La plus intéressante division de KHL ?
Avce ses clubs-phares et son ouverture internationale, la division Bobrov est peut-être celle qui suscite le plus de curiosité en KHL. En tout cas, elle ne manque pas d’évènements étonnants :
– le gros gibier Ilya Kovalchuk
– un joueur-vedette poursuivi par la presse et viré pour alcoolisme
– Sergei Fedorov accusé de harcèlement moral et de mépris pour les entraîneurs russes
– une équipe nord-américaine perdue au beau milieu de la KHL
– une pépite vue l’hiver dernier à Amiens et qui brille subitement en KHL

Pour autant, cette agressivité sur le marché n’a jamais permis au SKA d’atteindre la finale de la Coupe Gagarine. Cela fait deux ans qu’il bute sur le Dynamo Moscou, qui ne recrute aucune star mais s’appuie sur un système de jeu bien établi. Ces bases tactiques, Jukka Jalonen a été chargé de les mettre en place depuis décembre dernier. Il peut désormais reconstruire l’équipe à son image, maintenant que les vétérans insatisfaits (Afinogenov, Artyukhin, Rybin, Nepryaev) sont partis. Et le moins qu’on puisse dire est que les critiques le laissent froid.
L’attaque a donc été rajeunie, avec beaucoup de vitesse. Jalonen a maintenant l’embarras du choix : remettre Viktor Tikhonov – en deuil de son père mort dans un accident domestique – sur la ligne de Patrick Thoresen et Tony Mårtensson avec laquelle il est devenu meilleur buteur en play-offs, ou l’apparier de nouveau à Kovalchuk comme en début de saison pendant le lock-out. L’arrivée du Tchèque Roman Cervenka, qui peut jouer centre ou ailier comme Tikhonov, multiplie les possibilités. Le SKA a aussi recruté les deux vedettes offensives du Severstal, le mobile et très créatif Vadim Shipachev, à qui il manque juste un peu de physique, et Evgeni Ketov, qui possède justement cet ingrédient supplémentaire qui en fait un hockeyeur très complet. Ajoutez-y les joueurs qui ont fait leurs preuves au sein du club (Kucheryavenko, Makarov), les jeunes (Panarin, Burdasov) et la dernière recrue Aleksei Ponikarovsky, arrivé tout droit de neuf saisons NHL pour amener sa percussion physique sur la quatrième ligne, et vous comprendrez que la composition offensive du SKA n’a rien à envier à la majorité des formations de NHL.
La défense a été peu modifiée : Pervyshin, qui n’était même pas titulaire, a simplement été échangé au CSKA contre Evgeni Ryasensky, étonné de cette transaction soudaine « à l’américaine ». Il a avoué ne même pas connaître l’identité de l’entraîneur de son nouveau club. Ryasensky ne sait donc pas qui est Jalonen… mais Jalonen, lui, sait qui est Ryasensky : « C’est vraiment un défenseur de haut niveau. Il joue constamment la tête haute, ne fait pas d’erreurs dans sa zone et peut accélérer l’attaque par sa première passe. »
L’interrogation concerne toujours le même poste : celui de gardien. C’est le seul secteur où le recrutement du SKA n’arrive jamais à ses fins. Avant d’embaucher Kovalchuk, il avait envisagé d’utiliser son « joker » (le SKA tutoie la limite salariale de 39 millions de dollars mais chaque club a droit à un joueur-star ne comptant pas dans le plafond) pour Sergei Bobrovsky, fraîchement élu meilleur gardien de NHL. Il aurait facilement pu doubler son salaire, mais après s’être révélé sur une saison écourtée, il a encore des choses à prouver aux États-Unis. Bien des clubs se satisferaient d’un Aleksandr Salak dans les cages, surtout avec une doublure éprouvée comme Ilya Ezhov. Mais depuis l’expérience Stepanek, le SKA se méfie de profil du jeune international tchèque de Salak. Mais si aucun gardien n’avait supporté jusqu’ici la pression du CSKA, n’était-ce parce que les entraîneurs n’avaient pas un système défensif aussi sûr que celui de Jalonen ?

La vérité que le club tchèque a poliment cachée, c’est le président de la KHL Aleksandr Medvedev qui s’est chargée de la dire : « Selon nos informations, il était ivre. Lisons le code d’honneur de la KHL. Quand un de nos hockeyeurs a un problème avec l’alcool, on l’envoie en traitement obligatoire sur le modèle de la NHL. » Zherdev est rentré à Moscou et signera au Spartak.
Malgré ce recrutement avorté, le Lev garde une belle armada de toutes nationalités : deux gardiens internationaux finlandais (Petri Vehanen et Atte Engren) et une incroyable défense avec quatre défenseurs canadiens dont le gabarit estampillé NHL (196 cm, 106 kg) de Ryan O’Byrne, deux Finlandais plus trois internationaux tchèques. En attaque, on compte quatre Suédois : deux champions du monde en mai dernier (Martin Thörnberg et Nicklas Danielsson), le meilleur marqueur de DEL Calle Ridderwall et le centre défensif Patrik Zackrisson.
Mais pourquoi pas plus de Tchèques ? D’une part, les clubs non-russes ne subissent aucune restriction sur le nombre d’étrangers en KHL. D’autre part, le Lev reste licencié à la fédération tchèque et soumis à ses règlements. S’il recrute un joueur de son pays, il doit payer une indemnité de transfert à son ancien club. Il préfère donc se fournir « gratuitement » ailleurs. Après, ce sera à l’entraîneur Vaclav Sykora de trouver la bonne formule parmi ces nombreux éléments qui pourraient tous prétendre aux premiers rôles, mais vont devoir formé un collectif soudé.

Dans le staff technique, il ne reste plus personne ! L’entraîneur de l’an passé Vyacheslav Butsaev est toujours salarié mais a été expulsé de son bureau et envoyé au « placard », un bureau proche du vestiaire et occupé préalablement par Nemchinov, pour le pousser à son tour à la démission. Ses adjoints ont disparu : le regretté Vassili Tikhonov au sens propre, et Evgeni Namestnikov viré, comme l’entraîneur des gardiens Yuri Shundrov. Même le responsable matériel Konstantin Rohatyn a démissionné après s’être vu refuser une augmentation de salaire. Quand son remplaçant a mal affûté les patins d’Aleksandr Radulov, la star râleuse s’est vite emportée…
Après avoir fait le vide, Fedorov a confié les clés du CSKA aux Américains ! L’ancien club de l’armée rouge encadré par les ennemis d’hier (et d’aujourd’hui ?)… Certains doivent se retourner dans leurs tombes ! En plus, il s’agit d’un inconnu d’AHL, John Torchetti. Peut-être s’agit-il au moins d’un esprit cultivé, ouvert à l’international ? La première impression fut une catastrophe médiatique. Dès sa première interview sur le sol russe, Torchetti a dit ne pas savoir qui est Gagarine ! Le cosmonaute héros de toute la Russie, même 50 ans après, au point qu’on a donné son nom au trophée de champion KHL ! Torchetti a amené tout son staff avec lui : l’assistant Daniel Brooks (fils de l’homme-miracle Herb Brooks), le préparateur physique Barry Brennan et le kiné Hassan Saïd.
Face aux critiques virulentes, Sergei Fedorov a dû s’expliquer : « Inviter des entraîneurs étrangers semble peut-être une tendance illogique, mais ce sont de vrais professionnels, prêts à travailler 24 heures par jour, et si la journée est de 48 heures, ce sera 48. Quant aux experts russes, c’est un grand point d’interrogation. Torchetti et Brooks nous donnent l’horaire des six mois à venir, jusque dans le moindre détail. Ils ne pensent qu’à l’équipe. Ils parlent beaucoup, essaient de parler en russe. Leur venue, c’est une mise à niveau pour le CSKA Moscou. » Les arguments employés, vexants pour les entraîneurs russes, ont encore plus braqué l’opposition.
Et en ce qui concerne l’effectif ? Le CSKA a accepté l’ultimatum de Yakov Rylov en lui accordant un très gros salaire, et en a donc fait de loin son défenseur numéro 1. Le même effort ne pouvait pas être fait sur Evgeni Ryasensky, d’où l’échange a priori déséquilibré de l’international au SKA contre Andrei Pervyshin. Les lignes arrières moscovites semblent maintenant manquer de profils purement défensifs.
En attaque, par contre, le CSKA s’est beaucoup amélioré : des ex-internationaux en perte de vitesse (Oleg Saprykin, Fedor Fedorov, Ivan Nepryaev), des étrangers (Ilari Filppula, Brandon Reid) et surtout l’ancien capitaine de l’équipe nationale Aleksei Morozov. Mais en privant Aleksandr Radulov – « un joueur qui avait un problème de discipline » – du capitanat au profit du nouveau venu Morozov, Torchetti prend un risque avec un caractère difficile que l’on a déjà privé de son frère Igor Radulov, mais qui reste le joueur indispensable quoi qu’il arrive.

L’ancien capitaine, le meilleur marqueur Martins Karsums, est parti au Dynamo Moscou, et il faudra apprendre à se passer de cette pièce maîtresse. Peut-être une occasion supplémentaire pour le jeune Miks Indrasis de franchir un palier supplémentaire.
Mais faute de joueurs lettons aussi dominants, le sort de Riga est désormais principalement confié à des Canadiens. Le centre Paul Szczechura avait déjà convaincu l’an passé, il a été rejoint par deux compatriotes. Mat Robinson est un défenseur offensif bien connu en Scandinavie (deux saisons à Timrå après avoir été champion de Norvège). Kyle Wilson est un profil assez comparable à Szczechura, pas très physique pour le jeu nord-américain, mais bon patineur solide aux mises au jeu et utile en KHL. Il a même un potentiel offensif supérieur.
Le poste de centre étant faible en Lettonie, le Dinamo a choisi de le confier au pays-référence en la matière en se dotant de cette colonne vertébrale canadienne. Les principaux ailiers sont en revanche slovaques, avec Hossa mais également l’autre international Marcel Hascak.

Les Nord-Américains d’ascendance croate formaient le socle initial, et ensuite ils ont simplement invité leurs amis et les amis de leurs amis. Le résultat se laisse regarder. La grande star se nomme Jonathan Cheechoo, meilleur buteur de NHL en 2005/06. On retrouve aussi des défenseurs de la trempe de Kurtis Foster (408 matches de NHL avec 162 points) ou de Steve Montador, qui compte 614 matches de NHL mais rentre d’une saison quasi-blanche sur blessure.
L’entrée en matière tonitruante contre le CSKA (7-1 !) a immédiatement envoyé un message à toute la KHL. Le déplacement à Zagreb, sur une patinoire réduite à 58 mètres sur 28, est à redouter. Le fait de puiser dans l’inépuisable réservoir nord-américain permet au Medvescak de contourner son infériorité budgétaire. Et comme l’équipe entraînée par Mark French (coach champion d’AHL à Hershey en 2009) pratique un hockey agressif inhabituel dans ces contrées, elle peut prendre de court les adversaires qui peineront à s’habituer à ce changement de style par rapport au reste du championnat.

Le point positif est que le Slovan a conservé ses six meilleurs marqueurs. Le point négatif est qu’aucun joueur de ce top-6 offensif n’a inscrit plus de onze buts ! L’équipe slovaque valait en effet surtout par le système mis en place par l’entraîneur Rostislav Cada et n’a aucun vrai tueur en attaque. A priori, cet esprit fondé sur l’homogénéité et le travail défensif peut tout à fait se conserver avec un petit budget.
Mais la difficulté, c’est de savoir – a posteriori – quelle part les deux défenseurs de NHL Andrej Sekera et Lubomir Visnovsky ont eu dans les bons résultats du Slovan. Quand le lock-out s’est terminé en janvier dernier, Bratislava s’était tourné vers un joker tchèque, Tomas Mojzis, qui avait à son tour tenu le choc.
Dans la mesure où les Slovaques disponibles avaient déjà été rassemblés, le recrutement estival a continué de s’orienter vers cette même filière tchèque. Oui, pendant que le Lev recrute des étrangers, le Slovan engage des Tchèques ! Il s’agit de deux autres défenseurs, l’ex-joueur de NHL Martin Skoula et l’international Zdenek Kutlak qui rentre de six saisons de LNA suisse à Ambrì-Piotta, de l’attaquant au patinage énergique Tomas Netik et du second gardien Miroslav Kopriva. La formation slovaque gardera-t-elle son bon équilibre avec cette petite adjonction étrangère ?

Avec l’international norvégien Lars Haugen, le duo qui prend place dans les cages est donc de formation étrangère. En revanche, la défense doit se contenter de deux imports, l’international tchèque Lukas Krajicek et l’ancien joueur de NHL Derek Meech. Les autres arrières biélorusses peuvent ainsi s’étalonner au haut niveau.
En attaque, le Dynamo Minsk a bénéficié de la libération providentielle d’Aleksei Kalyuzhny, aussitôt promu capitaine à la place de Platt. Il a été positionné sur la première ligne entre les deux ailiers Platt et Jacob Micflikier (ex-Bienne), qui se sont confrontés à une totale différence d’éducation : ils allaient droit à la cage pendant que le centre biélorusse jouait calmement et posément à la recherche d’une passe. Aleksandr Andrievsky, entraîneur débarrassé du qualificatif d' »intérimaire », paraît prêt à ne pas s’entêter avec ce trio.
Le recours, qui a commence comme deuxième centre entre le Tchèque Zbynek Irgl et le Slovaque Tomas Surovy, se nomme Artur Gavrus. Le joueur dominant du dernier Mondial U20 de division I à Amiens est assurément le grand bénéficiaire de la nouvelle politique du Dynamo Minsk : il dispose d’un gros temps de jeu à très haut niveau pour progresser, lui qui est le principal espoir d’un pays en manque de relève.






































