarne gauche (4-0), lancer de la bleue de Romain Loeffel (5-0).
Le malheureux gardien était Ivars Punnenovs, remplacé pour le dernier tiers-temps par Vitols. La Lettonie a enfin des occasions quand le match est plié, avec une transversale de Kristaps Zile et un but pour l’honneur de Renars Krastenbergs en contre-attaque à quatre minutes de la fin.
Les deux équipes quittent Lausanne (la fédération suisse ne s’attendait sûrement pas à voir le LHC si proche du titre en programmant ce match dans la cité vaudoise entre deux manches de la finale de championnat !) pour Kloten, où le public est à peine plus nombreux. Merzlikins est devant les filets, mais c’est beaucoup moins un évènement ici. Il s’incline après huit minutes face à Romain Loeffel qui fait une bonne feinte de tir à la ligne bleue puis tire précisément dans la mucarne droite (1-0). Un deuxième but est refusé à Tobias Geisser pour une obstruction sur le gardien.
La Lettonie est mieux dans son match sur le plan physique, elle est bien meilleure dans les duels, mais elle est toujours à court d’idées offensives. Elle n’arrive à marquer à aucun but et ses tirs sont souvent lointains et faciles à capter pour le gardien Reto Berra. Lorsqu’il le fallait, celui-ci a répondu présent et s’offre un blanchissage mérité.
En revanche, Elvis Merzļikins, souvent remonté contre le niveau de son équipe NHL qui a fait chuter ses stats, ne sera sûrement pas heureux de ce retour. Il fini la soirée avec à peine 73% d’arrêts, battu entre les bottes par Dario Simion après un superbe tic-tac-toe initié par Loeffel et Senteler, puis par Fabrice Herzog qui choisit le tir en partant à 2 contre 1 avec Senteler. Le dernier but est en cage vide (4-0).
Désignés joueurs du second match : Reto Berra pour la Suisse et Renārs Krastenbergs pour la Lettonie.
photos : SIHF et LHF
Match 1
Suisse – Lettonie 5-1 (1-0, 4-0, 0-1)
Vendredi 26 avril 2024 à 19h45 à la Vaudoise Aréna de Lausanne. 2474 spectateurs.
Arbitres : Stefan Hürlimann et Lukas Kohlmüller assistés de Nathy Burgy et Dominik Altmann (SUI).
Pénalités : Suisse 35′ (6′+5′+20′, 0′, 4′) ; Lettonie 12′ (6′, 4′, 2′).
Tirs : Suisse 31 (9, 15, 7) ; Lettonie 21 (4, 7, 10).
Évolution du score :
1-0 à 17’01 : Tanner assisté de Fora (inf. num.)
2-0 à 21’02 : Bertschy assisté d’Egli (sup. num.)
3-0 à 28’05 : Lehmann (sup. num.)
4-0 à 31’47 : Senteler assisté de Simion et Baragano
5-0 à 36’25 : Loeffel assisté de Bertschy
5-1 à 55’43 : Krastenbergs assisté de Ločmelis et Ri. Bukarts
Match 2
Suisse – Lettonie 4-0 (1-0, 1-0, 2-0)
Samedi 20 avril 2024 à 17h30 à la stimo arena de Kloten. 3166 spectateurs.
Arbitres : Stefan Hürlimann et Lukas Kohlmüller assistés d’Eric Cattaneo et Dominik Altmann (SUI).
Pénalités : Suisse 14′ (2′, 6′, 6′) ; Lettonie 12′ (2′, 2′, 8′).
Tirs : Suisse 12 (3, 4, 5) ; Lettonie 24 (3, 7, 14).
Évolution du score :
1-0 à 08’14 : Loeffel assisté de Haas et Kessler
2-0 à 33’31 : Simion assisté de Senteler et Loeffel (sup. num.)
3-0 à 44’19 : Herzog assisté de Baragano
4-0 à 59’42 : Kessler (cage vide)
Composition des équipes
Suisse
Attaquants au match 1 :
Fabrice Herzog (+1) – Sven Senteler (+1) – Dario Simion (+1)
Calvin Thürkauf (C) – Tanner Richard (+1) – Christoph Bertschy (+2, 2′)
Tyler Moy – Anders Ambühl (A) – Marco Lehmann
Mike Künzle – Thierry Bader – Marc Marchon (5’+20′)
Tino Kessler
Attaquants au match 2 :
Fabrice Herzog (+1, 2′) – Sven Senteler (+1) – Dario Simion (+1)
Marco Lehmann – Tanner Richard (+1) – Christoph Bertschy
Tristan Scherwey (C, +2) – Gaëtan Haas (A, +1, 4′) – Tino Kessler (+2)
Mike Künzle – Thierry Bader – Tyler Moy (2′)
Marc Marchon (2′)
Défenseurs :
Sven Jung – Dominik Egli (2′)
Samuel Kreis (+1, 2′) – Romain Loeffel (+1, 2′)
Tobias Geisser (+3) – Iñaki Baragano (+1)
Michael Fora (A, +2, 6′), avec au match 2 David Aebischer (+1)
Gardien :
Match 1 : Leonardo Genoni
Match 2 : Reto Berra
Remplaçant : Philip Wüthrich (G).
Lettonie
Attaquants au match 1 :
Roberts Bukarts (A, -1) – Haralds Egle – Kaspars Daugaviņš (C)
Oskars Lapinskis (-1) – Oskars Batna (-2) – Toms Andersons (-2, 2′)
Renārs Krastenbergs – Andris Džeriņš (-1, 2′) – Rihards Bukarts (-1)
Eduards Tralmaks (4′) – Filips Gundars Buncis – Rihards Marenis (2′)
Dans Ločmelis (+1)
Attaquants au match 2 :
Renārs Krastenbergs (-1) – Dans Ločmelis (-1) – Kaspars Daugaviņš (C, -1)
Eduards Tralmaks (-3) – Andris Džeriņš (-2) – Rihards Bukarts (A, -3)
Fēliks Gavars (2′) – Haralds Egle – Toms Andersons
Oskars Lapinskis (2′) – Filips Gundars Buncis – Rihards Marenis (4′)
Martins Laviņš
Défenseurs :
Ralfs Freibergs (A, -1) – Oskars Cibuļskis (-1)
Roberts Mamčics (+1) – Markuss Komuls (4′)
Kristofers Bindulis [au match 1] – Kristaps Zīle (A, -4)
Roberts Kaļķis (-1) – Arvils Bergmanis (-2)
Gardien :
Match 1 : Ivars Punnenovs puis à 40’00 Ēriks Vītols
Match 2 : Elvis Merzļikins [sorti de 58’56 à 59’42]
En réserve : Jānis Jaks (D, malade).