On le sait, l’équipe de France masculine en a un peu assez de se déplacer toujours dans les mêmes destinations depuis 20 ans pour les qualifications olympiques (Riga et Oslo) et de rentrer avec le même sentiment de frustration. L’équipe de France féminine est plus « neuve » dans ce domaine, elle n’a jamais participé aux JO et la perspective n’est devenu réaliste qu’avec ses progrès plus récents. Elle essaie donc depuis moins longtemps, mais n’a pas envie de revivre la même spirale. Avant son échec d’un but à Luleå en 2021, elle s’était déjà rendue sur l’île d’Hokkaïdo en 2017. C’était la première fois que les Bleues participaient au tour final de qualification, et elles ne faisaient pas encore le poids.
La perspective a un peu changé. Même si elles ont connu un changement de génération partiel après le dernier TQO, les Bleues sont plus fortes qu’il y a huit ans. Elles ont certes un peu reculé au classement mondial, mais elles tombent dans la poule où la tête de série est la plus prenable (sauf si l’on considère la tendance récurrente de l’Allemagne à trembler lors de cette échéance). L’écart avec le Japon s’est réduit. Les Asiatiques sont meilleures, mais les Françaises ne les considèrent plus comme imbattables et les ont battues en amical.
Bien sûr, la France se méfie de la vitesse des Japonaises, portées par un public pas très nombreux non plus en pleine journée en semaine. Le rythme du début de match est vite brisé quand Lore Baudrit glisse en poursuivant un palet en fond de zone et percute la balustrade genoux en avant. La joueuse d’Ingolstadt reste sur la glace et se relève en souffrance après l’arrivée du médecin. Après cette longue interruption, les deux formations repartent avec leurs premières lignes pour un engagement au centre de la glace. Sitôt entrée en zone sur le côté droit, Makoto Ito envoie un tir à travers les jambesde Pélissou qui surprend Justine Crousy-Théode juste au-dessus de la mitaine (1-0).
La bonne nouvelle est que Lore Baudrit reprend le jeu. Elle provoque d’ailleurs une occasion en prenant une mise au jeu en zone offensive et un tir dans l’axe, sur lequel Margot Huot-Marchand est bloquée sur le rebond. Le jeu s’est équilibré, mais Yumeka Wajima double la mise par un exploit individuel : elle dribble pour se placer entre les deux arrières dans le cercle droit et décoche un tir fulgurant dans la lucarne opposée (2-0). On voit Crousy-Théode s’éloigner de sa cage et souffler un grand coup pour évacuer la frustration et la pression.
La France courbe l’échine. En phase défensive, Estelle Duvin donne une charge avec la crosse à une Japonaise et ses coéquipières. Les joueses en blanc subissent, Crousy-Théode n’a pas le temps de gamberger car elle doit arrêter un slap de Shiori Koike et un tir d’Ukita bien avancée. C’est lorsque les Bleues ressortent la tête de l’eau qu’elles prennent le dashi (le bouillon). Baudrit met encore le danger sur la cage, mais elle est alors en retard au repli défensif. Les Japonaises exploitent parfaitement une situation à quatre contre trois, Ayaka Hitosato tire dans la botte droite de la gardienne et Yumeka Wajima arrive seule sur le rebond (3-0, ci-dessous).
Grégory Tarlé prend son temps mort pour remobiliser ses joueuses qui relèvent la tête en fin de tiers. Rappelons qu’il ne faut rien lâcher à la différence de buts. Même si la première place paraît s’éloigner, le meilleur deuxième sera qualifié pour Milan 2026 si l’exclusion de la Russie est confirmée. Une décision que l’IIHF a renvoyé au CIO après avoir elle-même prolongé d’un an la suspension russe. Les Bleues peuvent donc espérer le même strapontin – toujours incertain – que les garçons.
Les Françaises abordent la deuxième période dans le bon tempo. Manon Le Scodan repique de derrière le but puis Julia Mesplede essaie en tour de cage. Mais la troisième ligne est ensuite pressée dans sa zone, Baudrit deux fois puis Pelissou n’arrivent pas à sortir le palet. Ayaka Hitosato envoie à la cage, où Remi Koyama se démarque de Huot-Marchand et dribble Crousy-Théode pour réussir à marquer du revers dans un angle très fermé (4-0). Un quatrième but qui fait mal. La gardienne rémoise est alors remplacée par Margaux Mameri.
Un cinglage d’Akane Hosoyamada permet à la France de jouer pour la première fois en avantage numérique. Les Bleues mènent ainsi 6 tirs à 2 après sept minutes dans cette période malgré un score de nouveau défavorable. C’est alors qu’Akane Shiga, la star de Luleå, fait un festival : elle signe un premier dribble dans la défense, puis revient à la baguette trente secondes plus tard en jeu de transition. Shiga fixe Gabrielle de Serres, aimante le palet, attend que deux coéquipières arrivent devant le but et prend un lancer, que convertit Makoto Ito au rebond (5-0).
Clara Rozier fait trébucher Ito en zone neutre peu après mais la France tue la pénalité. Il faut continuer à y croire, en s’appliquant sur les choses simples. Les Bleues trouvent finalement l’ouverture sur un but sans fioritures mais magnifique : un centre de Sehana Galbrun parfaitement dévié avant le premier poteau par Julia Mesplede (5-1). La sirène retentit peu après, juste au moment où Marie-Pierre Pelissou fait trébucher Riri Noro derrière la cage.
La supériorité numérique n’est pas exploitée, mais au complet, en un éclair, Riri Noro vole le palet à Sophie Leclerc en zone française et décoche un tir en angle fermé dans le haut du filet de Mameri (6-1). Duvin laisse traîner sa crosse et fait trébucher l’arrière Akane Hosoyamada en sortie de zone. Le point positif du jour est que la France n’a encaissé aucun but en infériorité numérique. Mais ces forces coûtent sans doute cher par la suite. Le Japon s’installe aussi à cinq contre cinq et creuse l’écart avec un slap en lucarne de la ligne bleue (7-1). L’autrice de ce lancer dévastateur, c’est qui ? Seki !
Le premier but précoce encaissé a conditionné le match face à des joueuses rapides et habiles en transition. Mais quel que soit le scénario, la différence de qualité technique entre les deux équipes a été patente. L’équipe de France n’a jamais pu faire la différence individuellement, à l’instar d’Estelle Duvin qui n’est pas passée en un contre un. Et quand les Bleues se risquaient à plusieurs autour de la cage, elles s’exposaient en contre-attaque. Les Japonaises ont été redoutables d’adresse, dans leur qualité de tir, dans la gestion du palet, mais aussi dans leurs passes plus précises, essentielles à ce niveau. Le Japon est bien au-dessus mais la France doit se mobiliser face aux deux prochains adversaires pour entretenir son mince espoir olympique.
Japon – France 7-1 (3-0, 2-1, 2-0)
Jeudi 6 février 2025 à 15h30 à la Nepia Ice Arena de Tomakomai. 1069 spectateurs.
Arbitres : Melissa Doyle (USA) et Zuzana Svoboda (TCH) assistées de Laura Gutauskas (CAN) et Tina Saarimäki (FIN).
Pénalités : Japon 2′ (0′, 2′, 0′) ; France 8′ (2′, 4′, 2′).
Tirs : Japon 41 (15, 12, 14) ; France 24 (8, 9, 7).
Évolution du score :
1-0 à 02’03” : Ito assistée de Ak. Shiga et Aoi Shiga
2-0 à 07’30” : Wajima assistée de Koike
3-0 à 15’27” : Wajima
4-0 à 22’24” : Koyama
5-0 à 28’26” : Ito assistée de Ak. Shiga et Aoi Shiga
5-1 à 38’54” : Mesplède assistée de Galbrun
6-1 à 42’49” : Riri Noro
7-1 à 52’53” : Seki assistée de Hitosato et Ukita
Japon
Attaquantes :
Rui Ukita (+3) – Makoto Ito (+3) – Akane Shiga (+4)
Yumeka Wajima (+1) – Suzuka Maeda (+1) – Mei Miura (+1)
Riri Noro (+2) – Rio Noro (+2) – Remi Koyama (+1)
Yoshino Enomoto, Hiraku Yamashita
Défenseures :
Kohane Sato (+3) – Aoi Shiga (+2)
Akane Hosoyamada (A, +2, 2’) – Shiori Koike (C, +1)
Kanami Seki (+2) – Ayaka Hitosato (A, +2)
Gardienne :
Miyuu Masuhara
Remplaçantes : Riko Kawaguchi (G), Shiori Yamashita (D), Wakana Kurosu, Ai Tada (A). En réserve : Haruka Kuromaru (G).
France
Attaquantes :
Clara Rozier (A, -3, 2’) – Estelle Duvin (A, -3, 4’) – Manon Le Scodan (-4)
Chloé Aurard – Julia Mesplède (+1) – Sehana Galbrun
Emma Nonnenmacher (-2) – Lore Baudrit (C, -2) – Margot Huot-Marchand (-2)
puis à 40’00” Anaé Simon (-1)
Défenseures :
Sophie Leclerc (-1) – Léa Villiot
Lucie Quarto (-1) – Elina Zilliox (-2)
Marie-Pierre Pélissou (-4, 2’) – Gabrielle de Serres (-4)
Gardienne :
Justine Crousy-Théode puis à 22’24” Margaux Mameri
Remplaçantes : Léa Berger (D), Chloé Gentien, Lisa Cedelle (A).