Les deux pays qui se sont affrontés pendant trois finales de suite, un record historique des championnats du monde, se retrouvent cette année dès les quarts de finale. C’est parce qu’ils n’ont pas forcément eu les performances attendues.
Le Canada s’est mieux classé, deuxième de sa poule, mais le privilège des pays organisateurs l’oblige à se déplacer quand même à Tampere, chez son adversaire. Au moins sera-t-il sur place ce week-end s’il se qualifie pour le carré final. L’équipe à la feuille d’érable n’est pas éclatante sur le papier et n’a pas vraiment brillé sur la glace, mais c’était déjà le cas ces dernières années et on a vu les Canadiens se transformer en phase éliminatoire. Les performances du gardien Samuel Montembeault sont le point positif car elles ont donné confiance.
À l’inverse, la Finlande a quelques doutes sur son portier titulaire Emil Larmi. Plus généralement, elle n’a pas eu son assurance habituelle, même si la démonstration du dernier match contre le Danemark (7-1) l’a rassurée. Peut-être a-t-elle fini par se trouver, même si sa star Mikko Rantanen reste toujours à zéro but.
La Finlande s’empare de la possession et met son adversaire sous pression en début de match. Le Canada concède la première pénalité, une obstruction de Tyler Myers sur Suomela. Mais la Finlande n’obtient qu’un seul tir pendant ces deux minutes. Sitôt sorti de prison, Myers reçoit le palet de Neighbours, part sur l’aile gauche et le lui rend dans le cercle droit pour un one-timer. Emil Larmi se déplace très bien pour venir couvrir son poteau (photo ci-dessus).
Il sera moins à l’honneur une minute et demie plus tard. Jack Quinn contre-attaque et dribble un Atte Ohtamaa déséquilibré et place un tir soudain sous la botte droite de Larmi (1-0, photo ci-dessous). C’est la seule erreur du gardien finlandais, mais une erreur nette car ce tir aurait normalement dû être arrêté.
Le but donne confiance aux Canadiens qui déploient leur jeu en zone offensive. Une magnifique action de Sammy Blais à la dixième minute attire tous les défenseurs en milieu de zone et libère MacKenzie Weegar arrivant seul sur la droite du but, mais le gardien referme les jambes sur le revers du défenseur offensif. Samuel Montembault est pénalisé pour retard de jeu : il a pris le palet de la mitaine, l’a fait retomber pour le jouer, puis l’a gelé de nouveau quand un attaquant finlandais arrivait sur lui. Ce second jeu de puissance de la Finlande est meilleur que le premier, mais la paire défensive Middleton-Weegar fait de l’excellent travail pour contrer les tirs venus des cercles.
Les ailiers canadiens sont avides de contre-attaques pour déborder la défense locale, mais la qualité de leurs adversaires ne leur autorise aucun relâchement défensif. À l’avant-dernière minute, Mikko Rantanen déborde Tyler Toffoli en zone neutre et sert une passe transversale à Hartikainen dans le cercle gauche : Samuel Montembeault doit sortir un solide arrêt pour conserver ce 1-0 à la pause.
La Finlande commence la deuxième période de la meilleure manière, par une longue séquence en zone offensive qui crame la ligne canadienne dans sa zone, ne l’autorisant à sortir le palet que par un dégagement interdit. Désormais, les Leijonat réussissent de très belles combinaisons de passes. Mais il leur arrive aussi de commettre des erreurs. Määttä et Pesonen se font successivement contrer en zone neutre par Ethan Bear et Cody Glass, offrant un tir dangereux à Adam Fantilli arrivé seul à gauche du but.
Une minute après cette première alerte, et juste après un tir finlandais en jeu placé, Justin Barron renverse le jeu par un dégagement soulevé du revers que Pokka n’arrive pas à intercepter en plongeant, à quelques centimètres près. C’est un 2 contre 1 pour le Canada, Jake Neighbours attire Friman et décale Sammy Blais dans le cercle droit. L’attaquant de Saint Louis, qui réalise un excellent match, tire au-dessus de la mitaine de Larmi (2-0, photo ci-dessous).
La Finlande ne rend pas les armes et enchaîne trois énormes occasions en quelques minutes. Une longue relance de Miikka Koivisto envoie Kaapo Kakko en breakaway, mais l’ailier des Rangers de New York n’arrive pas à surprendre Montembeault par sa feinte et se retrouve à traverser la ligne de fond sans avoir tiré. Puis c’est un tir en angle de Mikko Rantanen qui rebondit sur la barre transversale.
Enfin, Kakko contre un tir de Weegar, part en 2 contre 1 et signe une merveilleuse passe aveugle qui décale Kasperi Kapanen seul face au gardien : son lancer est détourné du bord du gant par Montembeault (photo ci-dessous).
Le troisième tiers-temps débute par un coup sur la tête qui assomme les supporters finlandais. Michael Carcone est à l’origine de l’action puisqu’il envoie le palet au fond et met la pression sur Ohtamaa pour récupérer le palet. Carcone est aussi à la conclusion, servi par une passe transversale de MacKenzie Weegar.
Emil Larmi tente un plongeon désespéré sur ce tir de Carcone et voit Toffoli et Ohtamaa retomber sur lui dans une sorte de prise mutuelle de judo (3-0, photo de droite). Le coach finlandais ne demande pas son challenge, qu’il aurait probablement perdu, faute de contact direct entre l’attaquant canadien et le gardien.
L’équipe de Finlande continue de travailler comme à son habitude, en posant des écrans devant le gardien. Elle n’a pas l’étincelle, mais c’est encore plus vrai du public de Tampere. L’ambiance qu’essaie péniblement de mettre la sono paraît vraiment artificielle quand on la compare à la spontanéité et l’émotion intense qui agite les spectateurs à Riga.
On entend enfin des « Suomi Suomi » alors qu’on entre dans les cinq dernières minutes. Les Leijonat répondent à ces encouragements tarifs par un puissant lancer de Nikolas Matinpalo sur passe en retrait de Rantanen. Lorsque le coach finlandais Jukka Jalonen sort son gardien, Teemu Hartikainen – qui a perdu sa place en première ligne au profit de Kakko au troisième tiers – revit dans cette situation de 6 contre 5. Le grand gabarit, parfois emprunté ce soir, attaque la cage, et quand le dégagement de MacKenzie est contré par son coéquipier Middleton, Hartikainen en profite pour placer le rebond dans un trou de souris (3-1, photo ci-dessous).
Jalonen ressort évidemment son gardien une seconde fois. Un centre de Manninen en angle fermé est détourné par le poteau ou le gardien… Tyler Toffoli hérite du palet et le remonte avec beaucoup de patience pour viser la cage vide après avoir passé la ligne rouge médiane (4-1). Glass accroche Rantanen pour lui prendre la rondelle et marquer aussi dans les filets déserts, mais au lieu d’un but, il n’aura que deux minutes de punition sur sa feuille de pointage. Sans importance, comme les pénalités à la sirène (Kapanen et Myers).
Le Canada a su s’adapter à son adversaire pour frustrer la Finlande en coupant bien le milieu de sa zone défensive et en sachant utiliser sa vitesse. Cette fois la magie tactique du sorcier Jukka Jalonen n’a pas fonctionné, et la presse lui a reproché de s’obstiner à conserver une première ligne qui ne fonctionnait visiblement pas. Une formidable ère gagnante prend fin en Finlande, celle que symbolisait le mythe vivant Marko Anttila qui semble confirmer la retraite internationale suggérée ces derniers jours.
Désignés joueurs du match : Samuel Montembeault pour le Canada et Teemu Hartikainen pour la Finlande.
Trois meilleurs Finlandais du tournoi selon leur entraîneur : Mikko Rantanen, Sakari Manninen et Kasperi Kapanen.
Commentaires d’après-match :
Marko Anttila (capitaine de la Finlande) : « Difficile à analyser. Nous avons travaillé dur, mais les petites choses étaient contre nous. Je crois que c’est la fin. J’aurai 38 ans après-demain, donc les plus jeunes auront de meilleurs corps et plus d’énergie. »
André Tourigny (entraîneur du Canada) : « Nous avons essayé de jouer avec de la vitesse dans le forecheck pour perturber le timing des Finlandais. Ils sont si forts avec le palets, ils sont lourds et protègent bien le palet. Nous voulions être vraiment agressifs quand ils avaient le palet et leur prendre la possession le plus vite possible. »
Jukka Jalonen (entraîneur de la Finlande) : « Le Canada a été plus efficace quand il était en positions de but. Nous avons joué un bon hockey, il n’y a rien que nous puissions faire. Le résultat est ce qu’il est, plus rude que ce le jeu suggère. Il n’y a pas de si ou de mais, nous n’avons pas été assez efficaces. »
Mikko Rantanen (attaquant de la Finlande) : « Il y a eu de la foi et de l’effort. Chacun peut être fier de lui, mais les meilleurs ont gagné. Je suis vraiment agacé de cette inefficacité, dans laquelle j’ai joué un grand rôle. Le Canada a été plus clinique devant le but. Même en NHL, il y a eu de longues périodes où ça ne passe pas. L’esprit humain est ainsi fait qu’on commence à penser un peu trop à où tirer quand l’occasion se présente. Quand on passe, ça a l’air facile. À 1-0, nous avons eu beaucoup d’occasions d’égaliser. La contre-attaque du 2-0 a fait l’effet d’une douche froide, pour ainsi dire. Je veux revenir assez longtemps pour me battre pour la médaille d’or. J’ai joué quatre championnats du monde et je n’ai qu’une médaille d’argent. Là, je vais raccrocher mon téléphone mobile et laisser le hockey sur glace de côté pour deux ou trois semaines. »
Canada – Finlande 4-1 (1-0, 1-0, 2-1)
Jeudi 25 mai 2023 à 20h20 à la Nokia Arena de Tampere. 11529 spectateurs.
Arbitres : Christoffer Holm (SUE) et Jan Hribik (TCH) assistés de Nick Briganti (USA) et Daniel Hynek (TCH).
Pénalités : Canada 8′ (4′, 0′, 4′) ; Finlande 2′ (0′, 0′, 2′).
Tirs : Canada 31 (10, 8, 13) ; Finlande 28 (10, 9, 9).
Évolution du score :
1-0 à 07’12 : Quinn assisté de Crouse
2-0 à 30’45 : Blais assisté de Neighbours et Barron
3-0 à 42’54 : Carcone assisté de Weegar et Middleton
3-1 à 56’52 : Hartikainen assisté de Rantanen et Lehtonen
4-1 à 57’42 : Toffoli (cage vide)
Canada
Attaquants :
Milan Lucic (A, -1) – Cody Glass (+1, 2′) – Adam Fantilli
Lawson Crouse (+1) – Scott Laughton (A, +1) – Jack Quinn (+1)
Jake Neighbours (+2) – Peyton Krebs (+1) – Samuel Blais (+1)
Michael Carcone (+1) – Jack McBain – Tyler Toffoli (C, +1)
Défenseurs :
Jake Middleton (+2) – MacKenzie Weegar (+1)
Brad Hunt – Ethan Bear (+1)
Pierre-Olivier Joseph – Tyler Myers (+1, 4′)
Justin Barron (+1)
Gardien :
Samuel Montembeault (2′)
Remplaçant : Devon Levi (G). Réserviste : Joel Hofer (G). Suspendu : Joe Veleno (A).
Finlande
Attaquants :
Teemu Hartikainen (-1) – Sakari Manninen (-1) – Mikko Rantanen (A, -2)
Kaapo Kakko – Antti Suomela – Kasperi Kapanen (2′)
Harri Pesonen (-2) – Juho Lammikko (-1) – Joel Armia (-1)
Ahto Oksanen – Hannes Björninen (-1) – Marko Anttila (C)
Défenseurs :
Mikko Lehtonen (-2) – Atte Ohtamaa (-2)
Olli Määttä (A) – Mikka Koivisto
Mikael Seppälä – Ville Pokka (-1)
Niklas Friman (-1) – Nikolas Matinpalo
Gardien :
Emil Larmi [sorti de 56’34 à 56’52, de 57’07 à 57’42 et de 58’10 à 60’00]
Remplaçant : Jussi Olkinuora (G). Réservistes : Christian Heljanko (G), Waltteri Merelä, Jere Sallinen (A)