C’est la revanche tant attendue : le Canada, battu au tour préliminaire par les États-Unis, espère bien remporter le match qu’il faut. Les Américains visent eux enfin un titre, le premier en senior depuis la Coupe du monde NHL en 1996.
Les quelques jours précédent le match ont été marqués par des incertitudes. La blessure, puis l’infection qui a renvoyé Charlie McAvoy chez lui, a laissé la défense américaine dans le doute. Toute la semaine, le staff a cherché un moyen d’aligner Quinn Hughes, qui avait du refuser sa sélection sur blessure mais semblait aller mieux. L’arrière des Canucks n’aurait pu jouer que si un autre défenseur était blessé ou malade ; finalement, il a été recalé par le staff médical de Vancouver. Les États-Unis ont appelé le défenseur des Devils Brett Pesce en réserviste, mais les six défenseurs de l’équipe étant aptes, il restera en tribunes.
Le match est marqué par les tensions internationales : à Montréal, l’hymne américain a été copieusement sifflé, suite aux déclarations fracassantes de Donald Trump ; puis, le match avait débuté par trois bagarres en neuf secondes. À Boston, l’ambiance est tout aussi électrique. Les déclarations du manager américain Bill Guerin ont attisé le feu : son souhait de voir le président américain assister au match n’est pas exaucé, mais l’équipe a reçu un appel téléphonique de Donald Trump avant le match.
Puis, lors des hymnes, la chanteuse Chantal Kreviazuk modifie volontairement les paroles de l’hymne canadien : au lieu de « In all of us command » elle chante « that only us command » ({mle pays] que nous seuls commandons), un chant de défi aux déclarations du fameux « 51e état » de Donald Trump qui prétend annexer son voisin.
Les joueurs tentent de masquer tout ce bruit ambiant autour de l’un des plus gros matchs de hockey depuis dix ans… Place au jeu !
Un premier tiers serré
Une tension qui transparaît sur la glace lorsqu’un premier palet est gelé par Jordan Binnington. Les joueurs se chauffent un peu, mais cela ne va pas plus loin. Sur l’engagement, Jake Guentzel décoche la première volée, servi par Jack Hughes, sans réussite. Puis, Hughes, servi sur un renversement de jeu, sert Auston Matthews en retrait pour un tir cadré.
Connor Hellebuyck répond avec deux arrêts, et le palet file à l’opposée où Zach Werenski déborde à gauche, forçant Binnington à un arrêt difficile. Colton Parayko récupère et repart dans l’autre sens, son attaque en surnombre n’est pas cadrée. D’un but à l’autre à toute vitesse !
On joue depuis moins de cinq minutes lorsque Nathan MacKinnon est servi le long de la bande par Thomas Harley. Il recule en haut du cercle, efface Brady Tkachuk d’une feinte et trompe Hellebuyck d’un tir lointain. Le gardien était masqué par le trafic, notamment de Sam Reinhart (0-1).
Le jeu devient plus physique, à l’image de l’échec-avant d’Anthony Cirelli. Le rythme et l’intensité du match s’accélèrent. À la mi-match, le Canada pousse. Hellebuyck sauve son camp de la botte après un tir lointain de Drew Doughty, puis de la chasse au rebond menée par Seth Jarvis. La réplique vient de Hughes, qui intercepte et tente de piéger le gardien en tour de cage. Puis, Matthew Boldy envoie Dylan Larkin en un-contre-un, lequel se heurte à la plaque du portier canadien. Les occasions pleuvent : Hellebuyck sort un double-arrêt de la jambière.
Après cette séquence, les deux défenses reprennent petit à petit l’ascendant. Il faut attendre la fin de tiers pour l’égalisation. Il reste trois minutes lorsque Auston Matthews récupère un palet envoyé au fond, tente un tour de cage et permet ainsi à Brady Tkachuk de bonifier le rebond dans le trafic (1-1). L’attaquant d’Ottawa continue ensuite à presser physiquement, à l’instar d’une lourde charge sur Harley. Le tiers se termine sur ce score de 1-1, dix tirs chacun : un bras de fer à haute intensité.
Le bras de fer continue
Le jeu reprend sur les mêmes bases : des duels et peu d’occasions avant la troisième minute, où deux palets frôlent la cage de Hellebuyck sur des actions de Mark Stone en sortant du fond, puis Brayden Point dans l’enclave. Deux minutes plus tard, Binnington est présent devant Hughes, au rebond sur le côté du but.
Ces duels s’enveniment petit à petit et quelques échauffourées surviennent. Les États-Unis finissent par passer l’épaule. Un tir de la bleue de Werenski est sorti par Binnington, sur Matthews. Le capitaine piège tout le monde en ne cherchant pas le tir ; le palet est envoyé dans le trafic vers Jake Sanderson et le défenseur des Senators ne rate pas l’aubaine, avancé entre les cercles (2-1).
Deux minutes plus tard, Vincent Trocheck se rend coupable d’un faire trébucher et offre au Canada son premier jeu de puissance. McDavid et MacKinnon mettent le feu dans la défense, avec Cale Makar derrière eux en distributeur. Pourtant, la meilleur chance est américaine, un deux-contre-un lancé par Dylan Larkin pour une volée de JT Miller. La supériorité s’achève avec un seul tir au compteur.
Le Canada pousse. Crosby au forecheck obtient un revirement, et MacKinnon lance du cercle. Il faut un retour de Jaccob Slavin pour priver Crosby du rebond devant la cage ouverte. L’égalisation ne tarde pas : sur un revirement dans la neutre, Mitch Marner percute et se recentre, piégeant la défense en remisant dans son dos pour Sam Bennett. L’ailier des Panthers a du champ et lève bien son palet dans la lucarne (2-2).
Et le bras de fer reprend, les deux défenses verrouillant encore plus le jeu… et les mises en échec étant plus appuyées. Chris Kreider percute Seth Jarvis, puis Brady Tkachuk, encore lui, pulvérise Drew Doughty. Le Canada prend plus le contrôle du palet et obtient deux chances, par Makar puis McDavid en slalom plein axe. Après deux tiers, les deux équipes sont à égalité 2-2, et également en tirs : 19-19.
Binnington décisif
Les espaces diminuent dans ce dernier tiers. Le jeu à la crosse coupe les passes et le bon placement des défenseurs limite les occasions. À la troisième minute pourtant, un rebond contre la bande profite à Guentzel, qui exploite un changement de ligne adverse pour filer au but. Binnington remporte son duel et, sur la présence suivante, repousse un tir lourd de Werenski. Réplique immédiate, avec un lancer masqué de Marner, dévié par Cirelli et stoppé par Hellebuyck. Puis, à la cinquième minute, le Canada trouve le poteau sur déviation de Brandon Hagel d’un tir de Makar !
Le public scande « USA, USA ! » et pousse son équipe dans ce match aux duels de plus en plus appuyés. Guentzel, très en vue, menace encore Binnington et les contacts physiques s’intensifient. Eichel, en embuscade près de la cage, n’est pas loin de donner l’avantage à son équipe. Les défenseurs se sacrifient pour bloquer les tirs, à l’image de Slavin devant son coéquipier des Hurricanes Jarvis. Une percée de Marchand, relayée par Bennett, revient sur Parayko dont le tir puissant est sorti par Hellebuyck.
Le match se ferme dans les dix dernières minutes, tant la défense américaine prive le Canada d’occasion – seulement 3 tirs en 18 minutes, et le quatrième est un lancer de MacKinnon du cercle gauche, bien bloqué par le gardien.
Le public fait entendre sa voix, alors que le speaker annonce la dernière minute. Marner obtient une belle chance mais choisit la passe au lieu du tir ; Makar a le dernier tir : prolongation !
McDavid donne la victoire à son camp
Une prolongation à cinq contre cinq débute. Jack Eichel se crée la première chance en angle fermé, imité à l’autre bout par Brandon Hagel. Les deux gardiens répondent présent.
Le Canada échappe à un surnombre sur un dégagement américain, à la grande colère du public. Puis, après trois minutes, Binnington réalise un arrêt miraculeux à bout portant lorsque Larkin renverse derrière la cage pour Guentzel, qui remise pour Matthews lancé plein axe. Marchand ne réussit pas à lancer dans son duel avec Guentzel dans la contre-attaque : cela patine fort des deux côtés !
Matthews, encore lui, expédie un tir puissant dans l’axe, sorti de la botte. Brady Tkachuk récupère sur le côté du but et le gardien des Blues, sort une improbable mitaine ! Sur l’engagement, le gant est encore de sortie sur un tir de Matthews, son 31e arrêt du match.
Le Canada l’a échappé belle, et cherche à repartir vers l’offensive. Une tâche ardue face à une défense américaine très bien placée. Un dégagement interdit va faire basculer la partie : un mauvais dégagement de Nelson, que va chasser Hugues, devancé d’un pas par Point.
McDavid remporte la mise au jeu et tire, et le palet hors cadre revient à la bleue sur Makar. Le disque est renvoyé le long de la bande à l’opposée vers Marner, qui trouve McDavid entre les cercles, complètement oublié au marquage. Un tel joueur ne peut pas rater cette offrande et son tir en hauteur fait mouche (2-3).
Sur cette action décisive, la défense américaine commet plusieurs erreurs : Adam Fox repique au centre et oublie totalement Marner dans son dos ; puis, Matthews, battu à la mise au jeu, ne suit pas McDavid. De quoi alimenter les gazettes pendant des années…
https://x.com/frankcorrado22/status/1893022382337483023
La « Confrontation des Quatre Nations » s’achève donc par une victoire du Canada, encore une fois. C’est aussi une victoire de l’entraîneur Jon Cooper, que les caméras ont repéré lors du dégagement interdit ordonner à ses joueurs : « Que quelqu’un soit égoïste et tire au but ! » avant d’envoyer McDavid et Marner sur la glace, alors qu’ils ont passé le match sur des lignes différentes. Une prédiction payante.
https://x.com/BR_OpenIce/status/1893013271684211029
Ce qui était un tournoi vu par certains comme une opération marketing de la NHL – ce qu’elle est objectivement – s’est révélé une réussite spectaculaire. Elle a suscité l’adhésion des joueurs du Canada, des États-Unis, de la Suède et de la Finlande, tous impliqués à fond pour la défense de leurs couleurs. Tous ont produit un spectacle d’un niveau de jeu exceptionnel. Nombreux sont les acteurs à avoir avoué n’avoir jamais disputé de matchs aussi rapides. La vitesse et la technique ont rappelé à tout le monde ce qu’une confrontation entre les meilleurs joueurs du monde pouvait donner, eux qui n’ont pu s’affronter aux Jeux olympiques depuis 2014.
Une réussite totale aussi sur le plan des audiences, au Canada comme aux États-Unis. La finale a été regardée par 9,5 millions de téléspectateurs américains, un record pour un match de hockey sur glace en dehors des JO.
États-Unis – Canada 2-3 après prolongation (1-1, 1-1, 0-0, 0-1)
Tournoi des Quatre Nations, finale.
Jeudi 20 février 2025, 20h20. TD Garden de Boston, 17 850 spectateurs.
Arbitres : Chris Rooney et Gord Dwyer assistés de Scott Cherry et Jonny Murray.
Pénalités : États-Unis 2′ (0′, 2′, 0′) ; Canada 0′ (0′, 0′, 0′)
Tirs : États-Unis 33 (10, 9, 8, 6) ; Canada 27 (11, 8, 4, 4)
Récapitulatif du score :
0-1 à 04’48 : MacKinnon assisté de Harley et Reinhart
1-1 à 16’52 : B. Tkachuk assisté de Matthews
2-1 à 27’32 : Sanderson assisté de Matthews et Werenski
2-2 à 34’00 : Bennett assisté de Marner
2-3 à 68’18 : McDavid assisté de Marner et Makar
États-Unis
Attaquants :
Jake Guentzel – Auston Matthews (C, +1) – Jack Hughes (-2)
Brady Tkachuk (+1) – Jack Eichel (-1) – Matthew Tkachuk (A)
J.T. Miller (-1) – Dylan Larkin (+1) – Matt Boldy
Chris Kreider – Vincent Trocheck (2′) – Brock Nelson (-2)
Défenseurs :
Zach Werenski (+1) – Jake Sanderson
Jaccob Slavin – Brock Faber
Noah Hanifin (-1) – Adam Fox (-2)
Gardien :
Connor Hellebuyck
Remplaçant : Jake Oettinger (G). Réservistes : Kyle Connor (A), Charlie McAvoy (D, blessé), Jeremy Swayman (G)
Canada
Attaquants :
Brayden Point – Connor McDavid (A) – Mark Stone (-1)
Sidney Crosby (C) – Nathan MacKinnon – Sam Reinhart
Brandon Hagel (+1) – Anthony Cirelli – Mitch Marner (+2)
Brad Marchand – Sam Bennett (+1) – Seth Jarvis
Défenseurs :
Devon Toews – Cale Makar
Travis Sanheim – Colton Parayko
Thomas Harley (+1) – Drew Doughty (+1)
Gardien :
Jordan Binnington
Remplaçant : Adin Hill (G). Réservistes : Travis Konecny (A), Samuel Montembeault (G), Josh Morrissey (D, blessé)