À chaque défaite du Kazakhstan, la Hongrie s’approche un peu plus du maintien vers l’élite mondiale. Elle peut aussi l’obtenir elle-même si elle obtient un petit point de plus. Cela s’annonce tout de même difficile tant la Suisse impressionne depuis neuf jours. C’est un autre monde, une planète inconnue. Lors de la dernière confrontation entre ses deux pays au Mondial B 1985 (9-1), Andres Ambühl avait un an et les autres acteurs du match du soir n’avaient pas encore été conçus…
La Nati met certains de ses meilleurs joueurs au repos pour la soirée (Siegenthaler, Malgin et Andrighetto), mais les Hongrois aussi : le meilleur gardien Bence Balizs et le meilleur défenseur Henrik Nilsson sont préservés pour l’échéance capitale contre la Norvège.
Quelles que soient leurs intentions initiales, les Hongrois se retrouvent bien vite à subir le jeu. Ils ont pourtant une opportunité de contre-attaque sur un long que qu’Andreas Mihalik récupère aux dépens de Michael Fora, mais l’ailier magyar pousse trop le palet dans sa feinte sous la menace du poke-check de Genoni et n’arrive pas à conclure ce face-à-face par le moindre tir.
Dans les trois minutes qui suivent, la Suisse éteint les espoirs des rouges en démontrant la variété de ses atouts. Un but en pur jeu de position, installé en zone offensive : Anders Ambühl dévie devant le gardien le tir de la ligne bleue de Dominik Egli (0-1). Un but en mouvement, à la faveur d’un changement de ligne hongrois : Dean Kukan donne le palet en zone neutre à Timo Meier lancé qui fonce entre les défenseurs et s’approche du gardien Ádám Vay pour un tir de près (0-2, photo ci-dessous). Seul le poteau empêchera un troisième but sur un tir en pivot de Kevin Fiala entre les cercles.
Leur équipe est engluée dans le chocolat mais les supporters hongrois ne s’ennuient pas, ils continuent de s’animer, de chanter et de sauter. Ils ont du mérite. Le match est tellement sous contrôle de la Suisse qu’il devient bloqué. Pendant les onze premières minutes de la deuxième période, le compteur des tirs affiche à peine 2 à 1 par la Nati. Le troisième tir cadré finit au fond : un slap de la ligne bleue de Dominik Egli dévié entre les jambes du défenseur Ortenszky (0-3).
La Hongrie commence à perdre sa concentration et à commettre des erreurs qu’elle évitait jusque là : Kristoff Papp se fait voler le palet en zone neutre par Timo Meier puis Bence Szabo se fait contrer le palet près de son but par Tyler Moy. La rondelle file à la verticale et est contrôlée du gant par Fiala quand elle retombe : centre pour le tir de Moy sous les bottes du gardien, et but offert à Meier dans une cage complètement vide (0-4, photo ci-dessous).
Ádám Vay se reprend en repoussant la reprise de Nicolas Baechler, servi au poteau gauche par une diagonale de Meier, mais Baechler donne alors en retrait à Janis Moser qui lance un missile dans la lucarne opposée (0-5). La rondelle ne quitte plus les cannes des joueurs à croix blanche, la Hongrie souffre énormément sans sa zone et la sirène est une délivrance.
Un but est logiquement refusé à Moy car Kevin Fiala a bousculé le gardien. Mais le festival offensif se poursuit avec un doublé de Dominik Egli (0-6), un lancer du capitaine Andrea Glauser dévié sous les bottes de son malheureux gardien par la crosse de Hari (0-8) et surtout un incroyable hat-trick d’Andres Ambühl, servi seul devant la cage par Sandro Schmid (0-7), puis auteur d’un tir rasant à une minute de la fin en utilisant le trafic (0-9). Le Grison de 41 ans n’avait pas inscrit de point dans cet ultime tournoi, voilà qu’il ajoute 3 buts à sa gigantesque carrière pour une autre page de sa légende.
Cela fait un moment qu’on compatit pour les Hongrois, dont les supporters ont maintenant les mines déconfites. Seul le public suisse chante encore. Et ce n’est pas fini, Kevin Fiala vient marquer un dernier but du revers à trente secondes de la fin. Le coach hongrois demande un challenge car la jambe de Fiala percute la botte du gardien au moment où le puck la franchit. Mais il boira le calice jusqu’à la lie, les arbitres confirment le but et le score à deux chiffres (0-10).
La stat la plus incroyable, c’est que la Hongrie a encaissé plus de buts (10) qu’elle n’a cadré de tirs (6). N’enfonçons pas plus loin le couteau dans la plaie…. Consolons les perdants par un constat : comment croire que cette équipe suisse laissera le moindre point au Kazakhstan ? La force de la Nati est la garantie que les Magyars resteront dans l’élite quoi qu’il arrive demain, et qu’ils iront visiter la confédération dans un an…
Andres Ambühl devient le plus vieux joueur à réussir un triplé au championnat du monde, et le deuxième meilleur marqueur suisse de l’histoire derrière Bibi Torriani. La Suisse réussit la plus large victoire dans un Mondial depuis un Russie-Italie sur le même score en 2019. Elle est déjà impressionnante, et dans la nuit, elle confirme l’arrivée de Nino Niederreiter, qui substituera le blessé Nico Hischier.
Désignés joueurs du match : Tamás Ortenszky pour la Hongrie et Andres Ambühl (photo) pour la Suisse.
Commentaires d’après-match :
Tamás Ortenszky (défenseur de la Hongrie) : « Nous avons produit un bel effort, nous avons bloqué beaucoup de tirs, nous avons patiné contre une équipe meilleure sur le papier, nous avons combattu, maintenant nous nous concentrons sur le prochain match contre la Norvège demain. Si nous gagnons, nous nous maintenons. Ce n’est jamais arrivé à la Hongrie, on essaie de faire en sorte que ça arrive. J’ai des amis qui me regardent en Suisse [NDLR : il joue à Winterthour], des amis qui me regardent en Hongrie, c’est le meilleur des deux mondes, c’est super fun. »
Patrick Fischer (entraîneur de la Suisse) : « Nous avons bien joué derrière et beaucoup créé devant. C’était un test de caractère pour nous. Nous savons comment nous devons jouer, que ce soit contre la Hongrie, contre le Kazakhstan ou en quart de finale, et c’est que nous avons fait. Une victoire 10-0 et un hat-trick pour Büehli [Andres Ambühl] – quelle histoire formidable ! »
Gergely Majoross (entraîneur de la Hongrie) : « On a pris la réalité en pleine face. Bien sûr, nous n’étions pas à notre meilleur. Nous n’en sommes pas au point où nous pouvons réussir autant de matchs en si peu de temps à un tel niveau. Avec notre meilleure performance, nous aurions peut-être pu contenir l’adversaire à 5 ou 6 buts. Ce match est instructif pour comprendre que ce que nous faisons en Hongrie ne suffit pas pour rivaliser avec la Suisse. Notre travail n’est pas suffisant, il n’y a pas assez de pression sur les jeunes, pas de vraie compétition, pas assez de joueurs de première division, c’est tout. »
Hongrie – Suisse 0-10 (0-2, 0-3, 0-5)
Dimanche 18 mai 2025 à 20h20 au Jyske Bank Boxen de Herning. 2846 spectateurs.
Arbitres : Riku Brander (FIN) et Christian Ofner (AUT) assistés de Danny Beresford (GBR) et Nick Briganti (USA).
Pénalités : Hongrie 6’ (2’, 2’, 2’) ; Suisse 4’ (2’, 0’, 2’).
Tirs : Hongrie 6 (3, 1, 2) ; Suisse 37 (11, 10, 16).
Évolution du score :
0-1 à 05’44” : Ambühl assisté d’Egli et Moser
0-2 à 07’25” : Meier assisté de Kukan
0-3 à 31’57” : Egli assisté de Glauser et Fiala
0-4 à 33’24” : Meier assisté de Moy et Fiala
0-5 à 35’21” : Meier assisté de Baechler et Meier
0-6 à 50’03” : Egli assisté de Moser et Meier
0-7 à 50’51” : Ambühl assisté de Schmid et Marti
0-8 à 54’49” : Glauser assisté de Jäger et Knak
0-9 à 58’53” : Ambühl assisté de Fora et Moser
0-10 à 59’20” : Fiala assisté de Moy et Marti
Hongrie (2’ pour retard de jeu)
Attaquants :
Domán Szongoth (-2) – János Hári (A, -3) – Vilmos Galló (A, -3)
Csanád Erdély (C, -3) – Kristóf Papp (-3) – Péter Vincze (-3)
Bence Horváth (-1) – Krisztián Nagy (-3) – András Mihalik (-2)
Gergő Ambrus (-1) – Kristof Németh (-1) – Ákos Mihály (-3, 2’)
Ferenc Laskawy (-2, 2’)
Défenseurs :
Zsombor Garát (-2) – Milán Horváth (-3)
Zétény Hadobás (-3) – Tamás Ortenszky (-3)
Bence Szabó (-3) – Simon Szathmary (-3)
Gabor Tornyai (-3)
Gardien :
Ádám Vay
Remplaçant : Dominik Horváth (G). En réserve : Bence Bálizs (G), Henrik Nilsson (D), István Terbócs (A).
Suisse
Attaquants :
Kevin Fiala (+5) – Tyler Moy (+3) – Timo Meier (+5)
Grégory Hofmann (+1, 2’) – Ken Jäger (+1) – Damien Riat (+2)
Simon Knak (+2) – Sandro Schmid (+2) – Christoph Bertschy (2’)
Andres Ambühl (A, +5) – Nico Baechler (+4)
Défenseurs :
Tim Berni (+2) – Dean Kukan (+3)
Janis Moser (+5) – Andrea Glauser (C, +4)
Christian Marti (A) – Michael Fora (+2)
Dominik Egli (+4)
Gardien :
Leonardo Genoni
Remplaçant : Stéphane Charlin (G). En réserve : Sandro Aeschlimann (G), Jonas Siegenthaler (D), Denis Malgin, Sven Andrighetto (A), Nico Hischier (A, blessé).