Le plus gros match du tournoi se présente devant les Bleus : la Slovénie, adversaire identifié dès le début comme le principal rival pour le maintien. Les deux équipes ont gratté un point jusque là, la France contre la Finlande et les Slovènes hier face aux Autrichiens.
Les deux équipes se ressemblent : des gardiens auteurs de matchs respectables, une attaque à 6% de réussite aux tirs, qui peine à se procurer des occasions. Les joueurs de Yorick Treille paraissent plus expérimentés que leur adversaires du jour dont la moitié dispute son premier mondial. Il faudra le montrer sur la glace. Quentin Papillon débute, et Charles Bertrand et Yohan Coulaud sont en tribunes.
Le début de match est tendu. La France a du mal à enchaîner ses passes et concède quelques tirs slovènes, contrés ou non cadrés. Les Tricolores mettent plusieurs minutes à réussir à produire du jeu. Une passe de Leclerc envoie ainsi Texier sur l’aile droite. L’ailier des Blues décoche… sur le poteau opposé ! Cela lance toutefois une présence active en zone offensive, ponctuée d’un nouveau tir de Texier avec écran devant Lukáš Horák, un essai de Boscq. Un temps fort positif, mais qui s’interrompt lorsque Bruche fait trébucher Drozg… et que Kevin Bozon fait trébucher Sabolic sur la pénalité différée !
À 3 contre 5, la défense française se place bien et gêne le jeu de passe adverse, qui peine à lancer au but. Il faut 1’15 avant que Papillon ne doive sortir une mitaine assez facile. Mais à 18 secondes du terme, Papillon bien masqué et Žan Jezovšek ouvre le score d’un tir en tête de cercle (0-1).
La pénalité contre Bruche n’est pas terminée et Cosic accroche Kevin Bozon, lançant un jeu de puissance français. Lent et maladroit, il ne donne rien. La France n’y est pas : Spinozzi cherche une passe latérale à la bleue mais Drozg a tout vu. Il s’échappe et Guebey l’accroche : penalty évident. Papillon sauve son camp en suivant bien le tireur.
La France continue à perdre des palets en entrée de zone. Mahkovec en profite pour une nouvelle échappée… sauvée par Papillon.
Il reste 3’39 et les Bleus perdent encore un palet en zone offensive. Mahkovec slalome dans la défense et efface Crinon qui s’est jeté sur la glace. Il trouve Kapel sur sa droite sous le nez de Boscq. Papillon sauve le revers, mais ne peut rien sur le rebond de Simsic, libre de tout marquage (0-2).
Nik Simsic makes it 2-0 Slovenia – rough go for France in this one. #MensWorlds pic.twitter.com/N3eWKEc22F
— Steven Ellis (@SEllisHockey) May 19, 2025
La fin de tiers voit la France tenter de revenir, des efforts stériles, la faute à une faiblesse technique, trop de palets perdus bêtement. Des revirements qui coûtent encore quelques contres, heureusement non convertis : 10 tirs à 5 pour la Slovénie, mais surtout 2-0. Après vingt minutes, les Bleus voient le spectre de la relégation se rapprocher sévèrement…
Le début de deuxième tiers n’est cependant pas rassurant. On y retrouve les mêmes erreurs : une passe latérale en bleue offensive interceptée, des passes approximatives et donc, du temps consommé dans la zone de Papillon. Ce qui n’aide pas, c’est évidemment le 1/17 aux mises au jeu…
Sur une rare incursion offensive, Texier est puni pour une obstruction en zone offensive. Drozg cherche une déviation dans le slot et Papillon gèle le palet pour la seule chance slovène : la défense a bien travaillé pour écarter le jeu.
Au retour à cinq, les joueurs de Yorick Treille tentent de repartir vers l’avant. Texier lance une banderille puis son tour de cage ne trouve personne en remise. Ensuite, Tim Bozon décoche du cercle droit, mitaine de Horák. Le gardien sauve ensuite un tir de Rech en pivot, lequel était parti dans le dos de la défense sur une longe passe de Gallet.
Les bons shifts s’enchaînent : travail de Boudon, Kévin Bozon et Boscq, nouvelles chances tricolores. Ensuite, Perret récupère et lance Texier sur l’aile gauche : le tir croisé n’est pas cadré. Les Bleus continuent à travailler, englués dans les bandes. Enfin, une mise au jeu gagnée permet à Boscq de lancer de la bleue : Horák s’impose, tout comme sur un tir de Rech en pivot.
La Slovénie n’a pas grand chose à faire valoir dans ce tiers en attaque : un poteau de Drozg un peu plus tôt, puis un tir de Ograjenšek et un rebond excentré de Gregorc. Puis, un contre de Simšič trouve Kapel en deux contre un… il ne cadre pas ! Ce sera la dernière occasion. Les Bleus ont mieux joué au deuxième, même si cela reste laborieux.
Boudon tente de donner l’exemple avec un tir croisé dès la reprise. Puis, Kévin Bozon provoque une nouvelle pénalité contre Beričič. Les Bleus s’installent. Gallet est mis en position plusieurs fois et Horák sauve quelques essais, sa défense contrant le reste.
À cinq contre cinq, la France campe dans la zone slovène, cherchant des déviations devant le but. Cela reste lent, laborieux face à une défense très bien regroupée. Les tirs s’enchainent, de loin, sans trop d’écran ni de précision. Pire, Matic Török parvient à partir dans le dos de la défense. Boudon, sorti du banc, vient au duel et est puni pour cinglage.
La situation est critique. La défense s’en sort bien, jusqu’à la toute fin d’avantage où Sabolič est libre au deuxième poteau. Papillon se déplace très vite et ne laisse pas de rebond. Dès le retour au complet, alors qu’il reste moins de six minutes, les Bleus repartent en zone offensive et multiplient les tirs de loin, cherchant encore les écrans. Le temps défile, adversaire bien plus coriace pour des Bleus désemparés.
Une longue passe envoie Texier en un-contre-un et son tir n’échappe pas à Horák à 2’31” de la fin. Temps mort de Treille, qui fait sortir Papillon. La France échappe à la correctionnelle lorsque la Slovénie trouve le poteau face à la cage vide. Les Bleus repartent à l’assaut, bataillent sur un palet en haut du cercle que Magovac a manqué de sortir de la zone. Tim Bozon en sort vainqueur, s’avance et trompe Horák entre les jambes à 1’54 de la fin (1-2).
Sur l’engagement, Bellemare est touché et prend du temps pour se relever. Les Bleus s’accrochent et s’installent, font tourner avec patience. Ils n’arrivent pas à percer le premier rideau. Puis, Leclerc perd un palet et Török achève la France à 15 secondes de la fin, cage vide (1-3).
C’est donc le cœur lourd que les Bleus disent au revoir à l’élite du hockey mondial. Déjà sonnée en 2019, et repêchée en raison de l’exclusion de la Russie et de la Biélorussie suite au conflit en Ukraine, la France n’a pas échappé à la correctionnelle, cette fois. Si des progrès ont été remarqués en début de tournoi en défense face aux grosses nations, au point de frôler l’exploit contre la Lettonie, la Slovaquie et surtout la Finlande, les Bleus ont été plombés tout le tournoi par leur inefficacité chronique en attaque. Face à l’Autriche et face à la Slovénie, les Bleus ont mis bien trop de temps à rentrer dans le match. Une fois menés, ils se sont englués dans les défenses adverses où leur déchet technique les a privé de situations dangereuses. Il a aussi manqué un « tueur » devant – la blessure de Dylan Fabre n’ayant rien arrangé au top-6.
Le Mondial de division 1A aura lieu en Pologne : est-il temps de reconstruire, à l’orée des échéances de 2028 et 2030 ? Nul doute que la Fédération va devoir analyser cette débâcle et en tirer les bonnes leçons.
La Slovénie reste donc en élite : c’est la première fois que le pays se maintient en élite depuis les Mondiaux 2005 et 2006. Le travail d’Edo Terglav, le plus français des Slovènes, a donc parfaitement payé.
Désignés joueurs du match : Jules Boscq (France) et Žan Jezovšek (Slovénie)
Commentaires d’après-match
Edo Terglav (sélectionneur de la Slovénie) : « Nous avions une équipe ! Pendant les cinq semaines de préparation nous avons parlé de ne pas avoir d’individualités, d’être solidaires et de travailler pour les autres. Nous avons parlé des étapes à franchir. C’est arrivé, les gars ont joué ensemble, avec du sacrifice, prêts pour tout. On savait que la France avait un jeu de transition rapide, des joueurs capables de faire la différence. On ne leur a pas laissé la possibilité de le faire dans la zone neutre, d’aller au centre et nous avons pu placer des contres. C’était notre journée, ce n’était pas celle de la France, qui n’avait pas d’émotion pour plus. Je suis content de rester en groupe A. »
Louis Boudon (attaquant de la France) : « Clairement, les deux buts dès le début n’étaient pas l’entame voulue. On a corrigé aux deuxième et troisième tiers, mais nous n’avons pas eu assez de réussite. Il y a eu trop d’imprécision et ils ne nous ont pas donné de jeux simples. Après les buts, on a changé de façon de jouer, en essayant d’en faire plus, alors qu’on aurait juste du rester dans notre système. On n’a pas mis leur gardien assez en difficulté. Nous n’avons pas été assez dangereux, pas assez mis le puck à la cage. Maintenant, il va falloir se poser les bonnes questions. On a cherché les points dès le premier match et ça se joue à peu, un match… Beaucoup de déception. »
Sacha Treille (attaquant de la France) : « C’est frustrant car j’ai eu l’impression qu’on avait progressé contre les gros, mais sans être récompensé, et contre des équipes de notre niveau, on manque d’opportunisme. Nous avions tous à cœur de nous présenter correctement par rapport à notre match contre l’Autriche. Mais on ne se présente pas, on concède des breakaways, un 5 contre 3, on ne se met pas dans les bonnes conditions. Tex’ a un poteau, il y a une crosse cassée sur un power-play alors qu’on avait une grosse chance, ça se joue à peu, mais tout vient du fait qu’on ne se présente pas au premier tiers contre l’Autriche et la Slovénie. Le début de tournoi, on aurait eu six points après trois ou quatre matchs, personne ne nous les aurait enlevés. Mais ce sont surtout ces deux matchs, Autriche et Slovénie, qui me restent en travers de la gorge. On a pu faire chier les plus gros, mais pas pu le répliquer. Pourtant le plan de jeu est le même. Alors oui, il y a un extra focus contre les gros car on sait que la moindre erreur est fatale, mais on a ce switch contre la Suède devant 14000 personnes, et pas contre la Slovénie qui est à notre niveau. Je ne sais pas si c’est la panique, mais là tout se joue sur un match et on est pas bons. L’intention au début du match devrait être la même, le plan de jeu devrait avoir du succès, on a de bonnes occasions. Mais il nous manque l’instinct du serial buteur. »
Pierre-Édouard Bellemare (attaquant de la France) : « Oui, c’est mon dernier Mondial, ça aurait déjà dû l’être l’an dernier mais ma femme m’a dit d’y aller ! C’est dur à avaler ce soir. Comme contre l’Autriche, on n’était pas présents, on ne commence pas le match. Je ne jette la pierre à personne… Le 5 contre 3, on n’était pas loin de le tuer, puis on ne suit pas le système de Yo, comme contre l’Autriche. Alors qu’avec ce système on a fait des matchs incroyables contre les grosses nations. On jouait mieux que ce match, mieux que contre les équipes contre qui on a nos chances. Ils nous battent ce soir car ils ont plus faim dès le départ. La plus grosse déception ce sont ces deux matchs. L’an dernier on prend une rouste contre les États-Unis mais on a joué là où il le fallait ensuite. Là, on était pas assez impliqués. On n’a pas compris que la pression était un privilège, que d’autres n’ont pas parce qu’ils sont sur leur canapé. J’ai fait groupe A, groupe B, c’est dur de remonter. Personne ne nous volait de matchs, on se battait. Là, on a pas réussi alors qu’on a un système incroyable, on n’a jamais travaillé comme ça. Les mises au jeu ont été un problème surtout au premier tiers, c’était mieux après. C’est un gros gardien en face, mais il voyait les tirs. Il n’y a rien de positif à dire car on descend, ça n’aurait pas dû arriver avec la qualité de cette équipe, même avec des absents. Le groupe B va peut-être donner un peu de rage. Le hockey français est sur une bonne lancée, ça fait mal pour toute une génération mais ça redonnera peut-être de l’envie. »
Yorick Treille (sélectionneur de la France) : « C’est dur de trouver les mots. J’ai dit aux joueurs que je partageais leur déception, leur tristesse. C’est un échec sportif. On gagne ensemble, on perd ensemble, cette expérience doit rester, on ne doit pas l’oublier. Cette performance fait que nous allons descendre d’un échelon après beaucoup d’années dans le groupe A. Comme en 2019, même si nous n’y sommes jamais allés pour les raisons qu’on connaît. Il faudra se servir de cela pour grandir, et aller de l’avant. J’ai remercié les joueurs ainsi que le staff pour son investissement. C’est une déception pour eux ainsi que pour tous les amoureux de hockey qui méritent une meilleure vitrine. Les joueurs ont tout donné, ils se sont battus. Ils sont passés à travers le premier tiers contre l’Autriche et la Slovénie et une fois menés, ils n’avaient plus les ressources physiques et mentales. La Slovénie, tout le monde savait qu’elle défendait bien, et on a pas réussi à entrer à l’intérieur, on a pas trouvé la solution. Quentin Papillon nous tient dans le match. Le jeu de puissance, c’est le gros échec du tournoi. Il faudra l’analyser. Il n’y a pas d’excuse, on n’a pas été assez bons. On a été proches de prendre des points plusieurs fois dans ce tournoi, mais seul le bilan comptable compte. Le sélectionneur est responsable de tout cela. L’aspect mental ? On n’a pas joué libéré et ça nous coûte des tirs à 3-0, 2-0. C’est dur de faire ce qu’on souhaite après, mais ces pays méritent, ils ont su faire ce qu’il fallait. C’est plus facile pour les challengers que pour les favoris. La gestion de la peur, de la pression, nous n’avons pas réussi. Il faut un gros travail physique et mental pour sept matchs, peut-être plus, de ce niveau et là on descend à notre place. Je crois à ça dans le sport, que l’entraîneur est le premier préparateur mental de l’équipe, même s’il n’est pas seul. Il transmet l’énergie, la sérénité ou le stress. Je suis conscient de ça, il faut communiquer selon ce qui est le mieux pour l’équipe. Les joueurs ont tout livré pour la bataille. À chaud c’est dur, mais il faudra vite analyser, faire avec nos moyens, développer les joueurs. On a une grosse marge, ça passe par le travail dans les clubs, le championnat, la fédération. Tout le monde doit faire mieux. Là, on n’est pas dans la cour des grands, et ce processus prendra du temps. »
France – Slovénie 1-3 (0-2, 0-0, 1-1)
Lundi 19 mai 2025, 16h20. Avicii Arena de Stockholm, 3273 spectateurs.
Arbitres : Mads Frandsen (DAN) et Andre Schrader (ALL) assistés de Albert Ankerst Jerne (DAN) et Jiří Ondráček (TCH)
Pénalités : France 8’ (4’, 2’, 2’) ; Slovénie 4’ (2’, 0’, 2’)
Tirs : France 29 (5, 10, 14) ; Slovénie 25 (10, 9, 6)
Récapitulatif du score
0-1 à 09’22” : Jezovšek assisté de Mašič et Kapel (double sup. num.)
0-2 à 16’21” : Simšič assisté de Kapel et Mahkovec
1-2 à 58’05” : T. Bozon assisté de Texier
1-3 à 59’45” : Török (cage vide)
France
Attaquants :
Jordann Perret (-1) – Pierre-Édouard Bellemare (C) – Alexandre Texier (2′,-1)
Baptiste Bruche (2′) – Louis Boudon (A, 2′, -1) – Anthony Rech (+1)
Kévin Bozon (2′) – Nicolas Ritz – Tim Bozon
Sacha Treille – Guillaume Leclerc (-1) – Fabien Colotti
Défenseurs :
Vincent Llorca – Hugo Gallet
Pierre Crinon (-1) – Jules Boscq (-1)
Enzo Guebey – Kevin Spinozzi
Fabien Bourgeois
Gardien :
Quentin Papillon [sorti de à 57’29” à 58’05” et de 58’14” à 59’45”]
Remplaçants : Antoine Keller (G), Aurélien Dair (A). En réserve : Julian Junca (G), Charles Bertrand (A), Yohan Coulaud (D). Substitué sur blessure : Dylan Fabre (A, remplacé par Bruche)
Slovénie
Attaquants
Robert Sabolič (C) – Matic Török (A) – Ken Ograjenšek
Marcel Mahkovec (+1) – Nik Simšič (+1) – Rok Kapel (+1)
Jan Drozg – Rok Macuh – Žan Jezovšek
Jaka Sodja – Miha Beričič (2′) – Nace Langus
Filip Sitar
Défenseurs :
Jan Goličič – Blaž Gregorc (+1)
Bine Mašič (+1) – Aleksandar Magovac
Miha Štebih – Jan Ćosić (2′)
Gardien :
Lukáš Horák
Remplaçants : Zan Uš (G), Urban Podrekar (D). En réserve : Matija Pintarič (G), Filip Sitar (A), Anže Žeželj (A), Matic Podlipnik (D)